Rio 2016 : Mehdi Marzouki, le water-polo dans la peau
Les débuts
Né à Noisy-le-Sec en région parisienne, Mehdi Marzouki débute par le judo. Mais le hasard fait toujours bien les choses et ne va pas tarder à mettre son grain de sel. "Je n’étais pas top au judo. En dessous, il y avait la piscine où j’allais voir mon grand-frère, faire du water-polo. J’ai débuté à la natation, mais comme je trouvais ça ennuyeux de juste nager, les entraîneurs m’ont dit d’essayer le water-polo. Ca a commencé comme ça". L’effort solitaire dans les bassins, très peu pour lui, Mehdi préfère le ludique.
"Dès qu’on arrivait, on courrait tous à la cage à ballon. Il y avait les bons et les moins bons. C’était la guerre, on jouait des coudes, se souvient-t-il. Les entraîneurs voulaient nous inculquer que chacun devait avoir son ballon. On faisait des longueurs avec. Quand il fallait seulement nager en revanche… On n’aimait pas, mais sans ça tu ne jouais pas". Le jeune qu’il est, rêve alors d’intégrer l’équipe sénior de water-polo de Noisy-le-Sec, "celle des grands". "Ils étaient en troisième division, mais pour moi, c’étaient des stars. Puis j’ai évolué avec eux et je me suis rendu compte que je rêvais de choses accessibles. C’étaient eux mes modèles, pas des basketteurs". Lui et ses potes s’entassaient dans les gradins le samedi pour les voir. "Le match était à 20 heures, on se retrouvait à 19 heures pour avoir les meilleures places", sourit-il. Bientôt, c’est lui qu’on viendrait voir.
L’envol
Après un passage à l’INSEP et à Noisy, il s’envole pour le sud de la France à Nice puis intègre le prestigieux Cercle des Nageurs de Marseille. Là-bas, au contact des stars de la natation française, il découvre le haut niveau. "J’ai tout de suite été impressionné par le complexe, tu te dis que tu es vraiment pro", explique-t-il. Les premiers résultats probants suivent. Une demi-finale de coupe d’Europe dès la première année. "C’est là que ma vraie carrière a commencé, on avait plus de visibilité, on jouait l’Europe". La première année, en plus de cette demie, il remporte le championnat et la coupe de France. Suivront des années à Barcelone au club de Matoro et à Berlin.
Le penalty
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"Quand je revois le penalty, j’en ai encore des frissons". Les étoiles dans les yeux, la voix passionnée, Medhi Marzouki raconte mieux que personne ce moment qui a ramené le water-polo français aux JO. Début avril, lui et ses coéquipiers disputent le TQO. En quarts de finale, dont le vainqueur décrochera son billet pour Rio, les Français affrontent les Pays-Bas. Huit partout à la fin du temps réglementaire. Le reste s’écoute et se lit. "Le match se termine, on sait que tout peut arriver aux penalties. J’ai plus d’expérience, je sais gérer la pression et je demande de tirer en dernier. C’est difficile de trouver cinq tireurs mais on peut le comprendre, on joue une qualification olympique. Les Hollandais débutent et marquent. Je préviens Mathieu (Peisson, le premier tireur, ndlr) en disant que le ballon glisse. Il rate. Il devient fou. Je le remets dedans puis Rémi (Garsau, le gardien, ndlr) arrête le tir néerlandais. Juste avant que je m’avance pour tirer, je prie pour un nouvel exploit. Rémi le fait. Au moment où je prends la balle, je me dis que tout le monde me regarde. Je me tourne vers mon banc, je vois une lueur d’espoir dans les regards. Je ne peux pas le rater. Je regarde le coach, il fait mine de ne pas être stressé, mais je vois bien qu’il l’est, comme pas possible. Le gardien hollandais commence à me jeter de l’eau, à faire du trash-talk, à m’insulter... L’arbitre le calme. Je tire tout le temps en haut à gauche. J’avais choisi mon côté et j’ai envoyé tout ce que j’avais. Je n’ai même pas vu la balle rentrer, j’ai vu le banc sauter et crier. Ce sentiment de bonheur, c’est immense, j’avais jamais vécu ça. Tu es ailleurs, tu cries, tu lâches tout, le stress, la nervosité, tout s’évacue…".
L’équipe de France
Cette qualification olympique a été la récompense de longues années de galère. "Huit ans, souffle-t-il. On était parfois dans des auberges perdues dans la campagne slovaque", raconte-t-il. Des anecdotes comme ça il en a à la pelle. "En Turquie, on était venu nous chercher dans un minibus de 13 places sans coffre, donc aucune place pour mettre nos sacs qui s’amassaient dans le couloir". Ces moments ont soudé le groupe qui n’a que peu bougé durant toutes ces années. "Ca été notre force, avance-t-il, le système de jeu a peu évolué également et Florian (Bruzzo, le sélectionneur) est restée dans la lignée de son prédécesseur". Au TQO, les Bleus avaient la pression car il savait qu’il y avait une belle génération.
"On a une très belle équipe. Chaque joueur a un très haut niveau. Rio, c’était la dernière chance pour nous de faire des JO tous ensemble, à Tokyo, l’équipe aurait changé". Pour l’instant, les Bleus n’ont pas encore remporté un match. Il reste deux rencontres contre les Etats-Unis ce mercredi et l’Espagne (vendredi, ndlr) pour "faire honneur à la France". Car après 24 ans d'attente pour retrouver les JO (Barcelone 92), Mehdi ne veut perdre de temps et pourquoi pas créer des vocations. "Si en nous voyant, les enfants demandent à leurs parents de faire du water-polo plutôt qu’au foot ou au judo, on aura réussi"…
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