Rio 2016 : Groom, vétérinaire, maréchal, l'équitation française olympique vue de l'intérieur
Le staff de l’équipe de France à Rio se compose d’une quarantaine de personnes. Entre les cavaliers (12) et les "petites mains", tout aussi importantes, l’équipe de France peut compter sur un personnel de haut niveau.
David Germain, maréchal
Le maréchal est le cordonnier du cheval. "Je suis le responsable des ferrures des chevaux", éclaire David Germain qui vit au Brésil ses neuvièmes JO. Son aventure avec les Bleus a débuté en 1984 à Los Angeles. Le monde du maréchal est assez technique et spécifique en fonction des disciplines équestres (Concours complet, dressage et saut d’obstacles). Une base pourtant est inamovible, les chevaux doivent "être ferrés entre 15 et 18 jours avant la compétition". C’est à partir de cette période que les pieds du cheval sont les plus costauds et le rendent plus à l'aise. Le fer est une chaussure pour le cheval (un fer se dit "shoe" en anglais, ndlr) et en fonction de la discipline, il va être différent. Un marathonien et un basketteur n’ont pas les mêmes chaussures, pour les chevaux c’est pareil. "La ferrure du concours complet se rapproche de la ferrure de course où les fers sont très ajustés, où le cheval a moins de prise pour se déferrer".
Celle du dressage est plus longue et large pour l’aisance de la monture et le CSO (saut d’obstacles) mélange les deux spécificités. Ici aux JO, le plus haut niveau mondial, les fers sont des objets de haute précision avec des ferrures orthopédiques, des plaques ou du silicone, notamment pour le CSO. "On peut comparer ça avec les danseurs", illustre Virgine Couperie-Eiffel, consultante pour Francetv Sport. "Quand les chevaux atterrissent, la pression sur les fers est énorme, ça équivaut à 10 fois le poids du cheval", soit environ 6 tonnes (une monture pèse en moyenne 600 kg), précise David Germain. Ce dernier n’est jamais loin des chevaux. "Il faut aimer ça, assure-t-il, mes seules vacances, c’est quand je suis aux JO ou sur les grandes compétitions". Avec le vétérinaire, le maréchal forme un binôme qui veille à la bonne santé du cheval. "Quand on est debout sur nos pieds toute la journée, ça nous agace. C’est la même chose pour eux", synthétise-t-il. Grâce à lui, les 15 montures tricolores ne sont pas forcément les plus mal chaussées.
Jérôme Thevenot, vétérinaire
Le vétérinaire est un autre maillon essentiel de cette équipe de France. Jérôme Thevenot exerce ce métier depuis douze ans, dont les huit derniers, depuis les JO d'Athènes, au plus haut niveau. "Je suis les chevaux tout au long de l’année sur le plan médico-sportif", explique-t-il. Il a un rôle dans le processus de sélection et dans les programmes d’entraînement et de compétitions des montures. "Plusieurs paramètres entrent en compte dans le processus de sélection, poursuit-il, les blessures, mais aussi le niveau de performance et la régularité car les compétitions sont longues et il faut un physique solide pour aller jusqu’au bout". Jérôme Thévenot a cinq chevaux, ceux du CSO, à s’occuper. Deux autres vétérinaires gèrent le concours complet et le dressage. Chaque discipline engendre des blessures différentes. "En CSO, on trouve beaucoup de pathologies de pieds à cause des réceptions, sur les postérieurs, au niveau des ligaments, en raison de la propulsion au moment de la poussée".
Réactif et expérimenté, le vétérinaire doit avoir une bonne connaissance du sport et de la médecine sportive. Un sens de l’observation est nécessaire car le vétérinaire glane un "tas d’informations en voyant les chevaux s’entraîner, sauter". Cette observation permet de mieux prévoir les risques de blessures. "Cela reste des animaux, donc c’est compliqué de savoir où ils ont mal, tout simplement", déclare Jérôme. Pour les JO, le vétérinaire a dû résoudre les risques de blessures liés au transport. "Les chevaux internationaux voyagent beaucoup, en avion, en bateau, surtout pour le CSO et des pathologies peuvent apparaître". Pour ces Jeux, il a fallu 12 heures d’avion pour faire venir les montures au Brésil. Un voyage où "tout s’est bien passé", sourit Sophie Dubourg, la DTN.
Laurence Gazel, groom
Si le cavalier français Kevin Staut peut se concentrer uniquement sur sa compétition, il le doit à une femme de l’ombre: Laurence Gazel. Elle travaille avec lui depuis huit ans et s’occupe quotidiennement à Rio de "Rêveur de Hurtebise", son cheval. Laurence est 'groom', ce qui signifie concrètement qu’elle "s’occupe du cheval du matin au soir". Les 15 montures (12+3 remplaçantes) ont chacune le leur. Nourriture, box, entretien, massage, tout est à la charge du groom qui entretient une relation forcément particulière avec la monture dont il s’occupe. "Le cavalier connaît très bien son cheval en compétition, quand il est dessus, mais nous aussi car on vit tout le temps avec lui", informe Laurence. La fatigue, le stress, la méforme, rien n’échappe au groom qui doit être capable de voir, "en arrivant le matin", si le cheval est bien ou pas.
Le groom a un rôle en amont et en aval de la compétition. Avant, il doit sentir quels sont les besoins de la bête. Après, il doit être là pour le 'remobiliser' au besoin. "S’il a des courbatures, il faut marcher davantage le matin, s’il est stressé, nous devons rester plus avec lui pour le rassurer", précise-t-elle. Le groom n’est pas face à une personne qui le comprend, mais il doit être capable de faire sentir au cheval qu’à la veille, ou au matin, d’une compétition, celui-ci doit être prêt à 'performer'. Une tâche pas forcément aisée surtout pour les montures qui concourent pour le CSO, dernière épreuve aux JO, alors que les chevaux sont là depuis 10 jours. Ce conditionnement nécessaire à la compétition pousse parfois les grooms à "devenir fou", rigole-t-elle. "On commence à leur parler", ajoute la jeune femme. Ou quand on se rapproche du film avec Robert Redford, 'L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux'. Quand la compétition commence en revanche, le cavalier est seul maître à bord. "Si le cheval se rate, le cavalier doit se surpasser pour faire comprendre qu’il a fait mal et qu’il doit tout donner", conclut-elle.
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