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JO 2018 : le rapprochement avec la Corée du Nord loin de faire l'unanimité au Sud

Les efforts de Séoul pour obtenir une présence nord-coréenne à ses "Jeux de la Paix" sont loin de faire l'unanimité en Corée du Sud, où certains craignent que les JO de Pyeongchang ne soient devenus les JO de Pyongyang.
Article rédigé par franceinfo: sport avec AFP
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
Des manifestants sud-coréens brûlent un drapeau nord-coréen à côté d'une photo de Kim Jong-Un lors d'un rassemblement anti-nord-coréen à Séoul le 22 janvier 2018. (- / YONHAP)

Des "Jeux de la Paix", mais aussi de la discorde en Corée du Sud. Depuis plusieurs jours, le rapprochement amorcé avec la Corée du Nord par le président Sud-Coréen Moon Jae-In fait grincer des dents du côté du Sud, certains estimant que ce dernier est allé trop loin dans les concessions pour plaire à l'imprévisible voisin et dénonçant le fait que le chef de l'Etat aurait sacrifié des sportifs du Sud sur l'autel de la politique. Lundi, des manifestants ont brûlé à Séoul une effigie du dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un et le drapeau du Nord, au moment où s'achevait une visite d'une délégation nord-coréenne -la première en quatre ans- pour préparer la venue des sportifs du Nord aux Jeux Olympiques d'hiver (9-25 février).

Séoul présente de longue date l’événement comme des "Jeux de la Paix" à même de faire retomber les tensions sur une péninsule où la situation s'est gravement détériorée en 2016 et 2017 du fait de l'accélération des programmes nucléaire et balistique du Nord. Mais désormais, c'est bien à l'intérieur de la Corée du Sud qu'il faut apaiser les choses. Depuis l'annonce surprise de Kim Jong-Un le 1er janvier de l'envoi possible d'une délégation nord-coréenne aux JO, tout est allé très vite. Il a été décidé que le Nord participerait, que les deux frères ennemis défileraient ensemble derrière un drapeau de la Corée unifiée ou encore qu'il y aurait une équipe féminine commune en hockey sur glace.

Spectacle "politique"

L'accord entériné samedi par le Comité international olympique (CIO) prévoit que 12 joueuses du Nord soient ajoutées aux 23 hockeyeuses du Sud. Pour chaque match, 22 joueuses seront choisies dans ce contingent, dont au moins trois Nord-Coréennes. En Corée du Sud, certains dénoncent un spectacle "politique" organisé à la va-vite et déplorent que l'on vole ainsi à certaines sportives du Sud la possibilité de participer aux JO. Selon un récent sondage, 73% des Sud-Coréens ne jugeaient pas nécessaire une équipe commune.

Le sport devrait être exempt de politique, affirmait lundi un éditorial du quotidien conservateur Dong-A. "Le gouvernement sud-coréen est concentré sur l'organisation de Jeux de la Paix et dit oui à tout ce que la Corée du Nord demande", a-t-il accusé.

Les deux Corées avaient déjà défilé ensemble lors des cérémonies d'ouverture des JO-2000 à Sydney, 2004 à Athènes et 2006 à Turin. Et à l'époque l'initiative avait été très bien accueillie au Sud, où tout contact avec le Nord est proscrit. Mais du fait de la menace nucléaire du Nord, le sentiment est aujourd'hui tout autre au Sud.

"Investissement d'avenir"

Bien que largement couverte par les médias, la visite de la délégation nord-coréenne dimanche et lundi a été très fraîchement accueillie par certains internautes, l'un se demandant si les jeux seraient "ceux de Pyeongchang ou ceux de Pyongyang".

"Non seulement le Nord obtient un billet gratuit pour cet événement sur lequel nous avons travaillé dur, mais en plus il affiche cette femme comme une reine en visite qui nous ferait une faveur", dénonçait un autre en référence à la membre la plus éminente de la délégation Hyon Song-Wol, du groupe de pop nord-coréenne entièrement féminin Moranbong. "Nous ne questionnons pas les efforts du président Moon Jae-In pour faire un lien entre les JO et son initiative de paix pour la péninsule coréenne. Mais le gouvernement doit se demander pourquoi le mécontentement populaire est à la hausse", avance de son côté le journal JoongAng. "Aucun Sud-Coréen ne peut croire que le problème nucléaire se réglera simplement parce que le gouvernement aura mis en place une co-organisation des Jeux", poursuit l'éditorial publié lundi.

Dimanche, la présidence a défendu sa politique comme étant nécessaire non seulement pour la paix, mais aussi pour la promotion de Jeux qui peinaient jusqu'alors à susciter un quelconque intérêt. "Nous comprenons que les citoyens qui s'inquiétaient il y a juste un mois de la menace des missiles du Nord soient perplexes face au changement soudain d'atmosphère", a déclaré dans un communiqué le cabinet de M. Moon. "Les Jeux Olympiques de Pyeongchang ne permettront pas seulement une réconciliation, ils offriront un chemin vers une baisse des tensions sur la péninsule et vers la paix", a-t-il poursuivi, ajoutant que la participation du Nord aux JO était "un investissement d'avenir".


 

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