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JO 2016 : Hélène Lefebvre-Elodie Ravera, le duo fraîcheur de l'aviron français

Dans l’ombre des hommes, les filles de l’aviron français peuvent compter sur le duo Hélène Lefebvre-Elodie Ravera en deux de couple pour bien figurer à Rio. Cet équipage jeune peut créer une "belle surprise" aux Jeux, selon leur entraîneur Christine Gossé.
Article rédigé par franceinfo
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Les rameuses françaises Elodie Ravera (au premier plan) et Hélène Lefèbvre (URS FLUEELER / KEYSTONE)

L’aviron français féminin va fêter un triste anniversaire à Rio. Voilà vingt ans, en 1996, il remportait à Atlanta sa seule médaille olympique, le bronze en deux de pointe sans barreur grâce au duo Christine Gossé-Hélène Cortin. Vingt ans plus tard, Christine Gossé, aujourd’hui entraîneur national en charge du secteur féminin, doit se sentir bien seule. Mais elle n’a pas perdu tout espoir de voir un équipage féminin bien figurer aux JO. Dès cet été ? Peut-être. "S’il y a une belle surprise à Rio côté féminin, ça viendra d’elles", assure le coach. Elles ? On parle d’Hélène Lefebvre et Elodie Ravera, le duo qui officie sur le deux de couple et qui va vivre sa première expérience olympique. Cet équipage est né en janvier 2015, huit mois avant les Mondiaux d’Aiguebelette où elles ont décroché leur qualification pour les JO.

"Pas du kayak"

Hélène Lefebvre, 25 ans, francilienne, châtain, Elodie Ravera, 20 ans, niçoise, brune. Voilà pour les présentations. L’une et l’autre ont découvert l’aviron au même âge (13 ans) mais pas par le même moyen. Elodie n’a (presque) pas eu le choix car son père Stéphane Ravera faisait partie de l’équipe de France d’aviron. "J’ai testé tous les sports avant, je ne voulais pas m’y mettre par esprit de contradiction et aussi parce que j’avais peur de monter sur un bateau, explique-t-elle. Il y était tout le temps, je ne le voyais jamais, mais il m’a poussé à en faire et j’ai été embarquée". Hélène, elle, est une fille comme les autres. Sportive et déjà occupée sur les tatamis de judo, elle a été dubitative quand sa professeure d’EPS du collège, ancienne nageuse, est venue lui parler d’aviron.

"Ce n’est pas un sport médiatique, raconte la banlieusarde qui a grandi au Perreux (Val-de-Marne), au départ on y va pour l’ambiance. Puis je me suis pris au jeu, mais si je n’avais pas rencontré la bonne personne…". Aucune des deux ne regrettent aujourd’hui son choix. Hélène se bat même pour que les gens arrêtent de confondre l’aviron avec le kayak, "ça a tendance à nous énerver", sourit-elle. Un combat parmi d’autres puisqu’il a fallu aussi progresser et sortir l’aviron féminin d’une léthargie inquiétante. "J’ai connu des débuts difficiles avec un secteur féminin sinistré, rappelle l’aînée. Ce n’était pas organisé, il n’y avait pas d’objectifs, ni de prise en charge des filles et pas vraiment de projets. Donc les résultats étaient catastrophiques". C’est dans ce contexte moribond que le duo est né.

Gourmandise et déconne

Leur association coulait de source : même gabarit (1m70), même bonne humeur, même façon de ramer, "on était pratiquement destinée à ramer ensemble", éclaire Hélène. Associer les deux meilleures individualités du groupe France était une évidence. La rencontre se déroule lors de piges, ces tests individuels, où les deux voulaient marquer leur territoire. "On voulait chacune être la meilleure, précise Elodie, j’ai terminé deuxième, Hélène première et on nous a associé, voilà comment ça a commencé". Dans la même chambre pour ce test, les rivales apprennent à se connaître. "Il y avait un climat de méfiance, une petite appréhension, se souvient Hélène, mais au stage d’après on a débuté le duo et ça a tout de suite collé".

Car l’aviron n’est pas leur seul point commun. "Elles se sont trouvées sur le plan de la déconne, elles sont pleines d’entrain", analyse Chritine. "On est deux petites rigolotes, s’amuse Hélène, très joueuses, je n’irai pas jusqu’à dire que c’est nous qui mettons l’ambiance, mais…". Pas le dernières pour rigoler ou chambrer, elles ne sont jamais loin aussi quand il s’agit de faire de "petites entorses" au régime du sportif de haut niveau. "Hélène adore les smarties, elle en mange après chaque entraînement, rigole Elodie. C’est notre petit plaisir, même si on sait que le haut niveau est très exigeant". Ces "deux gourmandes", dixit leur entraîneur, ne se prennent pas la tête et ont trouvé un "bon équilibre". "Elles sont toutes les leaders dans leur style : Elodie, c’est la chef de nage, qui sent bien le bateau et Hélène, c’est la meilleur en skiff, elles se complètent bien", explique Christine.

Le déclic de Poznan

Encore fallait-il que cette bonne ambiance entre elles se traduise par des résultats. Et là aussi, ça n’a pas tardé à prendre. "Il y a eu un déclic lorsqu’elles sont rentrées en finale en Coupe du monde à Lucerne, en Suisse, l’an dernier", note Christine. Une performance qu’elles ont rééditée au mois de mai dernier. "Là, je leur ai dit qu’elle avaient des chances de médailles", avoue Christine. Interloquées au départ, elles ont pourtant confirmé la prophétie. Pas à Lucerne, mais à Poznan (Pologne), trois semaines plus tard, où elles montent sur la troisième marche du podium, leur première médaille internationale. "Quand elles sont entrées à nouveau en finale, c’était acquis qu’elles pouvaient être médaillées, déclare Christine. On fonctionne par étapes. Je n’allais pas leur faire miroiter un titre olympique si elles ne faisaient rien avant". A Rio, Hélène et Elodie ambitionnent d’être en finale. "Si on y est, on n’aura plus peur de rien", prévient la Parisienne. "A Poznan, en finale, il n’y avait que des bateaux médaillés en grand championnat, elles étaient les seules à ne rien avoir et elles n’ont toujours rien. Elles ont envie de faire un truc. C’est un super challenge", encourage leur entraîneur.

Hélène et Elodie vont vivre leur premier JO dans la peau d’outsiders qui n’ont rien à perdre. Elles s’entraînent 20 à 25 heures par semaine pour ça, éloignées par des centaines de kilomètres puisqu’Elodie s’entraîne à Nantes, Hélène à l’INSEP. Durant ces séparations, le téléphone chauffe. Les deux filles s’appellent, s’envoient des messages, se confient, se réconfortent comme au cœur de l’hiver où Elodie était blessée. Puis se retrouvent lors des stages ou lors de journées comme ce J-100 à Paris le 27 avril dernier. Un évènement qui a permis au duo de prendre la mesure de ce qui les attend à Rio. "C’est au Palais de Chaillot que les filles se sont rendues compte qu’elles allaient faire les JO, assure Christine. Elles ont croisé Marie-Josée Pérec, Teddy Riner… elles font partie de la cour des athlètes qui font les Jeux. Elles désirent intégrer la cour des médaillées olympiques désormais. J’espère qu’elles vont y arriver vite, mais c’est tout à fait possible". Et comme ça, Christine Gossé se sentira moins seule.

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