Elise Pellegrin, la Maltaise de France
"Quand j’étais petite, je rêvais de faire les Jeux Olympiques, d’avoir un chalet en montagne et une villa à la mer. La première partie du rêve est remplie. La plus dure en plus". Eclats de rire. Elise Pellegrin est souriante. Ce mardi, au départ du slalom géant, elle va vivre ses premiers JO sous le drapeau maltais, elle qui est née à Montrichard (Loir-et-Cher) le 7 mai 1991. L’histoire est originale. Elle débute pourtant comme tant d’autres. Pour éviter les crises d’asthme du frère, la famille déménage dans les Vosges, à Ventron. C’est là, sur les pistes du massif qu’elle découvre le ski. Elle a 8 ans et germe dans son esprit l’idée de faire carrière.
A 15 ans, elle quitte les Vosges pour les Alpes. Direction La Plagne. "Pour faire du haut-niveau", déclare-t-elle. Dans la station alpine, elle partage son temps entre le ski et les cours par correspondance. Mais le rêve va se briser. "C’était dur de mener les deux parallèlement. Je n’avais plus le niveau en cours et c’était pareil sur les skis", déplore-t-elle. Echec et retour donc à Ventron. Mais la page ski ne va pas tout à fait se tourner. "J’ai passé mon bac et je me suis remis à la compétition". Et le rêve de repartir par une voie qu’elle n’attendait pas.
Septième génération
C’est son père qui va trouver une solution. "Il m’a parlé de mon arrière-grand-père qui était maltais. Je pouvais avoir la nationalité". Si elle hésite au départ, une fois le bac ES en poche, elle saute sur l’occasion. La raison est simple : "c’est un choix stratégique", a-t-elle avancé sur le site 100%Vosges avant les Jeux. Intégrer l’équipe de France était devenu trop difficile, d’autant plus qu’elle était sortie du cursus classique. Malte est apparue comme la solution. Plus que la Belgique, qui l’a également sollicitée. Mais le processus n’a pas été de tout repos. "Cela a été compliquée, il a fallu remonter sur six générations et même sept puisque le CIO voulait que j’aille vivre un an là-bas. Mais avec ces sept générations, je n’ai pas eu à le faire. Si c’était le cas, ça aurait été difficile de s’entraîner", raconte la skieuse de 22 ans. Depuis, elle "apprend à connaître (ses) racines et (ses) origines".
"On en parlait pas beaucoup auparavant dans la famille, mais je suis allé à Malté l’année dernière, on a retrouvé la maison familiale sur l’île de Gozo. On a aussi rencontré une dame qui avait connu ma famille". Cela fait quatre ans que la skieuse a obtenu la nationalité, mais ce n’est qu’à Sotchi, qu’elle en a réellement pris conscience. Notamment lorsqu’elle a porté le drapeau lors de la cérémonie d’ouverture. "C’était le plus beau moment", s’exclame-t-elle. "Incroyable", "magique". Les superlatifs reviennent souvent dans la conversation. "Je sais que j’ai plus de chances que d’autres. C’est dur de changer de nationalité, surtout auprès du CIO. Mais je ne suis pas maltaise pour rien. Je ne pense pas que ce soit tricher", argumente-t-elle.
Et sur les skis ?
Faire du ski pour Malte, le concept est original. Car en Méditerranée, les montagnes et les chutes de neige sont rares. Pour se préparer, Elise est donc restée dans les Vosges. Elle pousse parfois jusqu’en Suisse ou en Autriche quand la neige vient à manquer. Mais jusqu’à Malte rarement. Ainsi, elle n’a rencontré les responsables de la délégation qu’une fois avoir mis le pied en Russie : Lucienne Attard, la chef de mission, et Julian Pace Bonello, le président du Comité National Olympique de Malte. Le petit groupe apprend à se connaître, tranquillement et "facilement", ajoute le président du CNO.
A Sotchi, l’attente de la Fédération n’est pas démesurée. "Qu’elle fasse de son mieux", déclare simplement Julian. Mieux qu’aux Mondiaux à Schladming l’année dernière où elle avait terminé 69e du slalom et 67e du slalom géant ? "J’aimerai bien remporter la course des petits pays", précise la skieuse. Décontractée et souriante, elle aborde sa course sans pression, même si en tant qu’unique athlète de la délégation maltaise, elle a "une grosse responsabilité". Outre la villa et le chalet dont elle rêve encore, elle désire aussi voir les rangs de sa délégation grossir. Pour que dans quatre ans à Pyeongchang – "si on y va" -, elle ne soit plus toute seule.
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