Pékin 2022 : “On a un peu peur de passer à la trappe” : les sportifs d’hiver craignent de subir l’ombre de Paris 2024
À 1 000 jours du début des Jeux olympiques de Paris, tous les regards se portent sur cet événement historique à domicile, quitte à oublier les JO d’hiver.
Une olympiade peut-elle en cacher une autre ? A l’approche du début des Jeux olympiques et paralympiques de Pékin (du 4 au 20 février 2022), l’événement ne suscite guère l’intérêt des foules dans l’Hexagone. Alors même que les JO d’hiver viennent de célébrer leur J-100 mercredi 27 octobre, sans tambour ni trompette et toujours dans l’incertitude sanitaire, le J-1000 de Paris 2024, samedi 30 octobre, accapare en revanche lui, toute la lumière.
Claude Onesta lui-même avait fait ce constat lors de la journée de présentation de l’équipe de France, le 4 octobre, à Romilly-sur-Seine. “Je voudrais d'abord commencer par présenter des excuses. Hier soir (dimanche 3 octobre) à 23h, j'ai reçu un petit message agacé d'un ancien champion de ski, qui m'a dit : ‘On commence à être un peu fatigué d'entendre parler de Tokyo, de Paris et d'avoir l'impression qu'on [les sportifs d’hiver] ne pèse pas beaucoup au milieu’. Je suis tout à fait conscient que ça peut être pénible”, avait tenu à évoquer le manager de la haute performance à l’Agence nationale du sport (à la 53e minute de la vidéo en lien).
“C’est frustrant”
Si tout le monde s’accorde à dire que le discours est davantage tourné vers Paris que vers Pékin, Claude Onesta a tenu à rassurer les athlètes français qui s'envoleront pour la Chine. “Cette pression de Paris 2024 ne doit pas effacer le travail qu'ils réalisent tous les jours et l'ambition qui est la leur. Sentez bien que le pays va, peut-être, arriver un peu tard à votre soutien mais il sera là. Et on sera tous là. Nous sommes mobilisés et on essaie de mettre en œuvre tout ce que l'on peut pour vous être utiles.”
Paris ferait donc de l’ombre à Pékin ? C’est en tout cas le ressenti de nombreux athlètes et dirigeants tricolores. “Parler beaucoup de Paris, c'est comme si on oubliait les Jeux d'hiver. Pour nous, athlètes de sports d’hiver, c'est forcément frustrant. Pourquoi est-ce qu’on passerait aux oubliettes sous prétexte que la France organise les prochains Jeux, alors que nous sommes tout aussi important ? C’est frustrant et ce n'est pas valoriser notre travail de tous les jours”, regrette la championne olympique en titre en ski de bosses, Perrine Laffont.
“Nous sommes devenus des sports d'été, on ne savait pas !”
Une frustration partagée par Gabriella Papadakis, quadruple championne du monde et vice-championne olympique en danse sur glace avec son partenaire Guillaume Cizeron. “Quand on est arrivé à Romilly-sur-Seine, on a fait des blagues entre athlètes en disant : ‘Mince, nous sommes devenus des sports d'été, on ne savait pas !’ Nous étions rassemblés pour faire la promotion des Jeux d'hiver, et pourtant, le sujet principal n’était pas Pékin 2022 mais Paris 2024. On a été surpris mais c’était drôle aussi”, sourit la danseuse sur glace et grand espoir français pour s'offrir le titre olympique à Pékin.
"C’est un peu frustrant, confie-t-elle. On sait que les Jeux d'hiver ont moins d'envergure que les Jeux d'été, en tout cas en France. Mais le fait d'accueillir à Paris les JO en 2024 fait qu’on en parle beaucoup plus. On a donc un peu peur de passer à la trappe, surtout que la page de Tokyo vient de se refermer."
Le report de Tokyo, un calendrier désavantageux
Le report d’un an des Jeux de Tokyo, qui se sont terminés le 8 août, soit seulement six mois avant les Jeux d’hiver, n’a en effet pas aidé à mettre un coup de projecteur sur Pékin. Au contraire. "Le fait que les Jeux de Tokyo aient été reportés, pour nous ça n’a pas été positif. En principe quand les Jeux d'été se terminent, les partenaires ont un an pour se relancer sur les Jeux d'hiver, un temps qu’ils n’ont pas eu cette fois-ci", regrette encore Perrine Laffont.
Pourtant ce rapprochement du calendrier aurait pu être bénéfique aux Jeux d’hiver, afin de surfer sur la vague de Tokyo. “Il faut arriver à capitaliser sur ce regard qui a été porté par les Français sur le sport lors des Jeux de Tokyo, et de l'entretenir jusqu'aux Jeux d'hiver”, souligne Marie-Amélie le Fur, présidente du Comité paralympique et sportif français et médaillée d’argent en saut en longueur à Tokyo. “Notre rôle est de se concentrer sur les Jeux de Pékin, de permettre aux athlètes de performer et de leur donner la capacité de rayonner. C'est important afin que ces athlètes soient visibles, soutenus, et encouragés, parce qu'ils ont réalisé des performances extraordinaires, ils nous ont transmis des émotions et nous ont fait rêver. Le grand public a besoin de les connaître encore plus”, poursuit-elle.
Une exposition médiatique essentielle pour les athlètes, comme le confirme Gabriella Papadakis. "Pour un athlète, les Jeux sont des moments uniques dans une vie. C'est l'occasion de se faire connaître auprès du public et de préparer pour certains un après carrière. On espère être autant visible que les athlètes de Jeux d'été afin d’avoir les mêmes opportunités.”
L’engouement d’une nation après un siècle d’attente
Si Paris accapare lumières et discours, c’est notamment parce que la France attendait depuis près d’un siècle d’accueillir les Jeux olympiques et paralympiques d’été. Les derniers organisés en France remontent en effet à 1924. Et pour la première fois de son histoire, Paris accueillera aussi les Jeux paralympiques.
Autant d’éléments qui rendent la symbolique encore plus forte. "C'est tellement exceptionnel d'accueillir des Jeux olympiques en France. On dit que cela fait 100 ans que nous n’avons pas accueilli les Jeux mais ce n’est pas vrai. Il ne faut pas oublier les Jeux d’Albertville en 1992”, tient à rappeler Nathalie Péchalat, présidente de la Fédération française des sports de glace et cheffe de mission de l’équipe de France pour les Jeux olympiques de Pékin 2022. “Et c'est tellement énorme que le côté négatif de cela est que les Jeux d'hiver tombent un peu dans l'ombre”, tranche-t-elle.
Pourtant, Marie-Amélie le Fur, présidente du Comité paralympique et sportif français veut croire à l’héritage de Paris 2024 pour l’ensemble des athlètes, d’été comme d’hiver. “Les sportifs d'hiver font partie intégrante de l'héritage que nous souhaitons laisser après les Jeux de Paris.” Une vision que partage Nathalie Péchalat. “Une fois que Pékin sera passé, attention à bien garder cet esprit bleu pour Paris et pour Cortina. Car il ne faut pas oublier qu'à Paris 2024, il y aura des sportifs d’hiver en préparation de Milan Cortina en 2026. On parle toujours d’hommes-femmes, olympique-paralympique mais il y a aussi été-hiver.”
À regarder
-
"C'est un honneur incroyable..." On a rencontré Maxence, pro du parkour et l'un des personnages mystères de la cérémonie d'ouverture de Paris 2024
-
La cantatrice Axelle Saint-Cirel entonne la Marseillaise pour clore la parade des athlètes
-
Les joueurs de l'équipe de rugby à 7 dansent leur choré au pied de l'Arc de Triomphe
-
Teddy Riner est ovationné par la foule lors de la Parade des Champions
-
La "Parade des champions" est officiellement lancée depuis les Champs-Élysées
-
Paris 2024 : revivez les 4 cérémonies en 4 minutes
-
Qui est GЯEG qui a performé à la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques ?
-
Paris 2024 : Revivez les plus beaux moments de la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
Jean-Michel Jarre enflamme le Stade de France
-
Jeux paralympiques : les exploits et des sourires en or pour les athlètes français
-
Il est temps de dire au revoir à la flamme
-
Huit danseurs de breaking valides et handicapés font le show
-
Les porte-drapeaux français pour la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
"La Marseillaise" interprétée par le trompettiste André Feydy
-
Santa ouvre la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
Paris 2024 : historique, l'équipe de France de cécifoot championne paralympique
-
Prothèses, fauteuils roulants : comment s'équipent les athlètes pendant les Jeux paralympiques ?
-
Ces Jeunes archers du Nord découvrent le para tir à l'arc et ses champions
-
Paris 2024 : "Durant ces Jeux, on a montré que l'on pouvait faire rimer les notions de handicap et de performance..." Le bilan tout sourire de Marie-Amélie Le Fur, patronne du comité paralympique
-
Paris 2024 : il réconforte les athlètes, sensibilise les officiels au handicap... Marc ne fait pas que conduire en tant que chauffeur volontaire sur les Jeux
-
À 23 ans, il va mixer pour la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques !
-
La para-escalade fera son entrée aux Jeux de 2028 : une innovation française permet aux personnes en fauteuil de grimper comme tout le monde
-
Paris 2024 : Aurélie Aubert, chouchou du public et nouvelle star du sport para
-
Qui est Frédéric Villeroux, légende du cécifoot ?
-
Immersion avec des collégiens invités aux Jeux paralympiques
-
Paris 2024 : l'équipe de France de cécifoot est en finale paralympique
-
Paris 2024 : nouveau doublé français en para cyclisme
-
Qui est Axel Bourlon, champion de para haltérophilie ?
-
Paris 2024 : qui est Gabriel Dos Santos Araujo, star de la para natation ?
-
Paris 2024 : des tablettes et des casques VR pour les personnes malvoyantes
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.