: Reportage JO de Paris 2024 : à Amboise, une parenthèse olympique "qui fait un bien fou" aux habitants de la résidence sénior
Dans le hall d'entrée, difficile de rater les ballons colorés formant des anneaux olympiques. Ou encore les affiches, le long des couloirs et jusque dans l'ascenseur, qui rappellent aux étourdis que depuis le 26 juillet, les épreuves des Jeux olympiques de Paris 2024 sont diffusées dans la salle commune. Cet événement, la résidence Domitys - Parc de Vinci d'Amboise (Indre-et-Loire) compte bien le vivre à 100%. Surtout qu'un porteur de flamme figure parmi les 120 séniors qui y vivent.
Du haut de ses 99 ans, Daniel Rebiffé a eu l'honneur de tenir la torche olympique dans sa ville natale d'Etampes (Essonne). C'était le 22 août, à 200 km de là. "Depuis, il enchaîne les interviews et ne lâche plus le téléphone", sourit Elodie Janière, directrice de l'établissement. Quand il nous ouvre la porte de son appartement, le retraité s'affole : il n'a pas encore enfilé sa tenue de relayeur olympique. Il s'excuse, disparaît dans sa chambre, et revient au salon avec son habit et quelques anecdotes en prime.
"Ma plus grande peur, c'était de ne pas être en forme ou de souffrir de coliques", confie-t-il. Durant les trois semaines précédant sa performance, il s'est ausculté chaque matin et a tenté de marcher le plus possible pour s'entraîner. "Sans canne, ni déambulateur", rappelle-t-il avec fierté. Deux jours avant son relais, il s'est mis à la diète en privilégiant "les aliments faciles". Une préparation qui a payé le jour J : Daniel a réussi à parcourir une plus grande distance que les 200 mètres initialement prévus.
"Bien sûr que j'ai pleuré, confie le résident. Tout le monde criait mon nom, il y avait des jeunes partout, ça m'a pris aux tripes." D'autant que l'ancien athlète peut se vanter d'avoir brandi deux flambeaux. "J'avais déjà porté la flamme en 1948, avant les Jeux de Londres", raconte-t-il. A l'époque, son engagement sportif au sein de la garde républicaine lui avait valu d'embarquer "avec 25 gaillards dans deux bus" pour transporter le feu olympique sur 600 km à travers la France, depuis la frontière suisse jusqu'au Luxembourg.
Soixante-quinze ans plus tard, il possède encore la torche, qu'il pose sur la table basse pour attraper la télécommande. "Ca ne vous dérange pas si je regarde un peu le VTT ?", s'excuse-t-il, les yeux déjà rivés sur la télévision. A l'écran, le cycliste français Victor Koretzky vient de se faire dépasser par le Britannique Tom Pidcock. "Mais c'est pas possible !, s'exclame Daniel. Il l'a poussé ou quoi ?" Le tricolore bataille, mais termine la course deuxième. Daniel décide d'aller regarder la remise des médailles au rez-de-chaussée, dans la salle télé de la résidence.
L'impression de "partager les rêves olympiques"
Confortablement installés dans les fauteuils jaunes et bleus du salon, Catherine, 87 ans, et Jean-Lou, 75 ans, sont à l'affût des médailles. "On a une belle après-midi devant nous", se réjouit Catherine, enseignante à la retraite. Sur son podium, elle place les sports d'épée tout en haut. "J'en ai fait plusieurs années", se rappelle-t-elle. Cela tombe bien, c'est au tour de la Française Sara Balzer de disputer la demi-finale de sabre – qu'elle finit par remporter dans une effusion de joie. "Oh là là, c'est magnifique !", réagit Catherine entourée de ses amies. Derrière elles, les joueuses de Scrabble froncent les sourcils dans ce brouhaha olympique.
"Les JO, c'est le sujet de conversation incontournable dans les couloirs", souligne Jean-Lou, qui dit avoir "adoré" la cérémonie d'ouverture du 26 juillet. Chaque jour, ce retraité du secteur médico-social "passe une tête" pour voir si des épreuves l'intéressent, et s'il y a du monde pour les regarder. "Quand j'accroche, je peux rester un bon moment", explique celui qui a été subjugué par les décors pour l'équitation à Versailles, ou encore "la puissance tranquille" du nageur Léon Marchand.
Si elle avait pu assister à une épreuve, Catherine aurait pris un billet pour le saut en hauteur femmes, discipline "d'une élégance totale". Jean-Lou, lui, se serait bien vu dans les gradins pendant un sprint en athlétisme. Ils sont interrompus par la victoire de la judokate française Sarah-Léonie Cysique, qui vient de remporter le bronze. "Bravo, elle s'est bien battue !", s'accorde à dire le petit groupe.
Autour de la télévision, des médailles géantes ont été accrochées au mur, "une production de l'atelier créatif de la résidence", explique Catherine. De quoi accompagner les mordus de sport pour les dix prochains jours. "Regarder ces athlètes qui se donnent à fond, qui se sont préparés pendant quatre ans, ça motive, ça fait partie de ces choses qui font un bien fou, confie la retraitée. On partage un morceau de leurs rêves olympiques."
"A notre âge, on veut surtout éviter les chutes"
Au-delà de la joie ressentie, "le sport ne se vit pas qu'à la télévision" pour les résidents, insiste Jean-Lou. Lui pédale régulièrement dans le petit gymnase de l'établissement. De son côté, Catherine se met à l'eau dès qu'elle le peut, "toujours en douceur". Tous deux sont admiratifs des prouesses de Colette, leur voisine de 101 ans, "qui fait cinq tours du parc tous les jours, vers 15h30". Ou encore de cet autre retraité, dont ils ne se souviennent plus bien du prénom, mais qui est "presque tout le temps en train de trottiner ou de nager".
"J'aimerais refaire du volley-ball, mais ce n'est plus possible", regrette Jean-Lou, après avoir tapé le ballon au-dessus du filet pendant près de cinquante ans. Les sports choisis par les séniors de la résidence Le Parc de Vinci sont plus individuels, et moins exigeants pour le corps. "A notre âge, on veut surtout éviter les chutes, répète Catherine. C'est la première cause de départ à l'hôpital ou à l'Ehpad ici, bien avant Alzheimer..." A côté d'elle, Guy, 89 ans, ne peut qu'acquiescer. Il en est à sa quatorzième chute en deux ans. "Ce qui est terrible, c'est qu'on se voit tomber, mais on ne peut rien faire", déplore ce retraité de l'automobile, passionné de handball et de rugby. La dernière fois, il s'en est tiré avec une blessure à l'arcade gauche.
Ce matin-là, à la résidence, un atelier de prévention a justement eu lieu. "C'est très important, on ne voudrait pas manquer les JO", plaisante Guy, alors que les chutes sont responsables de plus de 10 000 décès de personnes âgées en France chaque année. Ancien amateur de cross-country, il se souvient avoir aperçu la légende de l'athlétisme Alain Mimoun lors d'une course à Paris dans les années 1950. "Même si je ne peux plus courir, j'adore le sport et surtout voir émerger les nouveaux champions", claironne-t-il.
En cette période olympique, chacun y va de son projet pour garder une bonne forme. Alors que Jean-Lou voudrait reprendre un sport collectif, Guy souligne que son petit club informel de billard "est passé de deux à six membres". Catherine s'investit pour sa part dans le yoga sur chaise. "N'allez pas croire que c'est reposant, on sent qu'on a travaillé après la séance !", défend-elle. Quant à Daniel, il poursuit plusieurs objectifs en même temps : battre le record de longévité de sa famille, "celui de mon père, décédé à 102 ans", mettre la main sur le très rare timbre d'un franc vermillon pour "enfin compléter" sa collection... Et peut-être faire une apparition aux prochains Jeux olympiques d'été, prévus à Los Angeles en 2028 : "Si on me paie les billets d'avion, j'y vais !", assure le retraité encore très actif. Après tout, il n'aura "que" 103 ans.
À regarder
-
"C'est un honneur incroyable..." On a rencontré Maxence, pro du parkour et l'un des personnages mystères de la cérémonie d'ouverture de Paris 2024
-
La cantatrice Axelle Saint-Cirel entonne la Marseillaise pour clore la parade des athlètes
-
Les joueurs de l'équipe de rugby à 7 dansent leur choré au pied de l'Arc de Triomphe
-
Teddy Riner est ovationné par la foule lors de la Parade des Champions
-
La "Parade des champions" est officiellement lancée depuis les Champs-Élysées
-
Paris 2024 : revivez les 4 cérémonies en 4 minutes
-
Qui est GЯEG qui a performé à la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques ?
-
Paris 2024 : Revivez les plus beaux moments de la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
Jean-Michel Jarre enflamme le Stade de France
-
Jeux paralympiques : les exploits et des sourires en or pour les athlètes français
-
Il est temps de dire au revoir à la flamme
-
Huit danseurs de breaking valides et handicapés font le show
-
Les porte-drapeaux français pour la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
"La Marseillaise" interprétée par le trompettiste André Feydy
-
Santa ouvre la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
Paris 2024 : historique, l'équipe de France de cécifoot championne paralympique
-
Prothèses, fauteuils roulants : comment s'équipent les athlètes pendant les Jeux paralympiques ?
-
Ces Jeunes archers du Nord découvrent le para tir à l'arc et ses champions
-
Paris 2024 : "Durant ces Jeux, on a montré que l'on pouvait faire rimer les notions de handicap et de performance..." Le bilan tout sourire de Marie-Amélie Le Fur, patronne du comité paralympique
-
Paris 2024 : il réconforte les athlètes, sensibilise les officiels au handicap... Marc ne fait pas que conduire en tant que chauffeur volontaire sur les Jeux
-
À 23 ans, il va mixer pour la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques !
-
La para-escalade fera son entrée aux Jeux de 2028 : une innovation française permet aux personnes en fauteuil de grimper comme tout le monde
-
Paris 2024 : Aurélie Aubert, chouchou du public et nouvelle star du sport para
-
Qui est Frédéric Villeroux, légende du cécifoot ?
-
Immersion avec des collégiens invités aux Jeux paralympiques
-
Paris 2024 : l'équipe de France de cécifoot est en finale paralympique
-
Paris 2024 : nouveau doublé français en para cyclisme
-
Qui est Axel Bourlon, champion de para haltérophilie ?
-
Paris 2024 : qui est Gabriel Dos Santos Araujo, star de la para natation ?
-
Paris 2024 : des tablettes et des casques VR pour les personnes malvoyantes
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.