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Alors que les JO d'hiver de Pékin commencent, l'Espagne et le Japon font campagne pour ceux de 2030

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qu'il se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction Barcelone et Sapporo, deux villes candidates pour organiser les Jeux d'hiver dans 8 ans.

Article rédigé par franceinfo - Henry de Laguérie, Karyn Nishimura
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
La station de ski de La Molina, en Catalogne (Espagne), le 15 décembre 2020. (NICOLAS PARENT / MAXPPP)

Les jeux Olympiques d’hiver 2022 s’ouvrent à Pékin, vendredi 4 février et on sait déjà que les suivants, en 2026, auront lieu en Italie. Pour les JO de 2030, en revanche, cinq villes sont toujours candidates. Parmi elles, figurent notamment Sapporo au Japon et plus surprenant, Barcelone, en Espagne, ville hôte des jeux d’été en 1992. Le Comité olympique rendra sa décision en 2023.

Barcelone, une candidature qui divise les catalans

La Catalogne se dit en effet prête à organiser ces jeux sous le nom "Barcelone Pyrénées". Quand on pense à Barcelone, ce sont plutôt des images de soleil et de plage qui nous viennent à l’esprit. Mais on l’oublie : les stations de ski ne sont qu’à 1h30 de route. Il y en a une dizaine dans la région. La Molina par exemple a accueilli la coupe du monde de ski il y a 10 ans. Cette candidature catalane a plusieurs atouts : Barcelone a de l’expérience. Les jeux d’été de 1992 ont été une immense réussite. Des équipements existent déjà. La capitale catalane pourrait ainsi accueillir les sports de glace et les Pyrénées, les sports de neige. 

>>JO 2022 : les Jeux de Pékin marqueront-ils un tournant dans le choix des villes hôtes ?

Encore faut-il qu’il y ait de la neige. Il fait de plus en plus chaud dans les Pyrénées mais ce n’est pas un problème pour Joan Canadell, député catalan qui soutient cette candidature : "Il y a 30 ans déjà, on nous disait que la neige c’était terminé, qu’il faudrait fermer les stations. Finalement, l’innovation nous a apporté les canons à neige."

"Jusqu’à présent, il n’y a pas eu une année où l’on a été obligé de fermer les stations, parce qu’il y a toujours un moment où il fait assez froid pour produire de la neige artificielle."

Joan Canadell, député catalan

à franceinfo

La technologie n'est pas nouvelle et pourtant l'utilisation de la neige artificielle à Pékin suscite la polémique. Une poudreuse factice qui ne fait pas non plus rêver les Catalans. Une partie de la population s’inquiète de l’impact sur l’environnement que pourraient avoir ces jeux d'hiver de Barcelone. "En pleine crise climatique ce n’est pas viable", a dénoncé Kilian Jornet, la légende mondiale de l’ultra-trail. 

Dimanche 30 janvier, des centaines de manifestants anti-jeux ont bloqué la route qui relie les stations de ski à Barcelone. Parmi eux, Ferran Canudas. Il vit dans les Pyrénées et ne veut pas entendre parler de ce projet : "Pour nous, c’est une irresponsabilité de promouvoir des Jeux olympiques d’hiver, quand on connaît l’urgence climatique du moment. Aujourd’hui justement il y a très peu de neige dans les montagnes pyrénéennes. On est en pleine sécheresse. Les images que l’on voit de Pékin sans neige naturelle pourraient tout à fait se reproduire ici dans nos montagnes à l’occasion de ces hypothétiques jeux olympiques de 2030."

Face à cette opposition, la candidature de Barcelone ira-t-elle jusqu’au bout ? Le gouvernement catalan hésite. Les habitants des Pyrénées devraient pouvoir s’exprimer sur le sujet à travers un référendum en mai 2022. Et puis, il y a des problèmes politiques. La candidature doit passer par le Comité olympique espagnol. Or Madrid aimerait que les Jeux se fassent en partenariat avec l’Aragon, la région voisine. La Catalogne s'y oppose.

À Sapporo, le Japon veut retrouver un prestige international

Le Japon, qui a accueilli les Jeux Olympiques d’été à Tokyo en 2021, est de nouveau candidat à l’organisation des JO d’hiver dans 8 ans, à Sapporo, dans le nord du pays. Malgré le coût exorbitant de plus de 11 milliards d’euros des Jeux de Tokyo l’an dernier et les innombrables péripéties qui les ont accompagnés, les dirigeants japonais sont absolument persuadés que c’était une grande réussite. La population est plus partagée, mais sur le plan sportif, les performances ont été au rendez-vous.

Il n’y a donc, pour les autorités, aucune raison de ne pas continuer à parier sur ce type d’événement pour faire briller le Japon sur la scène internationale. C’est le sens de la candidature de la ville de Sapporo sur l’île septentrionale de Hokkaido selon Seiko Hashimoto, la présidente du Comité d’organisation des JO de Tokyo, prête à rempiler pour ceux de Sapporo si la ville est choisie : "Le point important est de savoir comment les Jeux Olympiques de 2030 peuvent montrer au monde la splendeur du Japon, de la région de Hokkaido et de la ville de Sapporo".  Il y a, dans les milieux politiques japonais (surtout par la droite conservatrice, au pouvoir de façon quasi continue depuis les années 50), et bien sûr dans le monde sportif, un amour immodéré pour les Jeux olympiques. 

Les autorités japonaises ont aussi des arrières pensées géostratégiques. D’abord, les dirigeants du Japon ont la nostalgie de la séquence datant du siècle dernier : 1964 - JO de Tokyo, 1970 - exposition universelle d’Osaka et 1972 - JO de Sapporo. Une séquence qui correspond à la période économique la plus faste du Japon - celle dite de la haute croissance, les 30 glorieuses japonaises - avant les chocs pétroliers, la bulle spéculative et son éclatement suivi d’une longue période plus morose dont le pays n’est pas sorti. 

Avec un brin de méthode Coué, les sexagénaires à la tête du pays voudraient donc rejouer ce triptyque : 2021 - JO de Tokyo (c’est fait), 2025 - exposition universelle d’Osaka (c’est décidé) et 2030 - JO à Sapporo (pourquoi pas). Enfin, les Jeux de Pékin sont l’occasion de montrer que les athlètes japonais peuvent briller afin de justifier ainsi auprès du public nippon, réticent à la candidature de Sapporo, qu’elle est nécessaire. Il y a aussi une fierté nationale à vouloir montrer que le Japon reste une grande puissance malgré la place croissante occupée sur tous les plans par la Chine.

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