Interview avec Mylène Farmer
L'heure de retrouver notre invitée. On croit qu'un artiste qui n'occupe pas l'espace médiatique prend un risque. Elle a fait le choix de la discrétion. Hier soir, après 4 ans d'absence, elle était sur scène. Extraits musicaux Mylène Farmer. "Timeless".
Laurent Delahousse : Mylène Farmer a entamé, hier soir, "Timeless", sa série de concerts à Bercy avant sa tournée. 450.000 spectateurs attendus d'ici décembre. Bonsoir Mylène Farmer. Merci d'être avec nous. Comment se sont passées les retrouvailles hier soir.
Mylène Farmer : Très émouvant.
Laurent Delahousse : 4 ans, c'est long pour eux, pour vous.
Mylène Farmer : pour eux probablement mais aussi pour moi.
Laurent Delahousse : Il y a ce paradoxe, le silence et l'incandescence sur scène. Je vous ai sentie très libre hier.
Mylène Farmer : C'est le moment où j'ai un vrai sentiment de liberté, pas d'entraves ni de tabous. Rien. La scène et le lit sont toujours vos deux endroits préférés.
Mylène Farmer : Oui. La scène il y a plus de personnes, moins dans le lit. Les deux sont une manière d'être à nu, et c'est aussi l'amour.
Laurent Delahousse : De l'abandon.
Mylène Farmer : Oui, une forme.
Laurent Delahousse : Il y a toujours des surprises, des moments forts. Il y a des robots, différents théâtres, différentes scènes. Ça a demandé combien de temps.
Mylène Farmer : Mon entraînement physique, c'est 6 mois. Et ça fait un an qu'on travaille sur ce spectacle avec Laurent Boutonnat. Il y a tellement de métiers autour, les lumières, les chorégraphies, etc. Et le diable est dans le détail.
Mylène Farmer: Oui, on doit travailler, ressasser pour trouver une liberté. Il n'y a rien de diabolique en vous.
Mylène Farmer: Non, je ne le pense pas.
Laurent Delahousse : On revient en images sur votre histoire. Reportage et témoignages. On se retrouve après.
Quand Mylène Farmer entre en scène hier soir, ils sont 15.000.
Pour ces 15.000 fans amoureux, c'est quasiment une apparition.
C'est comme quand vous avez un coup de foudre, vous ne pouvez pas expliquer pourquoi.
On est une génération désenchantée et sa part de mystère, sa beauté.
C'est le jeu du chat et de la souris, ça marche en amour, ça marche aussi pour la musique et les fans.
Il y a 1 an, les 10 Bercy ont été vendus en quelques heures. Soit 156.000 billets vendus. Le public de Mylène Farmer est fidèle.
Il y a des centaines de milliers de gens qui ont grandi, qui ont appris la vie, qui sont aidés par les chansons de Mylène Farmer.
Sa carrière a débuté en 1984.
Je je suis libertine.
Puis on dit d'elle que c'est une provocatrice très secrète. Thierry Suc est son manager depuis 25 ans, il sait peut-être s'il y a un mystère.
C'est une femme secrète, c'est évident. Mais entre être secret et mystérieux, il y a une grande différence.
Habillée par Jean-Paul Gaultier, c'est par 2 heures d'un show psychédélique, baroque et futuriste que Mylène Farmer a donné hier le coup d'envoi de sa tournée.
Mylène Farmer : C'est une fidélité réciproque. La mienne aussi.
Laurent Delahousse : Vous avez entretenu cette fidélité, sans jamais trahir vos fans.
Mylène Farmer : Trahison, non. Je ne sais pas si on "entretient" une fidélité.
Laurent Delahousse : L'absence de promotion dans votre univers, c'est presque hors du temps. C'est un choix que vous avez fait. Votre producteur, votre maison de disque n'ont jamais été angoissés de ne pas trop apparaître.
Mylène Farmer : Non parce que c'est une nature profonde, ce n'est pas un exercice que je travaille. Il y a un respect de la part de ma maison de disque et de mon entourage. Quant à cette discrétion, aujourd'hui, les temps sont à la parole trop facile. Il n'y a plus la place pour la réflexion.
Laurent Delahousse : Ce choix de la discrétion, ça n'a jamais été une prison pour vous.
Mylène Farmer : C'est ma nature profonde. Cela suscite beaucoup de commentaires.
Laurent Delahousse : Ce silence, ça alimente les fantasmes. Certaines choses racontées vous ont blessées.
Mylène Farmer : Je suis faite de chair et de sang, forcement blessée mais habituée aussi.
Laurent Delahousse : Certaines vous ont fait sourire.
Laurent Delahousse : Vous ne dormez donc pas dans un cercueil ! Vous avez beaucoup de choses à cacher.
Mylène Farmer : La climatisation du cercueil.
Laurent Delahousse : Quel est le trait de caractère dont vous êtes fière.
Mylène Farmer : La fidélité.
Laurent Delahousse : Et celui qui vous a troublé.
Mylène Farmer : Parfois le mal de vivre qui est envahissant, c'est une lutte de chaque instant.
Laurent Delahousse ; Vous êtes née en colère, vous ne l'êtes plus.
Mylène Farmer : Mon anniversaire est le 12 septembre, je vous répondrai.
Laurent Delahousse : Dans ces qualificatifs, solitaire, mystérieuse, paradoxale, il y a un peu de vrai.
Mylène Farmer : C'est le propre d'une artiste j'imagine. Je suis faite de vie aussi, beaucoup.
Laurent Delahousse : Les artistes qui prennent des risques, c'est rare. Avez-vous la sensation, en faisant ces tournées, de prendre des risques.
Mylène Farmer : C'est d'abord une nécessité, un besoin. C'est aussi une prise de risque, celle d'un désamour du public.
Laurent Delahousse : On dit que vous êtes à la fois l'amour et la mort, cela reste vos sources d'inspiration.
Mylène Farmer : Ce sont des thèmes inépuisables mais il y a aussi la vie et je suis quelqu'un de vivant.
Laurent Delahousse : Timeless c'est le titre de votre tournée. Il y a cette notion dïntemporalité, c'est important de laisser une trace.
Mylène Farmer : Je ne sais pas si c'est important. Mais dans 2.000 ans, qui va se soucier de ma personne. C'est le moment présent qui est important, c'est la scène.
Laurent Delahousse : Ce n'est pas la dernière fois sur scène.
Mylène Farmer : J'ai le sentiment que c'est toujours la dernière fois, je ne sais pas répondre à cette question.
Laurent Delahousse : Vous irez ce soir encore à Bercy, puis en France et à l'étranger. Notamment en Russie avec des stades à plus de 30.000 spectateurs. Ça vient d'où cette histoire avec la Russie.
Mylène Farmer : Je ne peux pas l'expliquer, je pense que c'est venu spontanément. Au début, on m'a parlé des clips. Il y a quelque chose de commun, une âme tourmentée, l'âme slave.
Laurent Delahousse : Il n'y aura pas d'exil en Russie, vous reviendrez.
Mylène Farmer : Non, l'exil s'est produit autrement. Je viens du Canada et je suis venue en France, c'est mon pays et je l'aime.
Laurent Delahousse : Qu'est-ce qui est le plus compliqué, faire Bercy ou une interview sur un plateau.
Mylène Farmer : Vous connaissez la réponse.
Laurent Delahousse : Je connais la réponse, c'est pour ça que je vous remercie encore plus d'être venue. Belle soirée a vous et bel abandon sur scène avec votre public. A très bientôt. C'est un joli moment pour les spectateurs de vous avoir.
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