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Six conseils pour que votre enfant utilise son portable en toute responsabilité

L'utilisation du portable par les jeunes enfants pose problème, notamment en raison de risques de harcèlement. Une psychologue prodigue ses conseils aux parents.

Article rédigé par The Conversation
France Télévisions
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Un adolescent regardant son téléphone. (HERO IMAGES / HERO IMAGES / GETTY IMAGES)

Chaque année, de plus en plus de parents envoient leur jeune enfant à l’école primaire équipée d’un smartphone. En France, malgré l’interdiction de l’usage des portables à l’intérieur de l’école et du collègue, les enfants sont bien équipés… Selon une étude qui commence d’ailleurs à dater, (TNS pour e-Enfance, 2009), 70 % des ados de plus de 12 ans ont un téléphone portable et le consultent en permanence.

Aux États-Unis, le pourcentage des élèves de troisième année qui ont déclaré avoir leur propre téléphone portable a plus que doublé, passant de 19 % en 2013 à 45 % en 2017. Et environ la moitié des élèves de quatrième année et 70 % des élèves de cinquième année sont allés à l’école avec un téléphone en 2017.

Les parents citent souvent la possibilité de joindre facilement leur enfant comme principale raison de lui donner un appareil. Il s’agit pour eux d’une question de sécurité. Le « danger des étrangers » et les prédateurs sexuels sont souvent les premiers risques soulignés par les parents. Aux États-Unis, certaines écoles publiques adoptent des politiques qui limitent les contacts personnels entre les élèves et les enseignants.

Pourtant, l’intimidation et la cyber-intimidation sont des problèmes très courants. Dans ma recherche de 2017, j’ai constaté que le fait de donner un téléphone portable à un jeune enfant augmente la probabilité qu’il soit victime d’intimidation ou qu’il devienne lui-même une personne intimidante. Cette étude (portant sur environ 4 500 enfants du primaire) aux États-Unis a révélé que le fait d’avoir un téléphone portable à l’école primaire était associé à l’intimidation et à la cyber-intimidation, à la fois comme intimidateur et comme victime d’intimidation. Un « intimidateur/victime » est, on l’aura compris, un enfant qui est, à différents moments, à la fois intimidateur et victime d’intimidation.

Ma recherche a révélé que si plus de la moitié des intimidateurs de troisième année portaient un téléphone portable, seulement 35 % des enfants qui n’étaient pas impliqués dans des actes d’intimidation en portaient un. De façon encore plus nette, les trois quarts des cyber-intimidateurs de troisième année portaient un téléphone, comparativement à seulement 37 % des élèves de troisième année qui n’étaient pas impliqués dans cette pratique. Les résultats étaient semblables, mais un peu plus faibles, pour les élèves de quatrième et de cinquième année.

Il se peut que les résultats aient été plus probants chez les plus jeunes enfants en raison de leur capacité relativement limitée de comprendre comment fonctionnent les communications dans un environnement numérique. Par exemple, dans un travail de terrain au Massachusetts Aggression Reduction Center, j’ai appris que les adolescents se méfient des émotions qui s’intensifient rapidement en ligne, réalisant qu’elles peuvent mener à des bagarres et à de l’intimidation. Mais les jeunes enfants n’ont généralement pas encore appris cette leçon. C’est ce fossé qui m’a motivé, avec un collègue, à créer un guide pour enfants en vue d’obtenir leur premier téléphone portable.

Les enfants peuvent apprendre à utiliser les téléphones en toute sécurité, et les parents peuvent prendre des mesures pratiques pour réduire au minimum les risques que leur jeune soit victime d’intimidation et de cyber-intimidation, ainsi que des pratiques qui peuvent aider à assurer le bien-être général de leur enfant.

Voici quelques conseils :

1L’appareil reste la propriété de l’adulte

Le téléphone n’est pas celui de votre enfant, c’est le vôtre. Ainsi, vous avez toujours le droit de le regarder. En vérifiant le téléphone de votre enfant, vous pouvez détecter des messages ou des posts qui peuvent suggérer une implication dans de l’intimidation ou de la cyberintimidation. Une étude MacAfee de 2012 a révélé que la moitié des enfants ont changé leur comportement en ligne s’ils croyaient que leurs parents vérifiaient.

2Pas de téléphone à l’heure du dîner

Il a été démontré que le dîner en famille protège les enfants contre l’intimidation. Monkey Business Images/Shutterstock

Une étude menée en 2014 par des chercheurs de l’Université McGill a révélé que les dîners de famille ont aidé à protéger les enfants contre l’intimidation. L’heure du repas du soir peut être un moment où l’on peut établir des liens affectifs, même lorsqu’il n’y a pas de grande conversation. Ce peut aussi être l’occasion de discuter des problèmes et des difficultés de chacun, et de débattre des solutions et des stratégies avec la participation des personnes qui vous aiment. Malheureusement, on sait bien que les dîners de famille peuvent être facilement interrompus par des notifications ou des messages des téléphones. C’est pour cette raison qu’une règle « sans appareil » à table peut aider à promouvoir des liens familiaux qui protègent contre l’intimidation.

3Limiter l’utilisation pendant les devoirs

Écouter de la musique peut être acceptable, mais regarder des vidéos et des émissions de télévision ou jouer à des jeux n’ont pas lieu d’être pendant que les enfants font leurs devoirs. Les études qui ont examiné le fait de faire plusieurs tâches en même temps s’accordent pour dire que cela dégrade la mémoire, l’apprentissage et la performance cognitive.

4Pas de téléphone avant le coucher

Il a été montré que les écrans lumineux regardés juste avant le coucher peuvent retarder ou interrompre les rythmes de sommeil. Les problèmes de sommeil, à leur tour, ont été liés à l’intimidation. Pour favoriser un sommeil sain et réduire les risques d’intimidation, aidez votre enfant à adopter de bonnes habitudes de préparation au sommeil en rangeant les appareils numériques une heure avant le coucher. S’ils veulent lire à partir de leur appareil, utilisez une application qui a un filtre UVB ou un graduateur de lumière.

Pour aider votre enfant à rester endormi, les appareils devraient être gardés à l’extérieur de la chambre à coucher pour la nuit. Même si votre enfant a l’intention de dormir, un bourdonnement ou une vibration peut le réveiller. Il peut alors être tenté d’envoyer des messages ou de jouer à des jeux.

5Donnez le bon exemple en voiture

Les textos sont une cause majeure de distraction au volant. Ekaterina Pokrovsky/Shutterstock

Encourager les enfants à abandonner leur téléphone lorsqu’ils sont en voiture peut être une habitude salvatrice pour eux, plus tard. L’habitude peut être prise dès l’école primaire. Un examen des statistiques a révélé, chez les jeunes conducteurs, que l’utilisation du téléphone cellulaire est la deuxième cause de distraction au volant, et donc d’accidents. Pour réduire les risques que cela se produise une fois le permis passé, les parents peuvent apprendre aux jeunes enfants que l’on n’utilise pas un appareil en voiture ; il peut s’agir d’un endroit pour parler, plutôt que d'envoyer des messages.

6Instaurer un esprit de responsabilité

Posséder un téléphone portable n’est pas un droit, c’est un privilège. En tant que parent, encouragez l’utilisation responsable du téléphone en établissant un lien entre ces privilèges numériques et une attitude de responsabilité. Montrez aux enfants comment gérer leur temps passé sur Internet avec des applications comme unGlue. Enseignez à vos enfants que discuter de problèmes concernant la société fait partie de la maturité nécessaire pour utiliser un téléphone portable. Et songez à demander à vos enfants de participer à la vie de la maison pour « gagner » leurs privilèges numériques.The Conversation

Elizabeth Englander, Professor of Psychology, and the Director of the Massachusetts Aggression Reduction Center (MARC), Bridgewater State University.
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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