Ado recadré devant les caméras : l'Élysée a-t-il le droit de diffuser la vidéo ?
L'échange entre le collégien et le président de la République en visite au Mont-Valérien (Hauts-de-Seine) ce lundi a fait le tour des réseaux sociaux.
"Non, je ne suis pas ton copain, non, non, non, non." En déplacement, lundi 18 juin, au Mont-Valérien (Hauts-de-Seine) pour les commémorations du 78e anniversaire de l'appel du général de Gaulle, Emmanuel Macron a sévèrement recadré un collégien qui lui avait lancé un familier "Ça va, Manu ?"
Après avoir été reprise par plusieurs médias, la séquence a été postée dans la soirée sur le compte Twitter du président de la République. "Tu es là, dans une cérémonie officielle, tu te comportes comme il faut !" lui lance Emmanuel Macron, poursuivant : "Donc tu peux faire l’imbécile, mais aujourd’hui c’est La Marseillaise, Le Chant des partisans, donc tu m’appelles 'Monsieur le président de la République' ou 'Monsieur'. D’accord ? Voilà."
Le respect, c’est le minimum dans la République – surtout un 18 juin, surtout en présence des compagnons de la Libération. Mais cela n’empêche pas d’avoir une conversation détendue – regardez jusqu’au bout. pic.twitter.com/CWtPDAALhK
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 18 juin 2018
"L'Elysée est dans son bon droit"
Cette reprise sur le compte officiel du président de la République et par le compte officiel de l'Elysée a suscité des interrogations sur les réseaux sociaux, concernant le droit à l'image du jeune garçon. Une question qu'on peut étendre aussi à sa diffusion dans les médias, dont franceinfo. Était-il légal de poster une vidéo sans floutage du visage de ce jeune garçon mineur ? Franceinfo a posté la question à deux avocates spécialistes du droit à l'image.
Pour Delphine Meillet, avocate au barreau de Paris, spécialisée sur les questions d'e-réputation, il est légal d'utiliser ces images car elles "traitent d'un sujet d'intérêt général" précise la juriste. Il s'agit de plus d'une manifestation publique : toute image prise dans ce cadre ne "relève donc pas de la vie privée" affirme Delphine Meillet. La vidéo peut donc être reprise sans problème "d'autant que l'adolescent interpelle le président, donc il sait qu'il se met en avant" conclut-elle.
Marie-Hélène Fabiani, avocate spécialiste du droit de la personnalité, va dans le sens de sa consœur, mais émet quelques réserves. "Il est vrai que l'Elysée est dans son bon droit, mais je serais les parents, j'enverrais un courrier de mise en demeure pour demander le floutage immédiat du visage de mon enfant", déclare-t-elle. Pour l'avocate, "l'utilisation de la vidéo sur les réseaux sociaux dépasse le simple cadre informatif".
Visiblement, ces images portent atteinte à la santé physique et mentale de l'enfant.
Marie-Hélène Fabiani, avocate spécialiste du droit à l'imageà franceinfo
En cas de harcèlement, "l'Elysée pourrait être poursuivi"
Car il est vrai que la diffusion de l'échange, qui a beaucoup fait réagir, est apparemment mal vécu par l'adolescent. La journaliste Camille Crosnier l'a rencontré et affirme dans un tweet "qu'il est bien mal car tout le monde se moque de lui", précisant dans un second post : "D'autres élèves viennent de passer devant chez lui en rigolant et en regardant à nouveau la vidéo sur internet."
Coucou @EmmanuelMacron et @Elysee, vous savez que je viens de voir le jeune garçon à son collège et qu'il est bien mal car tout le monde se moque de lui? II vient de rentrer chez lui, ne veut parler à personne, il a mm peur que ça lui porte préjudice pour le lycée. Bonne journée
— Camille Crosnier (@CamCrosnier) 19 juin 2018
A partir du moment où l'adolescent est moqué dans son collège ou sur internet, "on tombe dans le cyberharcèlement et donc sous le coup d'une procédure pénale. L'Elysée pourrait éventuellement être poursuivi pour cela", avance l'avocate.
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