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Que peut espérer le Front national ?

L'UMP a remporté l'élection à Villeneuve-sur-Lot, mais c'est le FN qui se félicite de son bon score. Explications avec un politologue.

Article rédigé par Jelena Prtoric
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Etienne Bousquet-Cassagne, candidat du FN à la législative partielle de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), le 23 juin 2013. (JEAN-PIERRE MULLER / AFP)

C'est "une défaite au goût de victoire", estime Etienne Bousquet-Cassagne, le candidat du Front national, battu à la législative partielle à Villeneuve-sur-Lot dimanche 23 juin. "Nous démontrons que nous progressons tant en nombre de voix qu'en pourcentage", a ajouté le candidat de 23 ans, qui a obtenu 46,24% des voix au second tour de l'élection, contre 53,76% pour le gagnant de l'UMP, Jean-Louis Costes.  Quels enseignements tirer de cette performance du FN ?  Explications de Jean-Yves Camus, politologue spécialiste de l'extrême droite.

Francetv info : Le bon score obtenu par le FN à Villeneuve-sur Lot est-il vraiment révélateur d'un changement de climat politique ?

Jean-Yves Camus : C’est la deuxième élection partielle où un candidat du FN obtient un score important au second tour face à un candidat UMP, et qu'il échoue de peu. Le 24 mars, la candidate frontiste Florence Italiani avait enregistré le score de 48,59% dans l’Oise [contre 51,41% pour l’UMP Jean-François Mancel].

Il y a eu un effet Cahuzac lors du scrutin, mais il ne peut pas expliquer à lui seul ce résultat. Le FN profite – et continuera de profiter – des faiblesses des deux principaux partis. A gauche, le gouvernement traverse une passe difficile, toujours en attente des résultats concrets de sa politique sociale et économique. Du côté de l’UMP, il s’agit d’un vrai problème d’orientation politique, un problème de valeurs qui devient un problème d'efficacité politique.

Le FN profite de son avantage de n’avoir jamais exercé le pouvoir au niveau national. Il peut ainsi dénoncer systématiquement ce que le gouvernement et l'opposition ont fait, et endosser l'image du parti porteur de changement.

Le Front national est-il devenu un parti ordinaire ? 

Les électeurs qui ont décidé de voter FN n’attachent pas une grande signification à tout ce débat sur sa "dédiabolisation". Ils veulent tout simplement montrer leur profond désaccord avec les politiques mises en place actuellement. 

Le FN, lui, se situe au-delà de la stratégie de dédiabolisation. Il est à l'étape d'après et affiche plutôt une volonté de diaboliser les pratiques de la gauche et de la droite, pour s'imposer comme alternative. Le candidat qu'ils ont choisi à Villeneuve-sur-Lot est un parfait exemple de cette volonté. C'est quelqu'un du coin, un fils de notable, sans appartenance antérieure à un groupuscule violent. Son jeune âge incarne cette capacité du parti de se positionner comme une alternative à d’autres formations de droite ou gauche, qui représenteraient la vieille classe politique.

La présidente du FN, Marine Le Pen, a jugé dimanche soir que"le soi-disant front républicain" était "mort". Etes-vous d'accord ?

Il n'est peut-être pas mort, mais il est affaibli. La stratégie qui associe le PS et l'UMP pour faire barrage au FN est de plus en plus vécue comme une connivence entre la gauche et la droite. Ce qui peut s'avérer favorable au FN.

Il faut aussi envisager le fait que plus les scores du Front national seront élevés, plus l'UMP sera tenté d'en faire un allié. Il ne s’agira sûrement pas d'alliances nationales – il n’y aura pas de consignes nationales de l’appareil UMP – mais des alliances locales sont envisageables lors des municipales, en 2014 .

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