Mayotte : un mois de mobilisation contre la vie chère
Le 101e département français est en proie à un mouvement social pour dénoncer le coût trop élevé de la vie sur l’île. Grèves, manifestations qui dégénèrent et négociations dans l’impasse, FTVi fait le point sur un conflit enlisé depuis un mois.
Volets baissés, rues désertes et barrages dressés sur les grands axes de Grande-Terre, l'île principale. Cela fait désormais un mois que Mayotte, 101e departement français depuis le 31 mars 2011, vit au ralenti, paralysée par un mouvement de contestation contre la vie chère et les écarts de prix qui existent avec d'autres départements d'Outre-Mer.
Pour dix kilos de volaille, comptez par exemple 24,21 euros à Mayotte, contre 15,90 à la Réunion. Quant à la bouteille de gaz, elle est jusqu’à trois fois plus chère que dans l’Hexagone.
En attendant une sortie de crise, l'économie mahoraise tourne au ralenti : "50 entreprises sont touchées et 2 300 emplois sont en péril", selon le président du Medef local. Les habitants peinent à se ravitailler. Les rares supermarchés ouverts sont pris d'assaut, et la colère monte.
Les manifestants sont prêts à maintenir la pression tant qu'un accord sur les prix des produits de première nécessité n'a pas été trouvé. Non seulement les tarifs pratiqués à Mayotte sont en moyenne supérieurs à ceux de la métropole, mais les prix n'ont cessé d'augmenter ces dix dernières années, alors que la production locale reste très limitée.
Résultat : la majorité des produits est donc importée et taxée comme le riz, les ailes de poulet (ou "mabawas", plat typique de Mayotte), ou encore la bouteille de gaz, qui permet de cuisiner. Accusés de profiter de la situation pour gonfler leur marge, les distributeurs se défendent et rejettent la faute sur les droits de douane.
Le pic des violences sur l'île a été atteint les 7 et 8 octobre, avec des défilés qui ont dégénéré. Une fillette de neuf ans ainsi qu'un adolescent ont été blessés, et un homme de 39 ans est décédé. Plusieurs versions ont circulé sur les circonstances de sa mort, ravivant les tensions, avant que l'autopsie ne révèle que l'homme avait succombé après un massage cardiaque mal réalisé.
Depuis, les violences continuent sporadiquement. Selon la ministre de l'Outre-Mer, Marie-Luce Penchard, "le mouvement se radicalise, peut-être avec une centaine de jeunes. Nous sommes plutôt dans un schéma de violences urbaines".
Guadeloupe 2009, Mayotte 2011 : même combat
Le mouvement mahorais a obtenu le soutien d'Elie Domota, porte-parole charismatique du LKP (collectif qui regroupe une cinquantaine d'organisations syndicales, associatives, politiques et culturelles guadeloupéennes), qui avait mené un mouvement similaire en Guadeloupe en 2009.
Dans une interview accordée au JDD, ils estime que les deux îles sont victimes des même maux et pointe du doigt l'attitude de la ministre de l'Outre-Mer, Marie-Luce Penchard : "(Elle) n'a rien fait pour apaiser les esprits. Toutes ses prises de paroles ont été faites pour mettre de l'huile sur le feu. Elle n'est pas du tout à la hauteur de la situation !"
Une opinion partagée par les leaders mahorais, qui n'ont pas été convaincus par les tentatives du médiateur Stanislas Martin, spécialiste des prix et de la concurrence envoyé sur l'île par le ministère de l'Économie et des Finances. "Nous avons émis des réserves quant à l'objectivité du rapport qu'il doit rendre la semaine prochaine", explique Boinali Saïd, secrétaire général de la CFDT locale. "En attendant, notre mouvement continue."
Pour tenter de reprendre la main, la ministre de l'Outre-Mer a donc chargé Denis Robin, qui connaît bien Mayotte pour en avoir préparé la départementalisation et y avoir été préfet, de piloter une sortie de crise.
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