Le ministre des Affaires européennes a failli être limogé du gouvernement mardi soir, selon le site du JDD
Nicolas Sarkozy est "très remonté" contre Laurent Wauquiez, rapporte le site du journal
Le Premier ministre a à nouveau critiqué jeudi soir sur TF1 les propos du ministre mais estimé que celui-ci avait reconnu sa maladresse "sur la forme" et que le sujet était par conséquent "clos".
Selon le site de l'Express, "si Nicolas Sarkozy n'a finalement pas licencié son ministre à chaud -il ne l'a jamais fait depuis le début de son quinquennat- c'est ''parce que ce qu'a dit Wauquiez sur le fond n'est pas absurde'", précise l'Elysée.
"Fillon a exigé que Wauquiez fasse amende honorable", rapporte le site du Figaro.
Laurent Wauquiez a regretté jeudi "l'interprétation de ses propos" sur le RSA. "Comme je l'ai dit ce matin au premier ministre, nous regrettons que ces propos aient été interprétrés comme une remise en cause du RSA", a-t-il fait valoir.
Mercredi, le président Nicolas Sarkozy avait recadré Laurent Wauquiez lors du Conseil des ministres, en vantant le "bilan exceptionnel" du revenu de solidarité active.
"J'ai dit tout haut ce que les Français pensent tout bas"
Avant l'expression de ses regrets, le chef de file de la "droite sociale" au sein de l'UMP avait pourtant persisté à plusieurs reprises dans sa dénonciation des "dérives de l'assistanat", qualifiées de "cancer de la société française".
"On a froissé le politiquement correct" or "j'ai juste dit tout haut ce que beaucoup de Français pensent tout bas", assurait encore jeudi le ministre des Affaires européennes dans une interviex au Progrès de Lyon. "Je suis convaincu qu'une majorité de Français ressent cela sur le terrain", ajoutait-il.
Il proposait de demander cinq heures hebdomadaires de service social aux bénéficiaires du revenu supplémentaire d'activité et "de plafonner le cumul de tous les minima sociaux à 75 % du Smic". Pour lui, "l'insuffisante valorisation du travail est un problème majeur pour la France. Le RSA a amélioré les choses, mais on peut améliorer le RSA", juge également le maire du Puy-en-Velay.
"Ce ne sont pas les gens qui abusent, c'est notre système qui n'est pas suffisamment juste", plaide Laurent Wauquiez dans Le Progrès de Lyon de jeudi. "Comment reprocher à quelqu'un de ne pas reprendre un travail s'il y perd de l'argent ou s'il gagne 2 ou 3 euros de l'heure en plus ?", se demande-t-il.
Face aux violentes réactions suscitées par ces propos, le ministre avait ironisé lundi sur "le concert des bien-pensants", se félicitant d'avoir lancé un "débat salutaire".
Sarkozy salue le bilan du RSA
Le président de la République a loué mercredi en Conseil des ministres "le bilan exceptionnel du RSA", cible des attaques de Laurent Wauquiez. Nicolas Sarkozy a "demandé à chacun des ministres de rester dans son secteur", a rapporté le porte-parole du gouvernement, François Baroin. Le président de la République a souligné ainsi que le RSA était "un bouclier social, un instrument de la lutte contre la pauvreté".
Nicolas Sarkozy "a demandé à chacun des ministres de rester dans son secteur" et a assuré que "lorsqu'on prend une initiative (comme Laurent Wauquiez, ministre des Affaires européennes, l'a fait, ndlr), on doit toujours se demander si ça va dans le sens de l'intérêt collectif", a également rapporté François Baroin lors de son compte rendu hebdomadaire du Conseil des ministres.
La polémique
L'offensive de Laurent Wauquiez a provoqué de nombreuses critiques.
Le Premier ministre s'est démarqué de l'initiative de Laurent Wauquiez: à ses yeux, on ne doit pas "jeter le discrédit sur la réforme du RSA". D'une manière générale, il ne faut pas "s'ingénier à détruire le bilan", a ajouté François Fillon.
L'initiative a également reçu un accueil glacial de la part de sa collègue en charge des Affaires sociales, Roselyne Bachelot. Les propositions de Laurent Wauquiez "posent des difficultés de principe et de mise en oeuvre que je lui ai d'ailleurs signalées lors d'un entretien approfondi", a-t-elle sèchement réagi dans un communiqué. Lors d'une réunion hebdomadaire du groupe UMP, elle avait lancé: "Faisons attention à certains discours de beaufitude et aux propos de comptoirs...".
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, a fait valoir que le problème "soulevé" par Laurent Wauquiez était "réel" mais qu'il y avait des difficultés d'application.
- Sur France2, le "père" du RSA, Martin Hirsch a estimé que les propositions de Laurent Wauquiez "ne tenaient pas debout". "Tous les coups ne sont pas permis face à la vulnérabilité des gens", a lancé l'ancien commissaire aux Solidarités actives après avoir démenti "les choses fausses" qui "sèment le doute chez les Français" et "les inquiètent pour rien".
Divisions à l'UMP
Le secrétaire général adjoint de l'UMP, Marc-Philippe Daubresse, a fustigé l'"irresponsabilité" du ministre des Affaires européennes et a demandé que sa formation mette cette question à l'ordre du jour de son prochain bureau politique mercredi. La direction nationale du parti majoritaire a cependant apporté son soutien à Laurent Wauquiez: l'entourage du secrétaire général Jean-François Copé a qualifié ses propositions de "contribution importante" à la prochaine convention de l'UMP sur la "justice sociale", le 8 juin.
Les députés proches de Dominique de Villepin: Laurent Wauquiez "improvise" des propositions "qui ne font que renforcer la stuigmatisation à l'égard des personnes recevant des aides de l'Etat et diviser la société entre les travailleurs et les assistés".
- François Hollande (PS): "Entendre un ministre de la République flatter ce qu'il y a de moins bon chez le citoyen, c'est-à-dire la jalousie, en stigmatisant les plus fragiles, les plus démunis, les plus pauvres pour je ne sais quel bénéfice électoral, alors que le montant des bonus des banquiers dépassent pour certains 1 million d'euros, c'est incroyable."
- Le sénateur PS David Assouline: "Toute l'idée de Wauquiez c'est de dire que ceux qui sont dans cette misère c'est parce qu'ils le veulent bien."
- La députée communiste Marie-George Buffet: Laurent Wauquiez tente de "rameuter l'électorat d'extrême droite".
- Le FN, qui prône la suppression des minima sociaux pour les étrangers, a lui aussi critiqué les propositions du ministre, appelant le gouvernement à ne pas considérer les Français comme des "assistés".
- La CFDT: Laurent Wauquiez se "dit de la Droite sociale, mais ça frise plutôt avec la droite extrême".
- Pour la présidente de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS), Nicole Maestracci, les propositions de Laurent Wauquiez sont "très démagogiques et très polémiques".
- Pour Alice Brassens, une experte de l'ANSA (structure qui a expérimenté la mise en place du RSA ), les heures de service social évoquées par le ministre s'apparentent à des travaux d'intérêt général, qui relèvent aujourd'hui de "décisions des juges et sont des mesures punitives".
Les propositions de Laurent Wauquiez
L'actuel ministre des Affaires européennes a estimé dimanche 8 mai que les "dérives de l'assistanat" sont "le cancer de la société française". Demander "cinq heures de service social" ne représente "pas grand-chose" mais montre que, "en face des droits (...), pour vous il y a des devoirs". "Nous plaidons pour que ce soit une obligation, et on déposera dans les 10 jours qui viennent une proposition de loi en ce sens", a-t-il indiqué. Il a évoqué comme possibles missions les sorties d'école, les travaux de nettoyage ou encore "l'accueil de service public".
Laurent Wauquiez a formulé trois propositions. Il souhaite "plafonner le cumul de tous les minima sociaux à 75% du smic, pas plus". "Aujourd'hui, un couple qui est au RSA, en cumulant les différents systèmes de minima sociaux, peut gagner plus qu'un couple dans lequel il y a une personne qui travaille au SMIC. Ca, c'est la société française qui tourne à l'envers", a-t-il estimé.
Il a par ailleurs jugé anormal que le système de protection sociale, "le plus généreux d'Europe", permette aux étrangers, "très facilement, de bénéficier de nos différents outils de solidarité". "Il est normal que quelqu'un qui vient en France bénéficie de notre système à condition qu'il ait un minimum contribué", a-t-il estimé. Le ministre suggère d'établir une durée minimale de travail (5 ans) en France pour pouvoir y prétendre.
Le ministre s'est prononcé enfin pour que chaque citoyen résidant plus de trois mois en France soit assujetti à l'impôt, contre six mois actuellement. L'objectif est, d'après Laurent Wauquiez, que ces propositions soient expérimentées avant la présidentielle de 2012, et puissent nourrir le débat de la campagne.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.