Le ministre de l'Intérieur a déclaré dimanche qu'il "confirmait, revendiquait et assumait" ses propos de vendredi
Brice Hortefeux a redit sur I-télé qu'il qualifiait de "disproportionnée" la condamnation des 7 policiers à de la prison ferme et qu'il se félicitait que le parquet fasse appel de ce jugement.
Le soutien apporté vendredi par le ministre aux policiers condamnés a déclenché une polémique politique, le garde des Sceaux se démarquant de ses propos.
Dimanche, le garde des Sceaux Michel Mercier a, pour sa part, pris la défense des magistrats de Bobigny, mis en cause par les syndicats de policiers qui s'en étaient pris à eux après la condamnation de 7 policiers à des peines de prison ferme allant de 6 mois à un an, pour "dénonciation calomnieuse" et "faux en écriture", après avoir accusé un automobiliste d'avoir renversé l'un d'entre eux. "Je serai toujours là pour défendre les magistrats qui ont toute ma considération" a dit le ministre de la Justice, qui doit les recevoir "dans les prochains jours".
"La Seine-Saint-Denis est un département où les policiers comme les juges travaillent dans des conditions très spécifiques. C'est pourquoi ils doivent être encore plus irréprochables qu'ailleurs", dit-il.
S'agissant de la compréhension manifestée par le ministre de l'Intérieur à l'égard des protestations policières consécutives au jugement de Bobigny, Michel Mercier a fait une mise au point dans "Le Parisien"/"Aujourd'hui": "Je rappelle simplement que lui (Brice Hortefeux, ndlr) n'est pas ministre de la Justice."
Manifestation de policiers, défendus par Brice Hortefeux
200 policiers avaient manifesté vendredi contre la condamnation des 7 policiers. Le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux avait estimé que ce jugement pouvait "légitimement apparaître" pour la police, comme "disproportionné". Samedi devant le conseil national de l'UMP, le ministre a réitéré sa position. "Le métier de policier, de gendarme, de sapeur pompier (...) c'est un métier où il arrive quotidiennement de risquer sa vie, et je me réjouis de la décision du parquet de faire appel de ce jugement."
Les policiers avaient reçu un premier soutien vendredi du préfet de Seine-Saint-Denis, Christian Lambert, un ancien policier, qui s'était dit "très étonné" de ces condamnations.
"Consternation" des magistrats
Après les propos de Brice Hortefeux, des magistrats se sont dits "consternés". "Que le ministre de l'Intérieur soutienne des policiers condamnés pour des faits particulièrement graves, c'est ahurissant", a déclaré samedi Christophe Régnard, président de l'Union syndicale des magistrats (majoritaire). Il a rappelé que l'homme dénoncé à tort par les policiers encourait la perpétuité si le mensonge n'avait pas été dévoilé. "Ce qui me désole, c'est qu'on renforce une guerre police-justice qui n'a pas lieu d'être", a abondé Clarisse Taron, présidente du Syndicat de la magistrature (SM, gauche).
Réactions au PS, Martine Aubry défend les magistrats
"La République, c'est l'impartialité de l'Etat (...) Nous ne pouvons pas accepter que M. Hortefeux, une fois de plus, attaque les magistrats pour une décision qu'ils ont prise", a déclaré samedi la Première secrétaire du PS Martine Aubry après le soutien apporté par Brice Hortefeux aux policiers condamnés. "Je dis au gouvernement, je dis au président : quand on doute de la justice, la République n'existe plus", a-t-elle ajouté.
"On ne peut pas tenir des grands discours aux jeunes pour qu'ils respectent les lois et ne pas respecter la justice de notre pays. Laissez les juges travailler, laissez les juges faire leur travail, faisons leur confiance", a-t-elle ajouté.
Les 7 policiers ont été condamnés pour "dénonciation calomnieuse" et "faux en écriture"
Le 9 septembre à Aulnay-sous-Bois, un policier est percuté par une voiture après une course-poursuite. Lui et ses collègues décident de mentir et accusent sur procès-verbal le conducteur de la voiture qu'ils poursuivaient. Ce dernier est placé en garde à vue pour tentative d'homicide sur fonctionnaire de police, passible de la perpétuité. Au fil des heures, les témoignages des policiers s'effondrent : des collègues d'une deuxième voiture étaient à l'origine de l'accident.
Ils ont été jugés le 4 novembre par le tribunal de Bobigny pour "dénonciation calomnieuse" et "faux en écriture". Trois étaient également jugés pour "violence aggravée": la victime avait reçu des coups après son interpellation. Trois prévenus ont été condamnés à un an de prison, un à 9 mois, un autre à 7 mois et deux à 6 mois.
Le tribunal a mis en avant "la gravité des faits" et expliqué avoir tenu compte de l'attitude des prévenus "devant l'IGS (Inspection générale des services, police des polices) et devant le tribunal". Le parquet, qui avait réclamé du sursis, a dit son intention d'interjeter appel. Mais si ces condamnations étaient confirmées, elles marqueraient une fin de carrière pour cinq d'entre eux pour qui le tribunal a prononcé une inscription de la peine au casier judiciaire.
Les syndicats policiers accusent les magistrats de Bobigny de "laxisme"
Les syndicats policiers ont, eux, violemment mis en cause les magistrats de Bobigny qu'ils accusent régulièrement de laxisme. "Ce tribunal est connu pour receler les pires idéologues de la culture de l'excuse quand il s'agit de remettre dehors à tour de bras les trafiquants de stupéfiants, braqueurs, auteurs de tentatives d'homicide, etc.", a déclaré Synergie-Officiers. Son secrétaire général, Patrice Ribeiro, a condamné "un acte politique et syndical", allusion au Syndicat de la magistrature (SM, gauche) bien implanté dans ce tribunal.
Jean-Claude Delage, secrétaire général d'Alliance, s'est offusqué que "des multi-récidivistes, dans ce tribunal et ailleurs, ne sont pas, eux, condamnés comme il se doit, ou remis en liberté".
A la sortie du tribunal, des avocats exprimaient leur réprobation devant la réaction des policiers, l'un d'entre eux jugeant qu'ils devraient "faire profil bas" après une affaire "pas reluisante pour la police".
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