Le député PS Didier Migaud a été nommé Premier président de la Cour des Comptes mardi, en Conseil des ministres


Expert en finances et respecté tant à gauche qu'à droite, il succÚde à Philippe Séguin, décédé le 7 janvier dernier.
Juriste de formation, Didier Migaud est le "pÚre" de la Lolf (loi organique, nouvelle architecture des lois de finances) avec le sénateur UMP Alain Lambert. Il a exercé sa passion budgétaire comme rapporteur général du budget.
Parmi les noms qui circulaient ces derniers temps, figuraient aussi l'ancien ministre des Affaires européennes puis du Budget, Alain Lamassoure, ou la secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, Anne-Marie Idrac, qui se dit "disponible" pour le poste.
Mais lundi, le nom de Didier Migaud Ă©tait revenu en force, plusieurs mĂ©dias annonçant comme pratiquement acquise sa nomination. D'autant que rĂ©cemment, le chef de l'Etat lui a rendu un hommage public, le qualifiant mĂȘme d'un "mon ami". Une telle nomination, en pleine campagne rĂ©gionale, marque la volontĂ© du pouvoir de poursuivre l'ouverture.
Didier Migaud, un socialiste consensuel
SpĂ©cialiste des finances publiques, Didier Migaud, bientĂŽt 58 ans, doit sa nomination Ă la tĂȘte de la Cour des comptes mardi Ă une expertise sans concession doublĂ©e d'un grand sens du consensus.
Réélu député socialiste de l'IsÚre sans discontinuer depuis 1988, ce proche de Laurent Fabius présidait depuis 2007 la commission des Finances de l'Assemblée nationale, un poste que Nicolas Sarkozy avait voulu attribuer à l'opposition.
Sa prĂ©sidence consensuelle de la commission des Finances, louĂ©e par les ministres de l'Economie et du Budget, Christine Lagarde et Eric Woerth, ne l'a pas empĂȘchĂ© de croiser le fer avec la majoritĂ© Ă son poste de secrĂ©taire national du PS chargĂ© des questions budgĂ©taires. Il a prĂ©sidĂ© plusieurs missions d'information emblĂ©matiques du combat gauche-droite comme celles sur les niches fiscales ou la lutte contre les paradis fiscaux.
Marié à une enseignante, pÚre de trois filles, Didier Migaud travaille actuellement, avec l'économiste et député du RhÎne Pierre-Alain Muet, à la rédaction d'un ouvrage sur la refonte de la fiscalité.
Il avait fait part fin janvier de sa difficulté à comprendre la stratégie du gouvernement pour redresser les finances publiques et demandé que la maßtrise des dépenses se double d'un travail sur les recettes.
"Sur la capacité réelle de notre pays à respecter ses engagements d'un retour en dessous des 3% de déficit à l'horizon 2012 ou 2013, j'avoue ne pas avoir encore compris les scénarios", avait-il dit à Reuters, un message dans la ligne des alertes lancées réguliÚrement par Philippe Séguin.
Philippe SĂ©guin, le "poil Ă gratter" de l'Etat
AprĂšs la mort de Philippe SĂ©guin, c'est le doyen des prĂ©sidents de chambre, Alain Pichon, 64 ans, qui assurait l'intĂ©rim. A la tĂȘte de l'institution depuis 2004, Philippe SĂ©guin s'Ă©tait efforcĂ© de la dĂ©poussiĂ©rer et de la rendre plus proche des prĂ©occupations des Français. Il ne s'est jamais privĂ© de critiquer la gestion de ses amis au pouvoir, quitte Ă susciter la polĂ©mique.
Deux des principales promesses de campagne de Nicolas Sarkozy, la baisse de la TVA dans la restauration ou le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant Ă la retraite, avaient Ă©tĂ© jugĂ©es publiquement trop coĂ»teuses ou inefficaces par la Cour. Cela n'avait pas empĂȘchĂ© d'obtenir du chef de l'Etat que la Cour contrĂŽle la gestion de l'ElysĂ©e, une premiĂšre dans son histoire, Ă©pinglant au passage le budget consacrĂ© aux sondages.
Le dernier rapport annuel, finalisé quelques semaines avant son décÚs, ne dérogeait pas à la rÚgle, pointant une nouvelle série d'anomalies dans la gestion des deniers publics, et s'alarmant notamment de la dérive des déficits.
RĂ©actions
François Fillon a estimé que la nomination du socialiste Didier Migaud révélait que "l'ouverture intellectuelle et la tolérance politique sont bien davantage" à droite qu'à gauche. "Par ce choix, le président de la République démontre qu'il est le président de tous les Français, et non l'homme d'un parti", a affirmé le Premier ministre lors d'un meeting au Mans en soutien à la liste de la majorité présidentielle pour les élections régionales de mars.
Le prĂ©sident du Mouvement dĂ©mocrate, François Bayrou, a estimĂ© mardi que le Premier prĂ©sident de la Cour des comptes devrait ĂȘtre un magistrat et ne devrait pas ĂȘtre nommĂ© par le pouvoir.
Bertrand DelanoĂ« (maire PS de Paris): "Au-delĂ de la qualitĂ© des personnes -Didier Migaud a beaucoup de qualitĂ©s-, ce qui m'importe est le procĂ©dĂ© pour nommer. Le procĂ©dĂ©, je le trouve anti-dĂ©mocratique. Je souhaite vraiment que 2012 porte une alternative et que comme dans tous les grands pays dĂ©mocratiques, par exemple l'Allemagne, ce ne soit pas une personne qu'elle soit de droite ou de gauche qui dĂ©cide de ces nominations". "Nous aurons grandi le jour oĂč il n'y aura plus de polĂ©mique politicienne Ă propos de la nomination de tel prĂ©sident de chaĂźne de tĂ©lĂ©vision, de tel membre du Conseil constitutionnel" (dĂ©claration Ă la presse).
Jean-Marie Bockel (secrétaire d'Etat à la justice): "Le président de la République a montré son attachement à la politique d'ouverture qu'il a initiée voici trois ans". "Ainsi se vérifie chaque jour que la France est en train d'améliorer grandement le fonctionnement de ses institutions politiques en renforçant les contre-pouvoirs face à l'exécutif. C'est incontestablement une source d'équilibre et de mesure, mais aussi d'efficacité à long terme" (communiqué).
La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a salué mardi la nomination du socialiste Didier Migaud comme le "choix de l'intelligence", affirmant qu'elle allait le regretter à la Commission des Finances. "C'est un choix qui honore l'ouverture préconisée et démontrée par le président de la République. C'est formidable. C'est le choix de l'intelligence", a-t-elle dit à l'AFP.
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