La gauche et les syndicats sont critiques à l'égard du projet de réforme alors que la droite loue un texte "juste"
"Ce qu'a choisi Nicolas Sarkozy, c'est faire payer les pauvres", pour François Hollande (PS), les syndicats battant de leur côté le tambour pour une journée d'action le 24 juin.
Pour l'UMP, la réforme est "forte, réaliste et juste", selon Frédéric Lefèbvre, son porte-parole.
Les réactions politiques
"Elle permet de sauver le système de retraite et d'être à l'équilibre en 2018 sans qu'aucune recette ne soit surévaluée", a-t-il assuré. "La pénibilité et le travail très jeune sont protégés dans la réforme (...). Les hauts revenus et le capital participent à l'effort et (...) la convergence entre le privé et le public est poursuivie", a assuré Frédéric Lefebvre.
Pour le secrétaire général de l'UMP, Xavier Bertrand, "c'est une grande réforme". "Il y a de la justice dans cette réforme, il y a de l'équité", a-t-il ajouté.
Alain Juppé, maire UMP de Bordeaux et ancien premier ministre, estime que la réforme "est très ambitieuse et très complète". "Il y a des propositions intéressantes, notamment le développement du tutorat. Elle demande des efforts significatifs à ceux qui ont les moyens de le faire", a-t-il ajouté.
Interrogé pour savoir s'il pourrait y avoir des manifestations comme en 1995 alors qu'il était premier ministre, Alain Juppé répondu: "Nous ne sommes plus en 1995, les esprits ont évolué (...) Les Francais, qui ont beaucoup de bon sens, se rendent compte que la réforme est incontournable
Les députés Nouveau centre Charles de Courson, Nicolas Perruchot et Philippe Vigier: "A l'issue de son premier mandat, un parlementaire touche actuellement une retraite aussi importante qu'un Français qui a cotisé pendant 40 ans. Cette inéquité est purement et simplement intenable !" "Le régime des parlementaires doit être aligné sur le régime général sur quatre points: taux de retenue pour pension, années de cotisation, âge de départ à la retraite et taux de réversion des veuves et veufs".
Le président de La gauche moderne, Jean-Marie Bockel, juge que "l'équilibre juste a été atteint". Son mouvement "se tient prêt pour améliorer encore" ce texte "dès maintenant, dans les négociations en cours avec les syndicats et les autres partenaires sociaux, et pendant les débats du Parlement"
Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la République: "Ainsi, ce sera bel et bien aux classes moyennes et populaires que le fardeau sera infligé!"
Pour François Hollande, le chef de l'Etat a choisi de "faire payer ceux qui ont travaillé tôt". "Quand on sait que 40 % des seniors sont au travail, ce qui veut dire que 60% sont soit au chômage, soit en attente de leur retraite, ça veut dire qu'ils vont attendre un an ou deux ans de plus", a ajouté le député de Corrèze.
François Hollande est cependant resté évasif sur la position qu'adopterait son parti sur le dossier des retraites en cas de retour aux affaires en 2012. "Si on revient sur les 62 ans, il faut avoir une mesure compensatoire. Si on n'a plus la recette attendue par le relèvement de l'age légal, il faut la trouver ailleurs. Il faudra donc soit cotiser plus, prélever plus, soit allonger la durée de cotisation", a-t-il averti.
Le secrétaire national du PS chargé de l'Economie, Michel Sapin: "Ce n'est pas forcément au moment de l'annonce de la réforme que la mobilisation est la plus forte, elle est parfois un peu plus tard et plus efficace".
Pour le communiste Pierre Laurent, qui devrait succéder ce week-end à Marie-George Buffet à la tête du PCF, ce projet n'est "malheureusement pas une surprise". "On voit bien que le gouvernement avait prévu ces mesures depuis le début. Il a gagné du temps, attendu pour annoncer la réforme au début de l'été", a-t-il déclaré en dénonçant un "calendrier scandaleux". Mais "cette bataille n'est pas terminée, car on voit bien que l'opinion publique est très largement opposée à ça", a-t-il ajouté.
"C'est la fin d'un monde, c'est la fin d'une manière de vivre et c'est la fin des jours heureux", a expliqué de son côté le président du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon. "C'est une très mauvaise plaisanterie quand on comparera ce qui va être pris aux hauts revenus à ce qui est pris aux petites gens. Les fonctionnaires vont perdre jusqu'à trois points de salaire", a-t-il estimé.
Les verts estiment que le projet est "d'une iniquité révoltante", "les plus modestes" étant "les plus touchés", alors que "les hauts revenus sont épargnés". "Une fois encore, le gouvernement fait peser sur les salariés le poids écrasant de ses réformes", écrit le parti écologiste dans un communiqué.
Arlette Laguiller et Nathalie Arthaud, porte-parole de Lutte ouvrière: "C'est un acte de brigandage pour dépouiller les futurs retraités".
Réactions syndicales
La CGT demande au gouvernement de "réécrire" son projet de réforme "en prenant en compte ce que disent les organisations syndicales".
Le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault a qualifié le projet gouvernemental de réforme des retraites de "recul social sans précédent" et estimé que "tout va dépendre de la réaction des salariés" avec un premier rendez-vous le 24 juin.
Maintenant tout va dépendre de la réaction des salariés, c'est un recul social sans précédent", a déclaré le leader de la CGT, interrogé par France 2 au côté de son homologue de la CFDT François Chérèque, une présence exceptionnelle des deux leaders syndicaux sur un même plateau d'un journal télévisé.
Pour sa part, François Chérèque a précisé qu'il acceptait de rencontrer le ministre du Travail jeudi pour lui "faire des propositions alternatives". "Si le gouvernement ne suit pas, et je pense qu'ils ne vont pas beaucoup bouger, il faut qu'on soit dans la rue le 24 pour montrer notre mécontentement", a-t-il dit.
Sur TF1, Jean-Claude Mailly, interrogé sur la possibilité pour FO de se joindre à la journée du 24 juin, a répondu qu'il allait en débattre avec ses instances dirigeantes le 21 juin.
Le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, a demandé "le retrait" d'un texte qu'il juge "injuste socialement et inefficace économiquement".
"Les annonces du gouvernement (...) visent à faire supporter l'essentiel du poids de la crise aux salariés et ne règlent pas à long terme la question du financement des retraites", a estimé la CFDT dans un communiqué.
La présidente CFE-CGC de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), Danièle Karniewicz: "C'est une étape indispensable pour préserver le système, il fallait le faire, mais le compte n'est pas bon en ce qui concerne le financement". A ses yeux, "il manque des ressources supplémentaires et on ne pourra pas éviter un débat sur un élargissement de l'assiette pour les retraites". "En matière d'égalité de traitement de tous les Français devant la retraite, le compte n'est pas bon non plus parce qu'il n'y a pas de visibilité pour les salariés du privé et il n'y a pas de niveau garanti affiché (des pensions)", a-t-elle poursuivi.
L'UNSA: "Avec ce projet de réforme, pour beaucoup de salariés, qui ne pourront se permettre d'avoir une retraite amputée par la décote, l'âge effectif de la retraite sera donc de 67 ans. C'est en cela que ce projet est profondément injuste car cette mesure pénalisera avant tout les salariés aux périodes d'activités incomplètes et en majorité, ce sont des femmes"
Solidaires: "Le projet de loi sur les retraites est sans surprise. La poursuite de la baisse du niveau des pensions est programmée: les salariés rentrant de plus en plus tard sur le marché du travail et les entreprises se débarrassant de leurs salariés de plus en plus tôt, - l'âge moyen de cessation d'activité est inférieur à 59 ans -, il sera de plus en plus difficile d'avoir le nombre nécessaire d'annuités"."Il faut se préparer à un affrontement majeur", explique le syndicat . Il "propose qu'un mouvement de grève générale soit organisé dès la rentrée dans l'unité la plus large".
Réactions patronales
Le président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), Jean-François Roubaud: "cette réforme me paraît assez équilibrée (...). Les mesures qui ont été prises sont relativement raisonnables, je crois". "J'applaudis des deux mains quand on veut baisser les cotisations patronales", a-t-il ajouté.
L'avis d'économistes
Pour Gérard Cornilleau (Observatoire français des conjonctures économiques, OFCE): ce projet est "relativement habile", probablement efficace pour réduire les déficits mais rate son objectif affiché d'équité. Cette réforme "n'a d'effet que sur les comptes à court terme. Ça ne résout pas le petit déficit supplémentaire qui devrait apparaître vers 2020-2030. Mais c'est une question qu'il faudra se reposer autour de 2015-2020", estime-t-il.
Gérard Cornilleau juge les mesures annoncées "relativement injustes". "Les cadres, par exemple, ne sont absolument pas concernés. De toute façon, ils seraient partis à 62 ans et même à 63, 64 ou 65 ans", dit-il. "Les gens concernés par le report de l'âge du taux plein (67 ans au lieu de 65), c'est plutôt les femmes".
"La France a enfin décidé de regarder les choses en face", surtout "parce qu'elle n'avait pas le choix" compte tenu des risques de dégradation de la note de la dette française sur les marchés financiers, estime Marc Touati (Global Equities). Il refuse cependant de crier victoire, car cette réforme repose, selon lui, sur des hypothèses macro-économiques très optimistes, notamment pour l'emploi. "Il ne faudra donc pas s'étonner si, dans quelques années, une nouvelle réforme des retraites vient empoisonner la vie des futurs dirigeants du pays", explique l'économiste. "C'est d'ailleurs là l'autre grand problème de la réforme des retraites", ajoute-t-il. "Car, en plus de contredire la promesse de Nicolas Sarkozy de ne pas toucher à la retraite à 60 ans, elle met également à mal son principal slogan de campagne: 'travailler plus pour gagner plus'".
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