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Législatives : la droite dure se mord les doigts

L'aile droitière de l'UMP n'a pas fait recette aux législatives. Beaucoup des figures du sarkozysme pur jus sont également battues, alors que les modérés reprennent des couleurs et donnent de la voix pour l'après. 

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Nadine Morano, défaite dans sa circonscription de Meurthe-et-Moselle dimanche 17 juin 2012. (ALEXANDRE MARCHI / MAXPPP)

Dix-neuf des 39 députés de la Droite populaire vaincus. Nadine Morano, visage fermé, qui expédie en quelques minutes sa déclaration à la presse, avoue "sa déception" et dénonce "des coups tordus". Valérie Rosso-Debord, qui laisse les sanglots l'envahir et ses militants la réconforter. Claude Guéant, qui met les journalistes à la porte et refuse les interviews, quelques minutes après l'annonce de sa défaite. Les tenants de la ligne droitière à l'UMP ont été particulièrement décimés au cours de ces législatives.

Mis de côté durant les deux campagnes – présidentielle et législatives –, les ténors UMP favorables à une alliance avec le centre plutôt qu’avec la droite de la droite reprennent du poil de la bête. Jean-Pierre Raffarin en tête, qui estime : "La stratégie de Grenoble, la dérive droitière a échoué et la stratégie du centre indépendant a échoué." Et de regretter : "Notre majorité a été un peu hémiplégique, sa partie droitière était plus renforcée que sa partie centrale."

Raffarin impute l'échec électoral de l'UMP à sa "dérive droitière" (Francetv info)

Hécatombe chez la Droite populaire

Créé pour ne pas laisser le Front national rogner l’UMP par sa droite, ce mouvement de 39 députés remuants, adeptes des déclarations polémiques et des apéros "saucisson-pinard", est décimé. Seuls 20 de ses 39 membres ont été réélus, la moitié est donc battue. Parmi les figures les plus connues emportées par la déferlante rose, Eric Raoult, largement devancé par un socialiste dans la 12e circonscription de Seine-Saint-Denis (45,9%), et Christian Vanneste, éliminé dès le premier tour dans la 10e circonscription du Nord.

Nombre d’entre eux ont été victimes de triangulaires avec le Front national, qu’ils pensaient pourtant faire reculer en lui empruntant une partie de son discours. C’est le cas d’Eric Diard, élu dès le premier tour en 2007, éliminé malgré 36,6% des voix en 2012, 0,74 point derrière le socialiste Vincent Burroni dans la 12e circonscription des Bouches-du-Rhône où le FN s’est maintenu. Mais aussi d’Elie Aboud, 10 petites voix derrière la socialiste Dolores Roque dans la 6e circonscription de l’Hérault où le FN obtient 20,37% des suffrages. Autre cas de figure, l’élimination dès le 1er tour de Paul Durieu, dissident dans la 4e circonscription du Vaucluse. Il emporte avec lui la candidate officielle de l’UMP, elle aussi éliminée dans ce territoire où le candidat d’extrême droite (ex-FN) Jacques Bompard rassemble 58,77% des voix au second tour.

Parmi les rescapés : Thierry Mariani, élu dans la 11e circonscription des Français de l’étranger, Lionnel Luca, élu dès le 1er tour avec 51,44% des voix dans la 6e circonscription des Alpes-Maritimes, ou encore Jacques Myard, qui rassemble près de 57% des suffrages dans la 5e des Yvelines.

• La Sarkozie bousculée

Rue89 les appelle "les caricatures de la Sarkozie". Jamais avares de formules, toujours présents pour soutenir l’ex-président candidat, leur champion, ils sont montés au créneau pour défendre la stratégie droitière de l’UMP durant la campagne. Et sont défaits.   

Nadine Morano, ex-ministre de l’Apprentissage et de la Formation professionnelle, perd son siège dans la 5e circonscription de Meurthe-et-Moselle, battue par le socialiste Dominique Potier (55,67%). Et ce malgré son explicite appel du pied en direction des électeurs du Front national au soir du premier tour, le parti frontiste obtenant 16,45% sans pouvoir se maintenir. Dans la 2e circonscription du même département, c’est Valérie Rosso-Debord, figure montante au sein de l’UMP, qui laisse la place à un socialiste en n’obtenant que 45,85% des suffrages.

Valérie Rosso-Debord réconfortée par ses partisans après sa défaite aux législatives à Nancy (Meurthe-et-Moselle), dimanche 17 juin 2012. (PATRICE SAUCOURT / MAXPPP)

Frédéric Lefebvre, ex-secrétaire d’Etat du gouvernement Fillon, très proche de Nicolas Sarkozy dont il a été le directeur de cabinet à l’UMP dès 2005, perd dans la 1re circonscription des Français de l’étranger (Canada et Etats-Unis) pourtant considérée comme gagnée d’avance. Claude Guéant rate aussi son parachutage à Boulogne-Billancourt. Il arrive près d’un point derrière le dissident UMP et maire adjoint de Boulogne, Thierry Solère, dans la 9e circonscription des Hauts-de-Seine. 334 voix les séparent dans cette triangulaire avec le PS. Guillaume Peltier, sorti du Front national de la jeunesse et membre du comité stratégique de Nicolas Sarkozy, est sèchement battu dans la 1re circonscription d'Indre-et-Loire. Enfin, Chantal Brunel, qui préconisait de "remettre" les immigrés "dans les bateaux", perd la 8e circonscription de Seine-et-Marne au profit du socialiste Eduardo Rihan Cypel. 

• Les modérés tirent leur épingle du jeu

De l’autre côté de la majorité, celle qui penche au centre et qui prônait une campagne sur le thème de l’économie, la crise et contre "l’assistanat", plusieurs ténors sauvent leur siège. Largement pour certains dont les ex-chiraquiens François Baroin, réélu avec 56,45% des voix dans la 3e circonscription de l’Aube, l’ancien ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire dans la 1re de l’Eure, et Valérie Pécresse, ancienne ministre du Budget et porte-parole du gouvernement, réélue dans la 2e circonscription des Yvelines.

Henri Guaino et François Fillon sont élus dans des circonscriptions très favorables à la droite, respectivement dans les Yvelines et à Paris.

Laurent Wauquiez, initiateur du mouvement de la Droite sociale, retrouve son siège dans la 1re circonscription de Haute-Loire avec 63,95% des voix. De leur côté, NKM, partisane du Front républicain anti-FN et sur la liste noire dressée par Marine Le Pen,  sauve les meubles, tout comme Xavier Bertrand. La première obtient 51,48% des voix dans la 4e circonscription de l’Essonne, le second devance de 222 voix la socialiste Anne Ferreira dans la 2e circonscription de l’Aisne.

Dès dimanche, ils faisaient de nouveau entendre leur voix pour peser dans la reconstruction de l'UMP qui s'amorce. Sur RTL, François Baroin s'est agacé : "A trop courir derrière le FN on le crédibilise !" Tandis que Xavier Bertrand martelait : "Est-ce que nos valeurs, le travail, l'autorité, la justice (...) sont toujours d'actualité ? Je crois que oui, il faut rester sur nos valeurs."

Bertrand : "Il va falloir tirer les leçons de ces défaites" (Francetv info)

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