"L'affaire est close" au sujet des vacances en Tunisie de Michèle Alliot-Marie, a déclaré jeudi François Baroin
"Michèle Alliot-Marie s'est expliquée, elle a même fait son mea culpa, elle a dit qu'elle ne le referait pas", a déclaré M. Baroin.
La ministre des Affaires étrangères a exclu à nouveau mercredi soir sur France 2 de démissionner et a confirmé avoir voyagé dans le jet privé d'un homme d'affaires tunisien, entre Tunis et Tabarka fin 2010.
L'homme d'affaires Aziz Miled, "nous a proposé de faire le vol avec lui plutôt que de faire (...) deux heures de voiture", a-t-elle dit à sa sortie du conseil des ministres. "Il n'a pas mis son avion à disposition", a-t-elle ajouté en précisant avoir "toujours payé (ses)vacances".
"Selon le Canard enchaîné, il serait un membre "du clan Ben Ali". L'information avait déjà été démentie par son compagnon, Patrick Ollier, et le cabinet de la chef de la diplomatie française. L'hebdomadaire a révélé mercredi que la ministre avait utilisé entre Noël et le Jour de l'An l'avion pour relier Tunis à la station balnéaire de Tabarka, avec son conjoint et des proches.
Dans la journée, la ministre des Affaires étrangères avait récusé les "mensonges" du journal et assuré qu'elle ne démissionnerait pas sur des "choses fausses, pour des assertions". "Je crois qu'il y a des vrais sujets, je réponds uniquement sur ces choses puisque je n'aime pas qu'on dise des mensonges en ce qui me concerne", a poursuivi la chef de la diplomatie française qui était interrogée à la sortie du conseil des ministres.
"A mon arrivée à Tunis, un ami qui se rendait à Tabarka avec son avion nous a proposé de faire le vol avec lui plutôt que de faire les deux heures de voiture comme prévu. Il n'a pas mis son avion à ma disposition, nous l'avons accompagné dans son déplacement", a expliqué Mme Alliot-Marie avant d'ajouter: "Ce monsieur est surtout une victime du clan Ben Ali, il a été spolié par M.Trabelsi qui est entré de force dans le capital de sa société". Et de préciser que "les Tunisiens ont réintroduit ce monsieur dans ses droits en lui rendant sa part de capital".
Appelée à la démission par des élus de gauche
A l'Assemblée, lors des questions d'actualité, Michèle Alliot-Marie avait été sommée de s'expliquer sur les largesses dont elle aurait bénéficié d' l'homme d'affaires tunisien. Plusieurs ténors de gauche l'ont jugée disqualifiée pour représenter la France."Très amicalement et très sobrement, madame, je vous dis, partez !", a ainsi lancé le député écologiste Yves Cochet tandis que quelques "démission !" ont éclaté sur les bancs de l'hémycicle.
"Michèle Alliot-Marie n'est plus en capacité de conduire la diplomatie française", a renchéri Roland Muzeau, porte-parole du groupe communiste et citoyen. Même son de cloche du côté des députés PS Arnaud Montebourg ou Manuel Valls.
Le patron des députés socialistes, Jean-Marc Ayrault, avait auparavant estimé auprès de l'AFP que Michèle Alliot-Marie s'était "totalement disqualifiée" avec "son voyage en Tunisie" et qu'elle n'avait donc "plus sa place au gouvernement". Arnaud Montenourg et Manuel Valls ont également demandé sa démission si l'info s'avère exacte.
Mme Alliot-Marie est vivement critiquée en France depuis le 11 janvier, pour avoir sous-estimé la révolution tunisienne et avoir proposé devant l'Assemblée nationale une coopération sécuritaire au régime Ben Ali.
L'avion privé ainsi que l'hôtel de destination de Michèle Alliot-Marie appartiennent à Aziz Miled, ami de longue date de la ministre et présenté par Le Canard Enchaîné comme proche de Belhassen Trabelsi, beau-frère de l'ex-président Zine el Abidine Ben Ali.
"Il est vrai que Michèle Alliot-Marie, après avoir pris un vol commercial de Paris à Tunis, a ensuite pris un avion privé pour Tabarka", avait indiqué à l'AFP son cabinet. "C'était à l'invitation de Aziz Miled, un ami depuis plusieurs années, qui est le propriétaire d'une compagnie aérienne appelée Nouvelair. Aziz Miled était dans l'avion et les a emmenés, avec ses parents et son conjoint", a-t-on précisé de même source.
Aziz Miled n'est pas un membre du clan Ben Ali, selon les proches de MAM
"Arrivés à Tunis, M. Miled, qui est un de mes amis, nous a proposés, puisqu'il a un jet privé et qu'il est propriétaire d'une compagnie aérienne qui s'appelle Nouvelair, de nous amener à Tabarka en avion en 20 minutes plutôt que de faire 2 heures de voiture avec des routes de montagnes", a expliqué mercredi Patrick Ollier, compagnon de la ministre, et lui-même ministre des Relations avec le Parlement, joint par téléphone sur RTL.
"M. Miled est plus une victime qu'autre chose du clan Ben Ali. Certainement il connaissait le président Ben Ali, mais il a construit sa fortune de ses propres mains et il a été spolié par M. Traboulsi qui lui a, il y a quelques mois, pris 20 % de sa compagnie alors qu'il en était propriétaire totalement, et exigeait de devenir président de la société", a ajouté M. Ollier.
Un soutien de Ben Ali pour la prochaine présidentielle tunisienne
Des éléments remettent en question l'affirmation selon laquelle Aziz Miled serait une victime du clan Ben Ali. Les avoirs de M. Miled ont été gelés par la Suisse, comme tous ceux du clan Ben Ali, a rapporté mercredi Lemonde.fr (voir la liste officielle en pdf).
De plus, l'homme d'affaire figure dans deux appels à une nouvelle candidature Ben Ali. Un premier lancé en août 2010 pour que "le sauveur de la patrie, le président Ben Ali" se présente en 2014. Et un second lancé en septembre 2010, ajoute le site du quotidien.
En 2009, le nom d'Aziz Miled faisait partie des 350 autres figurants sur la liste des membres du comité central du RCD, le parti de Ben Ali.
Autre élément, M. Miled a fusionné en octobre 2008 sa compagnie aérienne, Nouvel Air, avec Khartago Airlines... propriété de Belhassem Trabelsi, le gendre de Ben Ali.
M. Miled "serait plutôt un opposant. Sans doute. Mais alors proche de la vingt-cinquième heure, très fraîchement converti", rétorque Le Canard Enchaîné qui relève notamment qu'il avait signé un "appel au président Ben Ali l'exhortant à se représenter pour un nouveau mandat en 2014".
Dimanche, dans un entretien au Parisien, Michèle Alliot-Marie avait reconnu avoir été en vacances fin 2010 en Tunisie, alors que les premières manifestations avaient commencé à la mi-décembre. "Comme des millions de Français, je vais en Tunisie. Voilà tout", avait-elle expliqué.
Le Canard Enchaîné indique aussi avoir cherché en vain à savoir qui avait réglé la facture de l'hôtel de Tabarka où ont séjourné la ministre et sa famille. "Elle a été réglée par Mme Alliot-Marie et sa famille", a assuré l'entourage de la ministre sans plus de précisions.
A voir "Le réveillon de MAM dans un avion du clan Ben Ali", titre en Une le Canard enchaîné du mercredi 2 février 2011
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