Calais : le quotidien "Nord Littoral" porte plainte après des menaces de mort
Le journal a été pris à partie par des partisans de l'avocat et député proche du FN Gilbert Collard, dont deux clients ont été qualifiés, en une, de "fachos" par le quotidien.
"On va violer vos enfants", "Vous méritez la guillotine"… Le quotidien calaisien Nord Littoral a annoncé, vendredi 5 février, avoir déposé plusieurs plaintes contre des internautes auteurs de propos menaçants à son encontre. Ces commentaires ont été publiés sous un message Facebook du député Gilbert Collard, proche du Front national. L'élu, par ailleurs avocat, y dénonçait le contenu de la une de l'édition du 29 janvier du quotidien, où deux de ses clients étaient qualifiés de "fachos".
Francetv info a interrogé Julien Pouyet, journaliste à Nord Littoral, pour en savoir plus sur la démarche du journal.
Francetv info : Pourquoi Nord Littoral a-t-il décidé de saisir la justice ?
Julien Pouyet : Le degré de haine dans ces commentaires dépasse les simples insultes que l'on reçoit tous les jours : on est dans de la menace physique, avec des noms de journalistes clairement cités. Il y a même une menace d'attentat. "J'espère qu'il va vous arriver comme à Charlie Hebdo en pire", a par exemple écrit un internaute. La police nous a indiqué qu'elle prenait très au sérieux cette menace.
Les internautes visés vous reprochent le titre de une, où vous présentez deux Calaisiens comme des "fachos". Pourquoi avoir choisi ce terme ?
Nous avons estimé qu'il y avait assez d'éléments pour cela. On sait que le fils, Gaël Rougemont, qui a sorti un fusil face à des militants pro-migrants, gravite autour de ce milieu. Il a déjà posé avec des symboles nazis. Même chose pour son père, David, qui a participé à la première manifestation de Pegida France, en fin d'année dernière. Tous les deux ont accordé des interviews à des sites extrémistes. Il faut appeler un chat un chat.
Ce terme de "facho" peut pourtant apparaître comme péjoratif, voire insultant. Gilbert Collard a annoncé que ses clients envisageaient de porter plainte.
Pour nous, il n'y a aucun jugement derrière ce terme. Nous ne nous sommes pas demandé s'il était péjoratif ou insultant : nous l'avons employé à titre informatif. Derrière ce titre, dans nos articles, nous avons expliqué en quoi ces deux personnes étaient des fachos. Quand on pose sur de telles photos, quand on participe à des manifestations islamophobes, il faut assumer ses idées. Nous, on assume notre titre.
Ce n'est pas la première fois que votre ligne éditoriale est critiquée...
Nord Littoral est un journal engagé, qui a l'habitude de prendre position. Notre une de mars 2014, Le FN à Calais : le bal des nazes, avait choqué. Le Front national a déjà attaqué notre traitement de l'information, mais on essuie des attaques d'à peu près partout. On est critiqué quand on supprime des commentaires extrêmes, mais aussi quand on ne les supprime pas.
En novembre, quand nous avons dévoilé l'identité d'auteurs de commentaires haineux, nous avons aussi reçu des menaces. Cela a fait également l'objet d'un dépôt de plainte.
Vous sentez-vous en danger sur le terrain ?
Pour l'instant, ce sont des menaces virtuelles. Mais nous savons que cela peut dégénérer à tout moment, d'autant que les messages de haine proviennent d'extrémistes de droite, mais aussi de gauche. On fait attention, ce qui ne nous empêche pas de donner la parole à tout le monde.
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