Cet article date de plus de douze ans.

Climat social : "Ce qui prédomine, c'est une sorte d'inquiétude résignée"

Erik Neveu, professeur à Sciences-Po Rennes, spécialiste des mouvements sociaux, décrypte pour FTVi l'enjeu des préavis de grève déposés à la SNCF et chez Air France. 

Article rédigé par Catherine Fournier - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Le dernier grand mouvement de grève à la SNCF remonte à octobre 2010, contre la réforme des retraites. Ici, à la gare Saint-Lazare à Paris.  (PATRICK KOVARIK / AFP)

POLITIQUE - Les quatre principaux syndicats de la SNCF (CGT, Unsa, SUD-Rail et CFDT) appellent à une grève à la veille des vacances de la Toussaint, du 24 octobre au soir au 26 octobre au matin. La CGT prend le relais chez Air France, avec un préavis à compter du 26. Faut-il craindre un mouvement social d'ampleur ? Réponse avec Erik Neveu, professeur à Sciences-Po Rennes, spécialiste des mouvements sociaux. 

FTVi : Six mois après l'élection d'un président de gauche à l'Elysée, un appel unitaire à la grève est lancé à la SNCF. Le dernier en date remonte à 2010, année du mouvement contre la réforme des retraites. Que faut-il en conclure ?

Erik Neveu : L'état de grâce du président et du gouvernement, s'il a jamais existé, est fini. La situation économique très contraignante à laquelle l'exécutif est soumis explique en partie ce phénomène. Mais le fait est que François Hollande et Jean-Marc Ayrault n'ont pas réussi à inventer des gestes symboliques forts en début de mandat. Nicolas Sarkozy, sur ce point, avait été plus rapide, avec l'adoption rapide de la loi Tepa (travail, emploi et pouvoir d'achat). 

Les syndicats commencent-ils à trouver le temps long ? 

Ils observent une asymétrie de la réactivité gouvernementale selon les mouvements de protestation. Quand celui des entrepreneurs, "les pigeons", obtient gain de cause tout de suite, ceux du monde ouvrier, les Petroplus, les Doux, voient les ministres s'agiter mais sans récolter beaucoup de résultats. On observe une forme de désillusion sur les intentions du gouvernement.

La succession des plans sociaux, le budget de rigueur, l'augmentation des impôts peuvent-ils faire craindre un mouvement social d'ampleur cet hiver ? 

Pour l'instant, les syndicats sont davantage dans une logique ponctuelle, afin d'envoyer un message et de mettre la pression sur le gouvernement. Je ne vois pas un niveau de mobilisation exceptionnel ou des signaux d'alarme qui pourraient faire craindre une grève à Noël, par exemple, dont les effets seraient beaucoup plus dévastateurs et difficiles à gérer.

Quel message les syndicats cherchent-ils à envoyer au gouvernement ? 

Comme d'autres entreprises publiques avant elles, Air France et la SNCF sont confrontées à une accentuation de la concurrence, à des suppressions d'emploi et à une intensification du rythme de travail et donc du stress, dans des proportions impressionnantes. Il y a une réelle désespérance des personnels et les syndicats y sont sensibles. Malgré tout, on ne sent pas une réelle combativité. Ce qui prédomine en cette rentrée, c'est plutôt une sorte d'inquiètude résignée face au marasme actuel. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.