Feuilleton 3/5 : "L'héritage de Vauban"
Notre feuilleton cette semaine nous fait visiter quelques-uns des édifices laissés par Vauban. Aujourd'hui, on va au fort Libéria, construit sous Louis XIV pour tenir une position stratégique dans les Pyrénées-Orientales, entre la France et l'Espagne. L'architecte a dû s'adapter au relief, très escarpé.
Posé à flanc de montagne, Fort Libéria est comme un verrou aux portes des Pyrénées. Un rempart dissuasif contre l'ennemi espagnol. En contrebas, il y a le village et l'ancienne taverne médiévale taillée dans la même pierre que le fort.
On a du mato, chez nous en pays catalan, ça se mange avec du miel.
Joël n'est pas seulement cafetier et pompier volontaire, il est aussi le gardien des clés du fort. Il le connaît depuis toujours avant l'ouverture au public.
On y allait de façon un peu frauduleuse, on avait mis une traverse de chemin de fer. On entrait, il y avait des chauves-souris, on avait nos lampes.
Ces remparts épousent parfaitement la pente, ils veillent comme un aigle sur son éperon rocheux, sur le village qu'il protège 200 mètres plus bas. Villefranche-de-Conflent. On y monte à pied ou en 4X4. Le fort se visite depuis presque 30 ans. Vauban l'a bâti en 1681 avec ce qu'il avait sous les pieds. Les marbres de Cerdagne, le fer de la montagne du Canigou.
Qui était le plus fort ? Vauban qui a fait ça ou la nature ? En tout cas, cela se marie bien. Ça donne au fort un côté spirituel, on est au-dessus de la civilisation. Quand on est là, c'est presque reposant.
Le fait d'être tous ensemble, ça devait pas être évident de vivre et de se supporter les uns les autres.
L'enfermement.
Oui, c'est vraiment très étroit.
Position stratégique au confluent de trois vallées. Il fallait absolument protéger Villefranche. Le village jusqu'alors espagnol devenait français en 1659 avec la signature du traité des Pyrénées. Vauban se mit donc à l'oeuvre pour loger les militaires.
On va monter au second niveau.
Combien d'hommes étaient là-haut ? Une centaine peut-être. Personne n'a vraiment su. L'important était de dissuader l'ennemi, et, dans la démonstration, il y avait un peu de bluff.
Ils plaçaient le canon devant la bouche a canon, ouvraient le volet, tiraient, le déplaçaient devant la bouche a canon suivante. L'ennemi pensait qu'il y avait un canon devant chaque bouche. Une ruse.
Dans les entrailles du château, il n'y eut pas de prisonniers espagnols, mais des empoisonneuses de la Cour de Louis XIV, enfermées pendant 40 ans et elles y sont mortes.
Les femmes n'ont même pas été jugées. Elles ont été envoyées le plus loin possible de Versailles. Il y en a eu huit dans cette pièce, enchaînées au mur, par les pieds, par les mains, ou par les deux.
A la moindre chose, on se faisait enfermer. On en sortait ensuite difficilement.
lronie de l'histoire, ce sont des artisans espagnols, qui refont le toît de la caserne. En maître d'oeuvre, on retrouve notre cafetier et son père. Pierre a acquis le fort en concession il y a 30 ans. Il a tout donné pour le faire revivre.
Je ne sais pas combien on a investi d'argent. Ça fait peur. Il y a trois ans de travaux: 400 mètres de remparts, la restauration du clocher, les toîtures de la caserne. Je ne suis pas riche. Je suis bénévole et à la retraite. C'est la passion.
Pour cette famille, le fort Libéria est la plus belle des citadelles Vauban. Elle veille depuis 330 ans sur leur village fortifié. Vauban était a l'époque l'architecte de la colonisation française. Aujourd'hui, il est une fierté catalane, et les Espagnols viennent se frotter en touristes aux remparts.
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