Tous les braquages ressemblent-ils à celui de Cannes ?
Si le but est le même, le mode opératoire et les cibles varient.
Un casse, plusieurs possibilités. Les deux braquages survenus à Cannes les 29 et 31 juillet inquiètent. Et pour cause : les attaques visant des bijouteries ont augmenté de 180% ces dernières années. Pourtant, si les casses se suivent, ils ne se ressemblent pas. Si Doron Levy, chercheur au CNRS et auteur de Braquages : actualité, évolution, ripostes, rappelle que "chaque attaque est unique dans sa configuration", il y a tout de même des dénominateurs communs. Qui sont les braqueurs d'aujourd'hui et quelles sont leurs méthodes ?
Les amateurs : responsables de la majorité des braquages
La plupart des braquages sont le fait de délinquants qui, sans être moins dangereux, ne sont pas des professionnels. Il s’agit souvent de jeunes entre 18 et 25 ans qui opèrent sur différents fronts de la criminalité (trafic de drogue, vols à l’arraché…). Moins capables de gérer leur sang-froid, "ce sont ceux qui posent le plus de problèmes et se font le plus facilement avoir", explique le criminologue Stéphane Quéré, interrogé par francetvinfo. Ces braquages amateurs se sont multipliés ces dernières années, pour une raison très simple : "Aujourd’hui, plus besoin d’être un grand bandit pour se procurer une arme", analyse le spécialiste.
Les attaques de commerces. Les amateurs s'en prennent souvent à des commerces à proximité de leur domicile, pour un butin dérisoire. Ainsi, dans plus de la moitié des attaques commises en 2009 et visant des commerces d'alimentation générale, la prise était inférieure à 2 000 euros, selon les données de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales. "Ce sont par exemple des jeunes qui débarquent dans un centre commercial avec un scooter, un fusil, un marteau ou un faux pistolet. Ils font beaucoup de dégâts, puis s’enfuient maladroitement", raconte Doron Levy.
Les attaques de bijouteries de quartier. La plupart des attaques de bijouteries entrent dans la même catégorie que celles qui visent des commerces d'alimentation, affirme le chercheur. En s'en prenant violemment au magasin ou au vendeur, les amateurs "prennent des risques incommensurables pour une cagnotte qui rapporte rarement plus de 100 000 euros. Le pire, c’est que souvent ils ne reconnaissent pas la marchandise qui a de la valeur".
Les attaques de distributeurs automatiques. C’est une pratique qui s’est développée ces dernières années, face à la sécurisation des banques. Pourtant, seuls les amateurs s’attaquent aux distributeurs automatiques, car là encore, le ratio risque-butin est disproportionné. "Ils risquent dix à quinze ans de prison pour 30 000 euros", souligne Doron Levy.
Les vols dits "de nécessité". Ces braquages un peu à part sont souvent l’œuvre d’un individu seul, qui agit sur un coup de tête. C’est le cas par exemple des toxicomanes qui attaquent une pharmacie. Ou encore des personnes qui agissent à cause de problèmes personnels, comme l'homme de 75 ans, apparemment dépressif, qui avait attaqué un casino à Trouville en 2011.
Les pros : des braquages plus rares, mais plus spectaculaires
A la différence des amateurs, les braqueurs chevronnés agissent souvent dans le calme, rapidement, et pour des butins impressionnants.
Les attaques contre les banques. Le temps du "gang des postiches" (vidéo) est révolu. Ces professionnels qui s’introduisaient dans les banques déguisés en bourgeois dans les années 80 et prenaient les employés en otage seraient bien embêtés aujourd’hui. "Les banques ont acquis des dispositifs de sécurité très pointus", rappelle Stéphane Quéré. "Pour réussir à braquer un établissement financier, il faut déjà réussir à passer le sas de sécurité", ajoute Doron Levy. En dix ans, ces braquages ont donc été divisés par deux. Aujourd’hui, on compte à peine quarante attaques de ce genre chaque année. Ceux qui s’en prennent aux banques sont donc soit des inconscients qui rateront leur coup, soit des bandits très organisés.
Les attaques contre les fourgons blindés. Faute de pouvoir s’en prendre aux banques, les pros du braquage vont plutôt s’attaquer aux fourgons qui transportent leurs fonds. Ce type de casse est souvent un numéro de haute voltige. "Il faut des armes de guerre, des explosifs, des voitures – souvent volées – pour s’échapper. Ce n’est pas à la portée de n’importe quel petit délinquant", estime Stéphane Quéré.
Les vols de bijouteries. Seuls des braqueurs un tant soit peu aguerris dévalisent des bijouteries lorsque le butin se chiffre en millions d’euros. Pour une simple et bonne raison : quand on vole autant de pierres précieuses, il faut réussir à les écouler. "Les voleurs doivent forcément appartenir à un réseau organisé pour réussir à écouler la marchandise", explique Doron Levy. On peut donc supposer que les braquages de Cannes sont plutôt l’œuvre de professionnels.
Reste que parfois, des amateurs s'attaquent aux cibles des pros. Ce fut le cas par exemple des braqueurs de la joaillerie Harry Winston, en 2008 à Paris. Après avoir réussi "le braquage du siècle" (85 millions d'euros de bijoux), les malfaiteurs n’ont pas réussi à écouler leur butin discrètement. Ils avaient fini par enterrer les pierres précieuses dans un endroit qui fut rapidement découvert.
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