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Le Danemark, un pays visé depuis longtemps par la menace terroriste

Après l'attaque contre un centre culturel et une synagogue, retour sur les menaces qui pèsent sur le pays.

Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Un officier de police est positionné dans une rue de Copenhague (Danemark), dimanche 15 février 2015. (CLAUS BJORN LARSEN / AFP)

C'était après l'attaque de Charlie Hebdo. "Pour le moment, la situation ne justifie pas de modifications dans l'évaluation de la menace terroriste contre le Danemark, qui reste sérieuse", expliquaient alors les services de sécurité danois. Un mois plus tard, un débat et une synagogue ont été visés par des attaques terroristes, samedi 14 février.

Voilà pourquoi le Danemark est confronté depuis longtemps aux menaces terroristes.

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Un pays au centre du débat sur les caricatures 

En 2005, douze caricatures de Mahomet sont publiée dans les pages du quotidien danois Jyllands-Posten. Le dessinateur danois Kurt Westergard représente notamment le prophète avec un turban en forme de bombe. 

Quelques mois plus tard, plusieurs imams qui officient au Danemark, outrés par les caricatures, se rendent au Moyen-Orient pour montrer les douze dessins, mélangés avec d'autres –plus insultants– qui n'ont pourtant pas été publiés par le Jyllands-Posten. En février 2006, les représentations diplomatiques danoises sont incendiées à Beyrouth (Liban) et à Damas (Syrie). En Iran, des cocktails molotov sont jetés sur l'ambassade. De nombreux pays arabes décident de rompre leurs relations commerciales avec Copenhague ou de boycotter les produits du pays. Les ressortissants danois, menacés, sont invités à quitter le Moyen-Orient.

Au Danemark même, le dessinateur Kurt Westergaard reçoit des menaces de mort de plus en plus précises dès 2006. Un attentat contre lui est déjoué en 2008. En 2010, un Somalien s'introduit chez lui avec une hache pour le tuer, mais Kurt Westergaard parvient à lui échapper. 

Depuis 2005, les employés du Jyllands-Posten travaillent retranchés derrière des grilles et un sas, avec de nombreuses caméras de surveillance. A raison, semble-t-il, puisque plusieurs attentats contre le journal ont déjà été déjoués.

La menace est telle que le quotidien n'a pas publié la une de Charlie Hebdo sortie après le drame. Dix ans après ses caricatures polémiques, Kurt Westergard vit toujours sous protection de gardes du corps et se déplace en voiture blindée. Interrogé par France 2, avant les attaques de Copenhague, il estimait que les quotidiens danois ne publieraient plus de telles caricatures. "C'est une victoire" pour les terroristes, lâche-t-il avec regret.

Et maintenant ? L'attentat de Copenhague ciblait le caricaturiste suédois Lars Vilks, sorti indemne, selon la télévision danoise TV2. Samedi, les services de sécurité suédois ont indiqué qu'ils allaient réfléchir à la forme que devrait prendre à présent la protection du dessinateur, déjà victime de plusieurs tentatives d'assassinat.

Une centaine de départs pour le jihad depuis le Danemark

Le Danemark est une terre de départ au jihad, ce qui inquiète les autorités depuis plusieurs mois. En juin, un rapport indiquait qu'une centaine de personnes avaient quitté le pays pour combattre en Syrie. Ils sont sans doute davantage aujourd'hui, selon un spécialiste danois du Moyen-Orient, Naser Khader. Contacté par francetv info, le spécialiste des mouvements islamistes Mathieu Guidère nuance cette analyse : "Comparativement, ces départs n'ont pas la même ampleur qu'en Belgique ou la France."

En octobre, francetv info s'est rendu à Aarhus. Là-bas, une association de parents de candidats au jihad a été créée dans cette dernière ville, afin d'attirer l'attention des autorités sur la question. Et surtout, les autorités ont mis en place un programme pour tenter de réinsérer les jihadistes de retour dans le pays. "Ce programme n'est pas du travail à la chaîne, ni une ‘fabrique à saucisses’ : il n'y a pas de procédé fixe qu'on doit impérativement suivre étape par étape", expliquait Toke Agerschou, responsable du département des services sociaux, de l’école et de la police.

Mais les services secrets ne sont pas toujours efficace dans leur surveillance des filières jihadistes. En novembre, les autorités ont réalisé qu'elles avaient versé des allocations chômage à 28 personnes parties combattre en Syrie pour le groupe Etat islamique.

Un pays en première ligne dans la lutte contre l'EI

Le Danemark a rejoint très tôt la coalition internationale contre l'Etat islamique. Au total, 140 soldats ont rejoint l'Irak et sept F-16 ont été déployés, précise le blog spécialisé Lignes de défense. A ce titre, les intérêts danois sont menacés dans de nombreux pays. En novembre, à Ryad, trois Saoudiens ont tiré sur l'employé danois d'une compagnie agro-alimentaire, le blessant à l'épaule. Cette attaque a eu lieu "en soutien au groupe terroriste Daech (acronyme arabe de l'EI)", indiquait alors la police locale.

Selon Mathieu Guidère, toutefois, "le Danemark n'est pas visé à proprement parler. Cette action visait davantage l'ambassadeur de France et le dessinateur suédois présents. D'ailleurs, on n'a pas entendu de menace nominale contre le pays ou contre l'un de ses dirigeants." Les attaques de l'Etat islamique sont selon lui ciblées et peuvent frapper n'importe où, quel que soit le pays.

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