"On se sert de nous comme une variable face à l'opinion publique" : les syndicats de police remontés après les annonces de Christophe Castaner sur les violences policières
Les annonces lundi du ministre de l'Intérieur, dont l'abandon de la méthode d'interpellation dite de "l'étranglement", pour améliorer la déontologie des forces de l'ordre laissent les syndicats policiers "dubitatifs".
Des annonces qui ne passent pas. Les syndicats policiers sont "dubitatifs", voire très remontés, après les déclarations de Christophe Castaner sur les violences policières, lundi 8 juin. Lors d'une conférence de presse destinée à répondre aux mises en cause récurrentes des forces de l'ordre pour racisme ou violences, le ministre de l'Intérieur a notamment annoncé l'abandon de "la méthode de la prise par le cou, dite de l'étranglement", à la suite de l'affaire Chouviat, un livreur mort à Paris, en janvier 2020, lors de son interpellation.
"J'attends que Christophe Castaner nous dise quelle sera la méthode qui va remplacer la technique d'étranglement", a réagi Yves Lefebvre, secrétaire général du syndicat de police Unité-SGP Police-FO, sur franceinfo lundi. "Il faut quand même savoir qu'on utilise la technique d'étranglement uniquement lorsqu'on a en face de nous un individu qui refuse d'être interpellé. Donc maintenant, comment allons-nous faire ? Je demande simplement à savoir comment on va faire", a-t-il ajouté.
"On en sera réduit au combat de rue ou à l'utilisation du taser"
"Dès lors qu'elle est faite dans un court instant, c'est la seule technique qui permette aux agents de maîtriser un individu dont le poids est supérieur", a observé de son côté le délégué national du syndicat des gardiens de la paix, Alliance, Frédéric Lagache. "Sinon, on en sera réduit au combat de rue ou à l'utilisation du taser", a-t-il estimé.
Yves Lefebvre aurait souhaité "que Christophe Castaner réaffirme que l'immense majorité des policiers ne sont pas racistes et sont républicains. (...) J'ai l'impression qu'on se sert de nous comme une variable face à l'opinion publique." "Il y a les annonces politiques et le réalité du terrain. On dirait que l'on vit dans un monde de Bisounours, où tout le monde est gentil, sauf les policiers qui sont méchants", a raillé de son côté le secrétaire général de l'Unsa-Police, Philippe Capon.
"Toutes les annonces ne sont pas contestables, en particulier celles participant à la lutte contre le racisme, mais on a le sentiment d'être des victimes expiatoires. On sent une fébrilité du politique", a remarqué pour sa part Patrice Ribeiro, secrétaire général du syndicat Synergies-Officiers.
Un appel à "une mobilisation massive"
Frédéric Lagache s'est en outre inquiété des propos du ministre sur les suspensions d'agents en cas de "suspicions de racisme" avérées : "Soit c'est avéré, soit c'est une suspicion. Mais en tout cas, le policier a le droit à la présomption d'innocence comme tout un chacun. Il faut attendre la fin de l'enquête avant de suspendre. On n'est pas des sous-citoyens."
Un avis partagé par le syndicat Alternative Police CFDT : "Les policiers ont un devoir d'exemplarité, mais ils ont aussi des droits." Dans un communiqué diffusé lundi, il "tient à faire part du dégoût le plus profond des policiers", "sur tous les fronts depuis 2015". "La révolte policière est sur le point d'éclater comme elle n'a jamais éclatée en France depuis 2001. Les événements de 2016 sont de la rigolade par rapport aux différents retours que nous avons du terrain", prévient le syndicat, qui appelle tous les syndicats policiers "à une concertation en vue d'une mobilisation massive". "Depuis trop longtemps les policiers sont de la chair à canon que le politique est bien content d'envoyer au charbon", ajoute le communiqué.
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