"Ils incarnent quelque chose, on les prend pour modèle" : 2020, année des sportifs engagés
Cela fera partie des leçons de l'année sportive 2020 : l'engagement politique croissant des athlètes français, que ce soit pour dénoncer les violences policières ou l'action de certains États. Leur influence médiatique ne cesse de prendre de l'ampleur.
Kylian Mbappé qui proteste contre les violences policières, tout comme les basketteurs Rudy Gobert et Evan Fournier, Antoine Griezmann qui rompt son partenariat avec Huaweï pour dénoncer le sort réservé aux Ouïghours en Chine... Le modèle du "Gagne et tais-toi", longtemps appliqué aux sportifs, semble désormais dépassé. Car l'influence de ces femmes et de ces hommes ne cesse de croître, constate Jérôme Neveu, fondateur de l'agence Advent, spécialisé en marketting d'influence : "Dans les chambres d'enfant, il pouvait y avoir beaucoup plus de chanteurs, d'acteurs voire de mannequins. Dorénavant et depuis un certain temps d'ailleurs, il y a autant de sportifs. Ils incarnent quelque chose, on les prend pour modèles."
— Kylian Mbappé (@KMbappe) November 26, 2020
Des sportifs que l'on écoute davantage, à qui l'on tend plus volontiers le micro pour parler d'autres sujets que d'un résultat. Et si évidemment l'implication des athlètes dans le mouvement Black Lives Matter aux États Unis a pu avoir un impact, il ne faudrait pas imaginer que les Français ont attendu les Américains pour s'engager, nuance Jérôme Neveu. "Ça ne date pas d'hier. Il y a quand même beaucoup de sportifs qui sont parrains d'associations parfois très discrètes. Cela peut être pour des enfants handicapés, pour l'autisme. Maintenant ça prend une ampleur beaucoup plus grande parce que le monde est devenu extrêmement médiatisé."
Le risque d'un engagement sans valeur
Et personne ne s'en plaint, au contraire, car dans certains cas, les sportifs sont même les seuls à pouvoir peser, reconnaît Bruno Stanio, directeur exécutif adjoint de l'ONG Human Rights Watch : "Il y a pas mal de gouvernements qui sont de grands violeurs de droits humains, qui essaient de faire une espèce de 'green washing' de leur image en étant des hôtes pour de grands évènements sportifs : Jeux olympiques, Coupe du monde de football... Donc c'est très bien que les grands sportifs se sensibilisent afin d'utiliser leur image pour mettre la lumière sur ces États."
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Avec un bémol quand même : la crainte qu'un engagement devienne incontournable et donc automatique, sans réelle valeur. "Si la tendance de la société c'est 'la notoriété a un prix, c'est de s'engager pour des causes', ça peut effectivement obliger certains sportifs à faire un pas dans cette direction", estime Jérôme Neveu.
"Ce qu'il ne faudrait pas c'est que l'on demande des engagements qui ne soient pas sincères."
Jérôme Neveu, agence Adventà franceinfo
En France, le sport reste encore largement dissocié des urnes.Très rares étaient les sportifs à avoir exprimé publiquement leur position lors de la dernière présidentielle. Celle de 2022 marquera peut être un nouveau tournant.
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