Cet article date de plus d'onze ans.

Petite fille retrouvée dans un coffre : "Elle aura certainement des troubles autistiques"

Un bébé a été découvert dans le coffre d'une voiture, vendredi en Dordogne. Il y vivait depuis plusieurs mois. Quelles conséquences ces événements vont-ils avoir sur son développement ? Francetv info a interrogé Alain Zivi, pédopsychiatre à Paris.

Article rédigé par Louis San - propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les parents présumés de la fillette retrouvée dans le coffre d'une voiture ont été conduits au palais de justice de Brive (Corrèze), le 27 octobre 2013. ( MAXPPP)

Quel avenir pour le bébé (âgé de 15 à 23 mois) retrouvé dans un coffre de voiture en Dordogne ? Pour la justice, c'est un cas qui "défie l'imagination". Pour la ministre en charge de la Famille, Dominique Bertinotti, c'est inquiétant. "Dans cette affaire-là, on se dit qu'on est dans une société où un enfant peut ne pas avoir d'état-civil, peut ne pas être reconnu, peut échapper à la surveillance de ses voisins, de la société dans sa globalité, c'est ça qui est terrible dans cette affaire", a-t-elle déclaré, lundi sur RTL.

Le couple a été mis en examen pour privation de soins et d'aliments par ascendant au point de compromettre l'état de santé, violences volontaires habituelles sur mineur de 15 ans et dissimulation ayant entraîné atteinte à l'état-civil d'un enfant. Et alors que l'attitude de la mère est au centre des interrogations, francetv info a interrogé Alain Zivi, pédopsychiatre dans le 5e arrondissement de Paris, pour évoquer les éventuelles séquelles de cette petite fille.

Francetv info : Ce bébé va-t-il avoir des souvenirs du début de sa vie dans ce coffre de voiture ?

Alain Zivi : La petite fille ne va pas avoir de souvenirs à proprement parler. A son âge, la mémoire épisodique, qui forme les souvenirs classiques, n'est pas encore formée. En revanche, elle va avoir des souvenirs émotionnels. Plus tard, elle saura, d'une façon ou d'une autre, qu'elle a vécu de grandes carences au début de sa vie. C'est une sorte de mémoire affective. On peut être marqué par des événements dramatiques sans s'en souvenir.

Quelles conséquences ces événements peuvent avoir sur sa vie future ?

On sait déjà qu'elle a un retard au niveau de développement. Ce n'est pas étonnant. Sans stimulation, un enfant ne se développe pas. Cette petite fille était cachée, personne ne s'en occupait. On peut d'ailleurs rappeler l'expérience menée par Frédéric II de Hohenstaufen [au XIIIe siècle]. Cet homme qui parlait de nombreuses langues [neuf au total : le latin, le grec, le sicilien, l'arabe, le normand, l'allemand, l'hébreu, le yiddish et le slave]  voulait savoir quelle était la langue primordiale de l'être humain. Il installa six bébés dans une pouponnière et ordonna à leurs nourrices de s'occuper d'eux normalement sans jamais leur parler. Au final, aucun bébé ne se mit à parler, et ils sont tous morts.

Ce qui se constitue pendant la première année, c'est l'attachement avec la mère ou le père, la famille, l'entourage. Il permet de se construire, d'aller ensuite à la découverte d'autres personnes, de se socialiser. Etant donné l'isolement qu'a connu cette petite fille, cela m'étonnerait qu'elle ait un développement tout à fait normal. Elle aura très certainement un handicap ou des troubles autistiques.

Comment doit-elle être prise en charge ?

Le mieux, pour elle, serait qu'elle soit placée dans une famille d'accueil spécialisée, entourée par des médecins. Un tel cadre serait plus adapté qu'une structure collective. Car c'est un cas que l'on peut qualifier de très lourd. Mais je ne suis ni optimiste, ni défaitiste. Elle est à un âge où les choses restent ouvertes, mais elle part avec un passif important.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.