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Le procureur de Nanterre ouvre une enquête sur la juge de l'affaire Bettencourt

Les relevés de conversations téléphoniques de journalistes utilisés une deuxième fois dans l’affaire Bettencourt. D’abord par l’IGS, et maintenant par la justice, révèle lemonde.fr. Le procureur de Nanterre Philippe Courroye aurait cherché à faire dessaisir la juge Prévost-Desprez, en tentant de prouver qu’elle parlait à la presse…
Article rédigé par franceinfo
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  (Radio France © AFP /  Thomas Coex et Jean-Loup Gautreau)

Révélée par lemonde.fr, l’information est confirmée par le procureur de Nanterre. Philippe Courroye annonce avoir ordonné des investigations pour "violation du secret de l’enquête" susceptibles de mettre en cause la juge Isabelle Prévost-Desprez, la magistrate en charge du dossier d’abus de faiblesse sur Liliane Bettencourt.

En s’appuyant sur une plainte déposée par Me Georges Kiejman, l’avocat de Liliane Bettencourt, le procureur cherche à prouver que les deux signataires d’un article du Monde ont été informés par la juge elle-même. Si les faits étaient prouvés, ils pourraient appuyer une demande de dessaisissement.
_ "Au moment où Le Monde portait plainte, le 20 septembre, pour violation du secret des sources, le parquet de Nanterre se plongeait dans les fadettes (listing des communications, ndlr) des journalistes, dans des conditions discutables, écrit le quotidien sur son site internet.

A l’origine de cette affaire : la parution en ligne, le 1er septembre dernier, d’un article intitulé "Les policiers sont à la recherche des ‘petits papiers’ de Mme Bettencourt". L'article faisait état d'une perquisition en cours au domicile de la milliardaire. Les policiers de l’Inspection générale des services examinent alors, selon lemonde.fr, à la seule initiative du procureur, les fadettes des deux signataires de l’article.

Cet examen minutieux aurait "mis en évidence des échanges très nombreux entre la juge et l'un des deux journalistes, entre le août et le 1er septembre", selon une source proche de l'enquête.
_ Dans la foulée, le procureur Courroye saisit le procureur général de Versailles d’une procédure pour "violation du secret professionnel", procédure qui vise explicitement sa collègue.

Demande de dessaisissement

Il reviendra au procureur de Versailles ou de Pontoise de décider s’il faut engager des poursuites contre la magistrate. Parallèlement, et fort de cette plainte, le procureur général de Versailles pourra alors saisir la Cour de cassation d’une demande de dessaisissement de la juge Prévost-Desprez de l’affaire Bettencourt.

Interrogée par France Info, la direction du Monde explique qu'elle pourrait être amenée à déposer une deuxième plainte pour "violation du secret des sources". Aucune décision n'est prise à ce jour.
_ Une première affaire d'écoutes dans des conditions discutables avait en effet conduit Le Monde à déposer plainte. Dans cette première affaire, l'informateur présumé des journalistes, David Sénat, un proche conseiller de Michèle Alliot-Marie, avait été démis de ses fonctions et muté.

Le procureur Courroye, en conflit notoire avec la juge Prévost-Desprez, a déjà ouvert plusieurs enquêtes préliminaires dans la tentaculaire affaire Woerth-Bettencourt.

"C'est clairement la volonté d'entraver une enquête. Que le président de la République et le garde des Sceaux assument !, analyse le président de l'Union syndicale des magistrats (USM). "Quand on ne peut se débarrasser d'un juge par des voies légales, on le fait par des voies détournées", ajoute Christophe Régnard.

Gilles Halais, avec agences

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