Le contrôleur des prisons rend un rapport accusateur
En matière pénitentiaire, la France présente un lourd passif. Des lettres de cachets aux bagnes plus ou moins tropicaux, des panoptiques aux colonies agricoles pour mineurs, l'histoire des prisons françaises est jalonnée d'établissements à faire froid dans le dos. A en croire le premier rapport annuel remis par le contrôleur des lieux de rétention, nommé en juin dernier, la Bastille n'est pas tombée dans toutes les têtes et dans tous les lieux d'enfermement.
Jean-Marie Delarue et son équipe ont au total visité 52 établissements (16 établissements pénitentiaires, 14 locaux de garde à vue, 11 centres de rétention pour étrangers, cinq hôpitaux psychiatriques, quatre locaux de douanes et deux dépôts de palais de justice). Et ils jugent la situation “mauvaise” et même “grave”.
Le document de 250 pages pointe des manquements dans le respect de l'intimité des personnes, les activités, l'accès aux soins etc. Les gardés à vue par exemple (578.000 personnes en garde à vue en 2008), se voient retirer leurs lunettes et leurs soutien-gorges pour les femmes : “ce n'est pas digne de la France de 2009”, s'emporte Jean-Marie Delarue. Il dénonce aussi la confiscation des médicaments et l'impossibilité d'acheter ceux que prescrivent les médecins qui examinent les gardés à vue, faute de budget. Ces dépenses étaient financées par les frais de justice mais “c'est fini”, déplore le contrôleur, qui détaille les aléas et les brimades de la vie en détention, et note des conditions très variables d'un lieu à l'autre.
Sentiment d'arbitraire
Jean-Marie Delarue revient aussi sur le principal point noir des prisons françaises : le surpeuplement (62.700 détenus pour 52.535 places au 1er mars). Cette situation pèse sur la violence y compris contre soi avec dix fois plus de tentatives de suicides (1.200 par an), “des automutilations qui ne sont pas décomptées” ou sur l'accès au travail “très chichement mesuré”.
_ Dans les hôpitaux psychiatriques, “de très grandes difficultés sont dues à la réduction du nombre de lits et de personnels”.
“La France captive ne peut pas se défaire d'un certain sentiment d'arbitraire ”, conclut-il. Et il demande des réponses au gouvernement : “on est têtu. S'il ne le fait pas, on le redira”, prévient le contrôleur.
Grégoire Lecalot, avec agences
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