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La garde à vue jugée à l’Assemblée nationale

La réforme de la garde à vue, renforçant la présence de l'avocat, est examinée à partir d’aujourd’hui à l'Assemblée, avec une belle bagarre en perspective alors que leur nombre a explosé à près de 900.000 en 2009, sur fond d'attaques contre le statut du parquet. _ Pour se conformer à une décision du Conseil constitutionnel, le gouvernement doit en effet, d'ici le 1er juillet, revoir le régime de cet acte d'enquête très critiqué ces derniers mois.
Article rédigé par franceinfo
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  (Radio France ©REUTERS/Eric Gaillard)

“Je veux un avocat qui soit à sa vraie place, qui ait accès au dossier et qui ait le temps d'arriver”, assure Philippe Gosselin (UMP), rapporteur du projet de loi préparé initialement par l'ancienne garde des Sceaux Michèle Alliot-Marie. Depuis septembre, le texte a été chamboulé, notamment pour prendre en compte des décisions de la Cour de cassation et de la Cour européenne de droits de l'homme (CEDH)

Droits de la défense brandis par les avocats contre besoins de l'enquête réclamés par les policiers, les débats risquent d'être “animés” au cours des deux prochaines semaines à l'Assemblée nationale, reconnaît M. Gosselin.
“Ca va bien bouger”, glisse le député Jean-Jacques Urvoas, secrétaire national du PS à la sécurité.
D'autant plus que mi-décembre, la commission des Lois avait créé la surprise en supprimant“ l'audition libre” voulue par le gouvernement, une audition sans avocat. Elle avait également confié le contrôle de la garde à vue au juge des libertés et de la détention (JLD), ou au président du TGI, c'est-à-dire à un juge du siège, au lieu du procureur de la République.
Le débat va se focaliser sur l'audition libre et le contrôle de la mesure
par le parquet. Opposé à l'audition libre, Philippe Gosselin déposera un amendement en faveur d'une “audition assistée”, cinq ou six heures, qui s'inscrira dans le cadre juridique de la garde à vue.
_ L'idée d'une garde à vue contrôlée par un JLD a mis les nerfs des syndicats de policiers à vif: ils prédisent qui un “fiasco sécuritaire”, qui une “débâcle judiciaire”.Pour M. Gosselin, le contrôle par le procureur permet d'être “dans les clous avec la CEDH”.

Même si les avocats voient d'un bon œil les amendements adoptés en commission, ils pronostiquent une discussion difficile. “Je m'attends aux avancées minimales”, prédit Alain Mikowski, du Conseil national des barreaux (CNB), qui représente les 50.000 avocats français.
_ De son côté, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) juge le texte “indispensable mais insuffisant” et recommande que les crédits de l'aide juridictionnelle soient “renforcés”.

Dans la version examinée aujourd’hui, il a été décidé de laisser un délai de deux heures à l'avocat pour se rendre sur les lieux. Tout gardé à vue se verra aussi notifier le droit de garder le silence, à l'exception de la déclinaison de son identité et de son domicile.
Les victimes auront également le droit d'être assistées par un avocat, à l'occasion d'une confrontation avec leur agresseur gardé à vue par exemple, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Les régimes dérogatoires concernant les affaires de terrorisme, de stupéfiants et de criminalité organisée, sont aussi retouchés pour renforcer les droits de la défense.
Et seules “des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête” ou "pour permettre le bon déroulement d'investigations urgentes" laisseront les avocats à la porte des commissariats et des gendarmeries pendant les douze premières heures.

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