Jérôme Kerviel passe à l'offensive
La scène pourrait figurer dans un thriller hollywoodien, et c'était sans doute voulu comme ça. Jérome Kerviel sort d'un restaurant entouré de ses avocats, et rejoint à pied le bureau de la juge du pôle financier où il est attendu. Ne manque plus que la musique sous les images. Pour immortaliser cette marche volontaire, une escouade de journalistes a été convoquée.
Fini donc, le Kerviel au profil bas, qui accorde les interviews au compte-goutte. L'ex-trader a renouvelé son équipe d'avocats et de conseillers en communication, et ils lui recommandé une stratégie plus offensive. Alors que l'enquête se dirigeait vers son terme, il veut désormais demander de nouvelles investigations et l'extension des poursuites à certains de ses ex-responsables, a expliqué l'un de ses nouveaux spin-doctors, Patricia Chapelotte.
_ Accusé par la Société Générale d'être à l'origine d'opérations qui ont provoqué 4,9 milliards d'euros de perte, “ il ne souhaite pas être le bouc émissaire d'une affaire qui le dépasse totalement. Il souhaite que l'on sache comment fonctionnent les salles de marchés, qu'on puisse connaître la vérité et montrer qu'il n'était pas forcément le seul responsable de cette affaire”, détaille-t-elle.
74 avertissements
Libéré le 18 mars dernier de prison après 38 jours de détention, Jérôme Kerviel est le seul mis en examen de cette affaire pour “faux, abus de confiance et intrusion informatique”.
Il a reconnu lors de l'instruction avoir pris des engagements de 50 milliards d'euros, donc bien au-dessus des 125 millions d'euros théoriquement autorisés, tout en les dissimulant par des faux, mais a assuré que cette pratique était courante et que sa hiérarchie fermait les yeux.
Les investigations menées par la banque ainsi que les témoignages du “gendarme” du marché des produits dérivés, Eurex, laissent en effet entrevoir des défaillances dans les procédures de contrôle. La banque n'aurait notamment pas tenu compte des nombreux avertissements - 74 selon un rapport interne - lancés sur les engagements de Jérôme Kerviel. Et comme estocade, l'ex-trader rappelle que c'est la banque elle-même qui a creusé ce trou de 4,9 milliards d'euros en liquidant ses engagements en plein “krach” boursier. L'enquête démontre que si ses agissements ont duré plusieurs années, il a aussi rapporté 1,4 milliards d'euros à la Société Générale. C'est sur ce terrain qu'il compte mener la charge.
Grégoire Lecalot, avec agences
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