Incendies dans l'Hérault : comment les pompiers luttent pour détecter les pyromanes dans leurs rangs
Le phénomène ne concerne qu'une poignée d'individus sur les 250 000 pompiers en France. Mais ils arrivent à tromper leur monde, malgré les examens médicaux subis lors de leur recrutement.
Il était au-dessus de tout soupçon. L'arrestation et la mise en examen, jeudi 28 juillet, d'un sapeur-pompier suspecté d'être à l'origine de plusieurs départs de feu dans l'Hérault a créé un vif émoi dans le village de Saint-Jean-de-la Blaquière, où cet homme de 37 ans, conseiller municipal et président de l'amicale des pompiers, vivait depuis toujours. Une nouvelle affaire de "pompier pyromane" qui pose la question des modalités du recrutement dans les casernes. Car le profil de ces soldats du feu prêts à déclencher des incendies n'est pas facile à identifier.
"Les pompiers pyromanes ont une bonne capacité d'adaptation, et ils mentent à tout le monde sur le plaisir qu'ils ressentent en voyant du feu", explique le psychologue et criminologue Jean-Pierre Bouchard. C'est pourquoi ils passent souvent incognito, malgré les examens médicaux qu'ils subissent.
"La plupart des pyromanes ont une façade sociale tout à fait normale. Ils ont une famille, une insertion sociale et professionnelle qui ne laisse pas suspecter ce genre de comportements."
Jean-Pierre Bouchard, psychologue et criminologueà franceinfo
Le suspect arrêté dans l'Hérault a ainsi reconnu être à l'origine de feux datant pour certains d'il y a trois ans.
Des psychologues dans certains départements
Tous les pompiers, qu'ils soient professionnels ou volontaires, subissent pourtant un examen médical – physique et psychologique – lorsqu'ils sont recrutés. Une visite médicale annuelle est également obligatoire. "Mais c'est très compliqué de détecter ces profils... Il a trompé tout le monde", témoigne le porte-parole des sapeurs-pompiers de l'Hérault, Jérôme Bonnafoux, au sujet de son collègue mis en examen.
Pour repérer ces personnalités dangereuses, les casernes sont parfois démunies. Dans le Gard, un psychologue a intégré les rangs des sapeurs-pompiers du département, mais ce n'est pas le cas partout. "Il participe au recrutement, l'ensemble de la personnalité du candidat est évaluée pour voir s'il n'y a pas une incompatibilité avec la mission", détaille Eric Agrinier, le chef de la communication des sapeurs-pompiers du Gard.
Une initiative vue d'un bon œil par Jean-Pierre Bouchard, qui insiste sur la nécessité d'avoir "des psys formés aux problèmes de dangerosité", aptes à détecter les éventuelles stratégies de certains candidats pour cacher des aspects de leur personnalité.
Vers un meilleur accès au casier judiciaire ?
Pour éviter que ces individus n'intègrent les rangs des soldats du feu, d'autres leviers sont parfois évoqués. La Fédération nationale des sapeurs-pompiers demande ainsi l'accès à la totalité des antécédents judiciaires au moment du recrutement.
Pour l'instant, les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) ne peuvent demander qu'un extrait de casier judiciaire B2, qui ne recense pas toutes les infractions et dont certaines sont effacées après un certain délai. L'accès au B1, le bulletin le plus complet, est cependant réservé aux autorités judiciaires.
Sur les 250 000 sapeurs-pompiers français, le phénomène des "pompiers-pyromanes" ne concerne que quelques individus. Mais les conséquences de leurs actes peuvent être dramatiques. "Evidemment, le risque zéro n'existe pas, mais on fait le maximum pour l’éviter", assure le lieutenant-colonel Eric Agrinier.
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