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Frégates de Taïwan : le parquet de Paris confirme les réquisitions de non-lieu

En signant le 24 juillet dernier un réquisitoire de non lieu général dans l'affaire des frégates de Taiwan, le procureur de la république de Paris, Jean-Claude Marin boucle l'un des plus rocambolesques feuilletons politico-judiciaires de la décennie.
Article rédigé par franceinfo
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  (Radio France ©REUTERS/C C Yao)

A l'origine de toute cette affaire, il y a, en 1991, la vente par la société française Thomson-CSF (aujourd'hui Thalès) de six frégates, avec leur équipement militaire, à Taiwan.
_ Ce contrat se heurte à de puissants intérêts diplomatiques, la Chine est en effet opposée à ce marché, et le ministre des affaires étrangères français de l'époque, Roland Dumas, n'y est pas favorable.

_ Pour finalement obtenir ce marché colossal de prés de 3 milliards de dollars, Thomson-CSF va devoir recourir à de nombreux intermédiaires.

En 1993, le scandale éclate à Taiwan, où est révélée l'existence de faramineuses commissions, estimées à 520 millions de dollars. Sur place, une enquête est ouverte, elle se terminera par la condamnation de 28 personnes, en majorité des militaires et des marchands d'armes. Convaincus d'avoir touché des pots de vins pour faciliter ce contrat.
Côté français, en revanche, les juges qui se succèdent sur ce dossier vont se voir confrontés à une série d'embuches.
Une instruction est ouverte en 2001, au fil de laquelle les juges soupçonnent qu’une partie des commissions a pu atterrir dans les caisses de certains partis politiques, mais très vite, les magistrats découvrent aussi que de nombreux documents ayant trait à ce contrat sont couverts par le secret défense. A quatre reprises ils vont demander aux autorités politiques, la levée de ce secret. En vain. Tous les gouvernements qui se succèdent, de droite ou de gauche, s'y opposent fermement.
L'enquête piétine, et la rumeur enfle. L'ancien juge anti corruption Thierry Jean-Pierre consacre un livre remarqué à l'affaire, ou il dénonce un énorme scandale international.
L'ancien président du conseil constitutionnel, Roland Dumas, affirme dès 2001, qu'il connait certains bénéficiaires des commissions mais il se garde bien de livrer les noms.
En 2006, L'ancien ministre de la défense socialiste, Alain Richard explique à son tour que de l'argent s'est retrouvé dans la poche de formations politiques. Il ne sera pas plus entendu. Les enquêteurs ont beau multiplier leurs investigations, le secret défense se révèle être un mur infranchissable.
Fin 2006, Le juge Renaud Vanruymbeke jette l'éponge, il boucle son dossier sans avoir pu trouver la vérité sur le versement des commissions. Un an et demi plus tard, à son tour, le parquet de Paris referme ce dossier.

Une affaire qui a empoisonné la classe politique
Deux autres énormes scandales politico-financiers sont directement liés à l'affaire des frégates de Taïwan.

  • Tout d'abord l'affaire Elf. Roland Dumas, ancien président du conseil constitutionnel, a été soupçonné d'avoir indirectement touché de l'argent en marge de l'affaire des frégates.Il a été renvoyé devant un tribunal correctionnel, condamné et puis finalement relaxé en appel.
  • Autre dossier : l'affaire Clearstream, ou cette fois si ci c'est Nicolas Sarkozy qui avait été désigné par un corbeau comme le bénéficiaire des commissions de Taiwan. Des accusations qui s'avéreront totalement infondées, mais qui seront à l'origine d'un règlement de compte sanglant avec le premier ministre de l'époque Dominique de Villepin. Jamais élucidée, l’affaire des frégates aura été pendant 10 ans un véritable poison pour la classe politique française...

Matthieu Aron

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