Comment s'organise la traque de Redoine Faïd ?
Le braqueur récidiviste, évadé de la prison de Réau (Seine-et-Marne), dimanche 1er juillet, est aujourd'hui traqué par la police. Franceinfo vous explique les dispositifs mis en place par les forces de l'ordre.
Comme un air de déjà-vu. Les policiers sont, depuis dimanche 1er juillet, à la recherche du braqueur récidiviste Redoine Faïd, qui s'est échappé de la prison de Réau où il purgeait une peine de 25 ans de prison. L'homme s'était déjà évadé de la prison de Sequedin (Nord), en 2013. Cette fois-ci, c'est en dix minutes et avec l'aide de trois complices venus en hélicoptère que le détenu a pris la fuite . Le fugitif a été vu pour la dernière fois à bord d'un utilitaire blanc retrouvé incendié dans l'Oise. Franceinfo vous explique comment s'organise la traque du "roi de l'évasion".
Près de 3 000 gendarmes et policiers déployés
Policiers, gendarmes, police aux frontières, CRS en renfort... Près de 3 000 agents sont désormais aux trousses de Redoine Faïd, indique une source policière à franceinfo. Parmi eux, "une centaine de personnes mobilisées sous la direction de la police judiciaire", a précisé Philippe Veroni, chef de la sous-direction de la lutte contre la criminalité et la délinquance financière, a confirmé, mardi 3 juillet.
"L'urgence, c'est la mobilisation pour retrouver ce détenu", a affirmé le Premier ministre, Edouard Philippe, lundi, sur RTL. Le plan épervier a été déployé et un appel à témoin a été diffusé dans toute la France. Une enquête de flagrance est ouverte par le parquet de Paris pour "évasion en bande organisée" et "association de malfaiteurs".
La police judiciaire de Versailles mène l'enquête tandis que la Brigade nationale de recherche des fugitifs (BNRF) a été saisie, en soutien.
L'entourage de Faïd activement recherché
Pour retrouver Redoine Faïd, les enquêteurs tentent de remonter la piste des deux complices qui l'ont aidé à s'échapper de la prison de Réau. Les services de police ont d'ores et déjà effectué des prélèvements sur l'hélicoptère abandonné, la voiture noire retrouvée incendiée dans un parking, "et tout ce que les complices ont pu toucher", indique une source policière à franceinfo.
L'objectif, c'est de les [les complices] identifier le plus rapidement possible. C'est comme une ligne de pêche : vous avez un fil, il faut tirer dessus.
une source policièreà franceinfo
Outre ses complices, la police va aussi se concentrer sur l'entourage du braqueur. Son frère, Brahim, avec qui le braqueur discutait au parloir avant son évasion, a été placé en garde à vue dimanche. Celle-ci a été finalement levée, lundi 2 juillet. "On va s'intéresser à son entourage, les personnes qui l'ont visité, pour obtenir des renseignements. On va aussi lancer le travail avec les indicateurs. Et on a aussi des équipes qui font de la téléphonie, de la surveillance", a précisé la même source à franceinfo. Le pilote d'hélicoptère pris en otage et l'ensemble des témoins du petit aéro-club ont d'ailleurs été entendus par la police, indique BFMTV.
Selon les informations de France 3, les services de police s'intéresseraient particulièrement aux liens de Redoine Faïd avec le grand banditisme corse et notamment le Gang de la "Brise de mer".
Les pistes d'une "planque" en région parisienne et de l'étranger envisagées
"Il faut du temps pour exfiltrer quelqu'un, organiser une cavale intelligente et ne pas refaire les mêmes erreurs qui ont été faites la dernière fois", analyse Nathalie Perez. La journaliste rappelle que lors de son évasion, en 2013, Redoine Faïd s'était associé à "des personnes qu'il ne connaissait pas vraiment, qui ne connaissaient pas les modalités du grand banditisme et des cavales". Il semble avoir évolué sur ce point. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a reconnu, dimanche, que l'évasion était "hors norme" et "a nécessité un commando bien préparé".
Selon une source proche du dossier, la police étudierait la piste d'une planque en région parisienne. Redoine Faïd pourrait s'y cacher en attendant d'être exfiltré dans un autre lieu en France, voire à l'étranger. Toutes les options sont étudiées, a résumé le sous-directeur de la lutte contre la criminalité et la délinquance financière lors d'une conférence de presse.
Le fugitif peut évidemment rester sur le territoire national, être entre guillemets passif, ou être actif, reprendre le métier. Ou il peut prendre la fuite à l'étranger pour se faire oublier.
Philippe Veroni, sous-directeur de la lutte contre la criminalité organiséeen conférence de presse
Le ministère de l'Intérieur a ainsi indiqué que "des dispositifs coordonnés de contrôle et d'interceptions sont mis en place" aux frontières françaises pour intercepter Redoine Faïd et ses complices. Une fiche Interpol a également été diffusée dans 190 pays, confirme une source policière à franceinfo. "On a parlé de la Belgique parce que l'une des voitures a pris la direction du nord, mais ça ne veut rien dire. Ça peut aussi être un leurre", précise à franceinfo la journaliste Nathalie Perez, spécialiste police-justice à France 3.
Un jeu du chat et de la souris de longue haleine
"Une cavale, ça peut durer dans le temps", constate Philippe Veroni. La préparation du commando et la volonté du fugitif qui "joue gros" avec cette fuite, pourrait jouer en défaveur des policiers. Mais il rappelle aussi qu'"une cavale [...] ça se finance, ça suppose des moyens de fuite, des moyens de replis, des moyens de dissimulation, des complices, de l’argent, ça suppose beaucoup de chose dans le temps". Difficile pour lui d'estimer la durée de la traque. Mais les enquêteurs se préparent à une arrestation musclée.
A part l'effet de surprise, je pense que ce ne sera pas aisé de l'interpeller.
Philippe Veroni, sous-directeur de la lutte contre la criminalité organiséeen conférence de presse
"Avec lui, vous savez que vous n’aurez qu’une ou deux opportunités de l’interpeller, et qu’il ne faudra pas les manquer. Il est méthodique, réfléchi, et il s’appuie sur un cercle tellement restreint que ses fautes sont rares", renchérit le policier Bernard Petit, qui avait piloté la traque du braqueur en 2013, dans Libération. Selon Philippe Veroni, avec cette évasion, "son premier objectif c'est de ne pas être repris", concluant : "Nous nous attendons à une certaine forme de résistance."
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