Une épicerie séparait hommes et femmes : la polémique en trois actes
Une épicerie tenue par un couple converti à l'islam réservait l'essentiel de la semaine aux hommes, les deux jours de week-end pour les femmes. Les deux commerçants ont renoncé à cette ségrégation face au tollé.
L'affichette qui fâche. Une épicerie musulmane d'un quartier populaire de Bordeaux a suscité la polémique en ayant apposé sur la vitrine un panonceau indiquant des jours d'ouverture distincts pour "les frères" et "les sœurs".
Passible de sanction pénale, cette pratique interdite par la loi a été abandonnée lundi 22 juin par ses initiateurs. Retour sur cette controverse en trois actes.
Acte 1. L'épicerie décide de séparer hommes et femmes
Comme l'explique France 3 Aquitaine, cette épicerie musulmane, installée récemment dans le quartier populaire Saint-Michel, dans le centre historique de Bordeaux, décide de réserver le début de semaine uniquement aux hommes, la fin de semaine aux femmes.
Une affichette, comme le spécifie Sud Ouest, précise que les cinq premiers jours sont "pour les frères", le samedi et le dimanche, "pour les sœurs". C'est un jeune couple de Français, converti à l'islam, qui a ouvert cette boutique mi-mai et instauré cette pratique antimixité, explique le journal régional.
Acte 2. Vives réactions après l'article dans "Sud Ouest" dimanche
Après l'article publié dimanche dans Sud Ouest, et intitulé "Bordeaux : une épicerie musulmane remet en cause la mixité", les réactions sont vives. France 3 Aquitaine rapporte celle de l'imam de Bordeaux, Tareq Oubrou. "Ça me paraît un peu bizarre dans un monde où la mixité est une culture établie. C'est peut-être une option personnelle qui relève plus d'un choix psychologique que théologique."
France 3 cite aussi l'association Boulevard des Potes, qui regrette la polémique.
"Ce qui est regrettable, c'est qu'on mette l'accent sur une activité commerciale qui pose un problème de droit, mais que l'on ne relaye pas ce qui marche", déplore Ahmed Serraj, le directeur de l'association à Bordeaux.
Le maire de Bordeaux, Alain Juppé (Les Républicains), condamne lundi 22 juin "un comportement en totale contradiction avec les règles républicaines d'égalité et de mixité". Il appelle les "autorités compétentes à se saisir de ce dossier afin de faire cesser de telles pratiques discriminatoires et d'appliquer les mesures que prévoit la loi en de telles circonstances".
L’ouverture d’un établissement à des jours différents pour les hommes et les femmes est passible de sanctions pénales. #République 1/3
— Alain Juppé (@alainjuppe) 22 Juin 2015
Je condamne fermement un comportement en totale contradiction avec les règles républicaines d’#égalité et de #mixité. 2/3
— Alain Juppé (@alainjuppe) 22 Juin 2015
J’appelle les autorités à se saisir de ce dossier afin de faire cesser de telles pratiques discriminatoires. http://t.co/s4eTYT11oO #Loi 3/3
— Alain Juppé (@alainjuppe) 22 Juin 2015
A la suite de cette intervention, le préfet de la région Aquitaine, Pierre Dartout, déclare dans un communiqué "qu'il est inacceptable qu'un commerçant puisse être ouvert à des jours différents pour les hommes et pour les femmes". Il "souhaite que la justice s'en saisisse immédiatement et en tire les conséquences si les faits sont avérés".
Acte 3. Le commerçant renonce
Face à la polémique et aux risques de sanctions pénales – trois ans de prison et 45 000 euros d'amende –, le commerçant décide lundi 22 juin d'abandonner la pratique de jours séparés pour les clientèles féminine et masculine.
"Nous avions mis cela en place à la demande des 'sœurs', qui préféraient quand ma femme est derrière le comptoir (...) C'est un magasin où il y a des vêtements", assure à l'AFP Jean-Baptiste Michalon, propriétaire de ce commerce qui vend des vêtements et des produits d'épicerie, avec un espace librairie.
"Cela s'adressait à un public averti, qui sait que notre pratique de la religion n'autorise pas la mixité. Ce n'est pas une obligation, chacun fait ce qu'il veut", poursuit le jeune homme. Il assure enfin qu'il ne "savait pas que c'était interdit" par la loi.
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