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Affaire Merah : à quoi sert une commission d'enquête parlementaire ?

Députés et sénateurs disposent d'importants pouvoirs d'investigation pour contrôler l'exécutif, mais leurs conclusions ne débouchent pas forcément sur des décisions concrètes.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'hémicyle du Sénat, le 23 janvier 2012 à Paris (Ile-de-France). (ERIC FEFERBERG / AFP)

AFFAIRE MERAH – Une commission d'enquête parlementaire sur le travail des services de renseignements, critiqués pour leur rôle lors de l'affaire Merah, va être mise en place. Les députés ont voté mercredi 5 décembre sa création, sur proposition du groupe écologiste. L'initiative a été critiquée par l'opposition, qui l'a jugée "inutile" et susceptible de "se terminer en eau de boudin".

L'affaire Merah rejoint ainsi le scandale d'Outreau, la libération des infirmières bulgares, ou encore la gestion de la grippe A parmi les sujets qui ont fait l'objet d'une commission d'enquête parlementaires. Ces commissions permettent aux députés et aux sénateurs d'exercer leur pouvoir de contrôle sur l'exécutif. Pour cela, ils disposent de moyens d'investigation importants. Mais finalement, ces enquêtes débouchent-elles sur des décisions concrètes ?

Des pouvoirs de plus en plus élargis

Les commissions d'enquête existent depuis 1958 mais n'ont fait leur apparition dans la Constitution que lors de la révision de 2008. Une sorte de consécration après avoir pris, au fil des années, une importance de plus en plus grande.

Les parlementaires disposent notamment d'un "droit de citation directe", qui leur permet de convoquer toute personne qu'ils jugent utile d'entendre. Comme dans un procès, le témoin est tenu de répondre favorablement à la convocation (au besoin, il peut être amené par la force publique) et de prêter serment. Et s'il refuse ? La loi prévoit une peine maximale de deux ans de prison, 7 500 euros d'amende et deux ans d'interdiction des droits civiques. Il peut également être poursuivi en cas de faux témoignage ou de subornation de témoin.

En 1991, les moyens des élus ont été élargis et leurs auditions rendues publiques, voire retransmises en direct. Et donc accessibles au grand public, surtout depuis 2005, les chaînes parlementaires étant diffusées sur la TNT.

La plus célèbre des commissions d'enquête, consacrée aux dysfonctionnements de la justice dans l'affaire d'Outreau, a même vu certaines de ses auditions, dont celle du juge Fabrice Burgaud, diffusées simultanément sur TF1 et France 2, en 2006. "Cette commission a été un grand moment de démocratie, juge le député UMP Philippe Houillon, qui en était le rapporteur. Toute la France a pu regarder ses travaux."

Quelles suites après un rapport parlementaire ?

Même si elles disposent d'un fort pouvoir coercitif, les commissions d'enquête n'ont pas pour vocation de se substituer à la justice. "Le travail d'une commission d'enquête s'arrête là où commence celui du juge", résume le député socialiste Bernard Cazeneuve. Lorsque les parlementaires constatent des infractions, ils peuvent toutefois saisir la justice, comme en 2006 à l'issue de la commission sur les sectes. Un cas de figure qui reste plutôt rare.

Alors que retenir du travail des commissions ? Une fois leurs travaux terminés, elles publient un rapport à la fin duquel sont émises des recommandations. Celle sur l'affaire d'Outreau en a établi trente-sept pour réformer la procédure pénale, mais peu ont été suivies d'effet. D'autres ont abouti, mais il est parfois difficile d'en attribuer la paternité au rapport de la commission d'enquête. Par exemple, la réforme de la garde à vue, recommandée dans le rapport en 2006, n'a été adoptée qu'en 2010, après une décision contraignante du Conseil constitutionnel.

Les rapports des commissions d'enquête sont-ils donc condamnés à prendre la poussière sur une étagère ? "Non, car cela permet quand même d'aller au fond des choses, de faire un point sérieux de la situation et de faire avancer le débat public sur les questions abordées", défend Philippe Houillon.

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