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Accidents du travail : "Depuis le 1er janvier, j'ai recensé 570 accidents graves, dont plus de 215 mortels"

Matthieu Lépine tient un compte sur les réseaux sociaux pour alerter lorsqu'il y a des accidents du travail. Selon lui, "plus de 600 000 personnes" en France sont touchées par an. 

Article rédigé par franceinfo
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Des ouvriers sur des échafaudages.  (BRUNO LEVESQUE / MAXPPP)

Un accident du travail a fait mardi 30 juillet un mort et trois blessés graves dans le 13e arrondissement de Paris. "Depuis le 1er janvier, j'ai recensé 570 accidents graves, dont plus de 215 mortels", a déclaré mardi sur franceinfo Matthieu Lépine, professeur d’histoire-géographie et auteur des comptes Facebook et Twitter “Accident du travail : silence des ouvriers meurent”, qui recensent les accidents du travail dans toute la France.

franceinfo : Depuis deux ans, vous recensez ces accidents du travail dans toute la France, des accidents du travail qui se produisent trop souvent et dans un relatif anonymat. Vous dénoncez le silence médiatique dans lequel se produisent ces drames. Y a-t-il un tabou en France à ce sujet ?

Matthieu Lépine : Je ne sais pas. Les accidents du travail on en parle lorsque, comme aujourd'hui, ça va toucher Paris. Ou lorsqu'il y a un lien avec une autre actualité, comme il y a quelques semaines avec la canicule quand un couvreur est décédé. Mais il y a un relatif silence tout le reste de l'année. Depuis le 1er janvier j'ai recensé 570 accidents graves, dont plus de 215 mortels. Et encore je me concentre sur ce que je vois dans les médias en ligne, dans la presse régionale et locale. Malheureusement ces accidents sont toujours classés dans les faits divers. Moi je considère qu'un accident du travail c'est un fait social car lorsqu'on les met tous bout-à-bout, on se rend compte qu'on a en face de nous un sujet d'une ampleur assez importante. C'est plus de 600 000 personnes par an qui sont touchées par un accident du travail en France, et ça me donne l'impression que ce sujet a une place relativement faible dans le débat public, que ce soit du côté des journalistes ou des politiques. On ne s'y intéresse que très rarement, et uniquement dans le cas d'affaires très dramatiques, comme cet accident à Paris.

Pourquoi avoir créé ces comptes Twitter et Facebook ?

Mon objectif à travers ce recensement c'est avant tout de parler d'un sujet dont on ne parle pas assez, de lutter contre l'invisibilisation des victimes. Parfois on apprend qu'un homme a chuté. Mais on ne connaît ni son métier ni son âge. Pourtant une personne qui a un accident du travail c'est parfois une vie brisée, une famille qui va subir des conséquences de ce qu'il s'est passé. J'essaie dès que je peux de donner le nom de la personne, de raconter son histoire, dans quelles conditions elle travaillait, de voir s'il y a un lien direct entre ces conditions de travail et l'accident. J'essaie de prévenir contre les conséquences de la précarité au travail, de la déresponsabilisation des donneurs d'ordre, puisqu'on voit que les accidents du travail vont souvent toucher des travailleurs intérimaires ou sous-traitants. J'essaie à mon humble échelle à travers ces comptes Twitter et Facebook d'être une vigie sur la question des accidents du travail. J'interpelle à chaque fois la ministre Muriel Pénicaud. Parce qu'elle est la ministre du Travail mais aussi parce que les pouvoirs publics ont, ces dernières années, détricoté l'inspection du travail, la médecine du travail, remis en question les CHSCT [comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail]. On favorise la déresponsabilisation des donneurs d'ordre et je pense que les politiques ont aussi une responsabilité à prendre.

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