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Pont effondré en Haute-Garonne : "Il est urgent d'intervenir", estime le coauteur d'un rapport sur la sécurité des ponts

Dans ce texte de 180 pages rendu public en juin, le sénateur Patrick Chaize alertait sur "la situation très critique des ponts en France".

Article rédigé par Raphaël Godet - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les secours sont à l'œuvre dans l'eau du Tarn, après l'effondrement d'un pont suspendu à Mirepoix-sur-Tarn (Haute-Garonne), le 18 novembre 2019.  (ERIC CABANIS / AFP)

Les 1 000 habitants de Mirepoix-sur-Tarn (Haute-Garonne) sont sous le choc. Le pont suspendu qui permet d'entrer et sortir de cette commune, située au nord de Toulouse, s'est effondré, aux alentours de 8 heures, lundi 18 novembre. Deux personnes sont mortes dans l'accident. 

"En France, on ne considère pas les ponts comme du patrimoine, ce n'est pas dans notre culture", constate amèrement, Patrick Chaize, sénateur LR de l'Ain et corapporteur d'une mission d'information sur la sécurité des ponts, interrogé par franceinfo.

Franceinfo : Aviez-vous déjà entendu parler du pont Mirepoix-sur-Tarn, avant son effondrement lundi matin ? 

Patrick Chaize : A vrai dire, je ne connaissais pas particulièrement cet ouvrage, mais ce drame fait malheureusement écho au rapport que nous avons publié, avec d'autres sénateurs, en juin. Après l'effondrement du viaduc autoroutier de Gênes (Italie), qui a fait 43 morts en août 2018, nous voulions tirer la sonnette d'alarme sur la situation très critique des ponts en France. Nous écrivions noir sur blanc qu'au moins 25 000 ponts méritaient une vigilance particulière en France.

Où sont situés ces ouvrages potentiellement dangereux ?

Impossible de vous le dire. Et pour cause : il n'existe pas de recensement. Dans notre rapport, nous expliquons d'ailleurs que nous ne savons pas précisément combien la France compte de ponts. Cela peut paraître fou, mais c'est la vérité. On a une estimation de 250 000, mais ça peut aussi bien être 200 000 ou 300 000. Ce comptage est pourtant indispensable. Un état des lieux, à la fois technique et physique, permettrait d'identifier les ouvrages qui présentent un risque majeur. Peut-être que ce pont aurait alors présenté un certain nombre de points de vigilance et d'inquiétude. 

Comment expliquez-vous ce manquement ? 

C'est assez simple. En France, on ne considère pas les ponts comme du patrimoine, ce n'est pas dans notre culture. Il n'y a donc pas de prise de conscience. Dans les faits, on devrait rénover un pont comme on rénove la façade d'une mairie ou d'un gymnase. Le patrimoine, ça s'entretient, ça a une durée de vie, ça vieillit, ça s'abîme. De temps en temps, il faut que "le médecin" passe. Tout cela se programme, ça ne se fait pas en un coup d'œil. 

C'est caricatural ce que je vais dire, mais on s'intéresse aux ponts dès lors qu'il y a des bouts de béton qui tombent.

Patrick Chaize, sénateur LR

à franceinfo

Diriez-vous qu'il y a une forme de laisser-aller ? 

Je n'irais pas jusque-là. Mais il y a d'importants efforts à faire, c'est certain. Prenons la question des limites de poids, qui sont définies par les experts dès la construction du pont. C'est, par endroits, un vrai problème. Ces règles peuvent être dégradées dans le temps, en fonction des problématiques qui apparaissent, elles ne sont pas toujours respectées. Il y a des camions qui passent malgré tout, des engins agricoles aussi, pour éviter de faire des détours.

Dans votre rapport, vous demandez la mise en place urgente d'un "plan Marshall" pour les ponts. Concrètement, qu'attendez-vous ?

Nous demandons la mise en place d'une sorte de "carnet de santé", pour suivre l'entretien de chaque pont. Quand nous avons décidé de nommer notre rapport "Sécurité des ponts : éviter un drame", c'était justement pour éviter une catastrophe. Malheureusement, l'accident de Mirepoix est arrivé. Il est vraiment urgent d'intervenir. Nous allons insister pour qu'une attention particulière soit portée à cette problématique lors des discussions autour du projet de loi de finances.

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