: Vrai ou faux Législatives : on a vérifié six affirmations des invités politiques de l'émission "France 2022"
Au cours de l'émission politique de France 2, jeudi soir, dix représentants des principaux partis politiques ont fait quelques déclarations qui ont mérité des vérifications.
A trois jours du premier tour des élections législatives, dix représentants des principaux partis politiques étaient les invités, jeudi 9 juin, de l'émission spéciale "France 2022", sur France 2. Pendant près de 2h45, Olivier Faure (PS – Nupes), Julien Bayou (EELV – Nupes), Ian Brossat (PC – Nupes), Adrien Quatennens (LFI – Nupes), Brigitte Fouré (UDI), Jordan Bardella (RN), Olivier Véran (LREM – Ensemble), Isabelle Florennes (MoDem – Ensemble), Guillaume Peltier (Reconquête !) et Charles Consigny (LR) ont débattu sur le pouvoir d'achat, les retraites ou encore la sécurité et les violences policières. Franceinfo a vérifié six de leurs déclarations.
1Les taxes représentent la moitié du prix des carburants, selon Charles Consigny (LR) : vrai
"Vous savez comme moi que, sur l'essence, on a un volume très important de taxes. C'est à peu près 50% de taxes sur le prix de l'essence."
Charles Consigny, candidat Les Républicainssur "France 2022"
En première partie d'émission, les représentants politiques ont débattu sur le pouvoir d'achat. Charles Consigny, membre des Républicains, a fustigé la part de la fiscalité sur les prix à la pompe. Celle-ci représente effectivement entre 50 à 60% du tarif final des carburants. Cette part comprend la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 20%, qui s'applique à la fois sur le produit hors taxes et sur la TICPE. Le reste du prix à la pompe se compose du coût du pétrole brut, du raffinage et des coûts de transport et de distribution.
Actuellement, sur un litre de gazole à 1,96 euro, on compte 0,93 euro de taxes, comme l'explique l'Union française des industries pétrolières (Ufip). Quant au litre de SP95, à 2,10 euros, il comprend 1,04 euro de taxes.
2La France compte 10 millions de pauvres et 6 millions de mal logés, avance Ian Brossat (PCF) : en partie vrai
"Nous avons 10 millions de pauvres, 8 millions de personnes qui fréquentent l'aide alimentaire" et "6 millions qui sont mal logées en France."
Ian Brossat, porte-parole du PCFsur "France 2022"
Alors que le débat portait sur la vie chère, Ian Brossat, porte-parole du PCF, a avancé ces trois chiffres pour pointer le niveau de la précarité en France. Les deux premières données sont proches de la réalité. Mais pas la dernière.
Quelque 9,2 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté en 2019, selon l'Insee, soit tout près du chiffre avancé par Ian Brossat. Par ailleurs, le comité national de coordination de la lutte contre la précarité alimentaire (Cocolupa) expliquait qu'en 2020, 7 millions de personnes étaient en situation de précarité alimentaire. Un chiffre légèrement inférieur à celui cité par Ian Brossat, mais qui date d'il y a deux ans, donc avant la crise provoquée par la pandémie de Covid-19.
En revanche, concernant les mal logés, le rapport de la Fondation Abbé-Pierre publié en février dernier avance le chiffre de 4,1 millions de personnes, soit deux millions de moins que ce qu'affirme le porte-parole du Parti communiste.
3Les cinq plus grosses fortunes françaises possèdent autant que 40% des Français, affirme Adrien Quatennens (LFI) : vrai
"Cinq personnes, cinq milliardaires, possèdent à elles cinq autant que 27 millions de personnes."
Adrien Quatennens, député LFIsur "France 2022"
Toujours sur le pouvoir d'achat, Adrien Quatennens a pointé du doigt les inégalités de richesse en France. Les données qu'il avance sont crédibles et sont issues d'un rapport de l'ONG Oxfam sur les inégalités mondiales publié en janvier 2022.
Dans ce rapport, on peut lire que "les cinq premières fortunes de France (...) possèdent à elles seules autant que les 40% les plus pauvres en France", soit l'équivalent de 27 millions de Français. Selon le classement du magazine Capital, les cinq plus grosses fortunes françaises possédaient plus de 400 milliards d'euros en 2021.
Quant aux données sur les 27 millions de Français les plus modestes, Oxfam renvoie vers des estimations du Crédit Suisse (en PDF). Le groupe bancaire avance que les Français possédaient 14 085 milliards d'euros en 2020 et que les 40% les plus modestes possédaient 2,4% de la richesse nationale. Soit 338 milliards d'euros. C'est effectivement (beaucoup) moins que les cinq plus grosses fortunes du pays.
4Olivier Véran (LREM) évoque une baisse du chômage "d'un million" : imprécis
"Nous avons baissé le chômage d'un million [de personnes]."
Olivier Véran, ministre chargé des Relations avec le Parlementsur "France 2022"
Le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement et de la Vie démocratique, Olivier Véran, a défendu le bilan du premier quinquennat d'Emmanuel Macron en matière d'emploi en utilisant une formulation imprécise, qui ne dit pas s'il fait référence au nombre de personnes ayant retrouvé un emploi ou aux emplois créés.
Comme nous l'expliquions en janvier dernier, la France a créé un million d'emplois depuis 2017. Mais comme il y a aussi eu des destructions de postes, cela ne correspond pas à une baisse nette du chômage.
Il y a en réalité 527 000 personnes en moins en catégorie A (sans aucune activité) depuis le troisième trimestre 2017, selon Pôle emploi. Si on prend également en compte les personnes ayant eu une activité partielle (catégorie B) ou une activité réduite longue (catégorie C) et qui restent en recherche active, la baisse globale du chômage s'élève à 357 000 personnes lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.
5Jordan Bardella (RN) prête à Pap Ndiaye des comparaisons entre la police actuelle et celle de Vichy : faux
"[Pap Ndiaye] a comparé [la police] à la police française de Vichy, qui a organisé des rafles d'enfants juifs durant la Seconde Guerre mondiale."
Jordan Bardella, président par intérim du Rassemblement nationalsur "France 2022"
Sur le plateau de "France 2022", Jordan Bardella s'en est pris au nouveau ministre de l'Education nationale. Le président par intérim du RN a assuré que Pap Ndiaye avait comparé il y a plusieurs années la police à celle "de Vichy, qui a organisé des rafles d'enfants juifs durant la Seconde Guerre mondiale".
Or, comme l'explique Le Figaro, le nouveau ministre (et historien de formation) n'a pas directement comparé la police française actuelle à celle qui a mené la rafle du Vel' d'Hiv, mais simplement mentionné ce passé. "Quand on se penche sur l'histoire de France, il faut aussi se pencher (...) sur une histoire de la police marquée par des formes de répression coloniales. Pensons à la guerre d'Algérie (...) à l'Occupation et aux rafles de Juifs opérées par la police française sous l'autorité de Maurice Papon à Paris ou Bordeaux", avait-il expliqué dans une vidéo diffusée sur Mediapart en juin 2020.
6Les étrangers peuvent toucher le minimum vieillesse, assure Guillaume Peltier (Reconquête !) : plutôt vrai
"Un étranger qui a atteint 65 ans en France, qui n'a jamais travaillé, n'a jamais cotisé, va toucher l'Aspa [Allocation de solidarité aux personnes âgées], c'est-à-dire une retraite de 830 euros par mois."
Guillaume Peltier, vice-président de Reconquête !sur "France 2022"
Le sujet de l'immigration a aussi animé les débats. Le vice-président de Reconquête ! s'est opposé vertement à Olivier Véran sur le sujet du minimum vieillesse. Guillaume Peltier a assuré que cette allocation pouvait être versée aux étrangers. Cette assertion est vraie, contrairement à ce que défend le ministre, mais elle mérite des précisions.
En réalité, l'Aspa est une prestation accordée aux retraités, dès 65 ans, avec de faibles ressources et vivant en France. Pour une personne seule, le montant maximum mensuel est de 916,78 euros, et non de 830 euros, comme l'avance Guillaume Peltier. Le barème a été revalorisé lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.
Les étrangers peuvent en bénéficier s'ils résident en France. Mais ils doivent également "avoir de façon continue, depuis au moins dix ans, un titre de séjour autorisant à travailler". Les réfugiés, les apatrides ou les ressortissants de l'Espace économique européen (EEE) et de certains autres pays sont cependant dispensés de cette condition.
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