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Municipales 2020 à Toulouse : tout savoir sur les enjeux du scrutin, même si vous avez vécu six ans dans une grotte

Quel est le bilan du maire sortant ? Se représente-t-il ? Quels sont les enjeux de ce nouveau scrutin ? L'élection municipale dans la ville rose vous semble complexe ? Suivez le guide.

Article rédigé par franceinfo
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Vue sur l'hôpital la Grave et le pont Saint-Pierre, à Toulouse (Haute-Garonne), le 29 septembre 2019. (JEAN-MARC BARRERE / HEMIS.FR / AFP)

La valse de deux anciens maires, la trahison d'un adjoint et une alliance citoyenne écolo. Pour les élections municipales des 15 et 22 mars, le tableau politique toulousain est pour le moins animé. Cité de l'aéronautique et du spatial, Toulouse, quatrième ville de France qui se veut à présent plus "verte" et "participative", suscite de grandes convoitises. Franceinfo vous décrypte le scrutin. 

>> Retrouvez tous les résultats des élections municipales à Toulouse à partir de dimanche 15 mars

Qui est le maire en place (et veut-il rester) ?

Pour parler de Toulouse, il faut parler de Jean-Luc Moudenc, président de la métropole, ancien et actuel maire à la fois. Oui, c'est étonnant. L'édile républicain brigue un troisième mandat cette année, décidé à ne plus quitter son poste au Capitole, occupé de 2004 à 2008. L'homme de 59 ans, détrôné en 2008 par le socialiste Pierre Cohen, n'a jamais vraiment quitté la scène toulousaine. En 2020, "pour mieux rassembler", il "ne sollicite l'investiture d'aucun parti politique". Une démarche qui aurait été bien accessoire pour ce proche du Premier ministre Edouard Philippe qui bénéficie d'un large soutien : de LR, des macronistes de LREM, de l'UDI, du Nouveau Centre, d'Agir et du Parti radical.


Jean-Luc Moudenc, maire (LR) de Toulouse, réélu dimanche 28 juin 2020. (ERIC PIERMONT / AFP)

Déjà en 2014, Jean-Luc Moudenc avait fait campagne sans afficher la couleur de de l'UMP. Il avait alors bénéficié, selon les révélations de Médiacités (article payant) d'une importante générosité de la part de ses sympathisants. L'homme, classé au centre-droit, cultive l'image d'un maire dynamique et omniprésent. Et c'est un stratège : avant l'annonce de sa candidature à la rentrée 2019 et l'ouverture de la période de réserve électorale le 1er septembre, Jean-Luc Moudenc avait lancé en juillet la campagne de communication "Toulouse, 5 ans de progrès" et un site dédié pour faire le bilan de son action. De même, pour éviter les batailles politiques, en cas de réélection, il propose un programme commun LR-LREM pour les 37 communes de la métropole toulousaine.

Qu'est-ce qu'on retient de son mandat ?

Plein les yeux. Pour Jean-Luc Moudenc, rien n'est trop grand ni trop beau pour Toulouse. Le maire sortant se montre plutôt fier de son mandat. Le centre-ville est plus agréable, la place de la célèbre basilique Saint-Sernin a été réaménagée (au grand dam des archéologues) et la ville rose s'est dotée de ramblas, à l'image de Barcelone. Un nouveau parc d'exposition, le Meet, verra également le jour en juin. Le quartier de la gare Matabiau va, quant à lui, être transformé d'ici 2030 en quartier d'affaires. Une ville plus attractive donc, et qui se veut plus sûre. Depuis son entrée en poste, Jean-Luc Moudenc a doublé les effectifs de la police municipale, étendu ses horaires, développé la vidéosurveillance et créé une brigade motorisée. Un bilan dont il n'est pas peu fier. 

Avant d'être maire, je suis père de famille. J'apprécie que ma fille puisse sortir en toute tranquillité.

Jean-Luc Moudenc

lors d'une conférence de presse, le 12 septembre 2019

En matière de finances, l'édile assume sa décision d'augmenter les impôts locaux de 15%. Pour lui, une telle mesure était nécessaire au vu des comptes de la municipalité. L'homme se targue par ailleurs d'avoir fait baisser le prix de l'eau, en privatisant sa gestion ainsi que l'assainissement : "Les habitants bénéficieront du prix de l'eau du robinet le plus bas de France", s'est-il réjoui. Une décision loin de faire consensus à la métropole, rapporte 20 Minutes.

Mais ce n'est pas le nerf de la guerre : le maire sait qu'il est attendu sur la question des transports. Et à ce propos, le bilan déraille un peu : toujours pas de troisième ligne de métro à Toulouse ni de seconde rocade, promises en 2014, mais un doublement de la ligne A et la mise en place de nouvelles lignes de bus Linéo. Quant au projet du téléphérique urbain initié par son prédécesseur, il verra le jour en fin d'année 2020. 

Et l'opposition, qu'est-ce qu'elle en dit ?

Face à un élu qui accapare tout l'espace médiatique, pas facile de se faire une place. Toutefois, les récents mouvements sociaux ont été l'occasion de faire entendre un certain mécontentement. Les vitrines des agences immobilières ont été les grandes victimes du mouvement des "gilets jaunes", dont Toulouse est l'un des bastions. En cause : l'explosion du prix de l'immobilier. Selon le site meilleursagents.com, il a bondi de 28,9% en cinq ans dans la ville rose. Une hausse qui pourrait "se faire au détriment de la mixité sociale", se sont inquiétées en mars 2019 les oppositions socialiste et écologiste, regrettant le "refus de la majorité d'expérimenter le dispositif d'encadrement des loyers"

Avec près de 6 000 nouveaux arrivants par an, l'une des autres grandes problématiques de Toulouse est celle des transports. Les opposants à Jean-Luc Moudenc lui reprochent de ne pas avoir remédié aux problèmes de circulation et de ne pas avoir suffisamment développé les transports publics. "Le partage de l'espace reste encore nettement à l'avantage de la voiture", regrette l'association 2 pieds 2 roues.  

Un problème de partage de l'espace qui relève de l'urbanisme. Sur ce terrain, les actions du maire sont également remises en cause, en particulier le gigantesque projet de réaménagement du quartier Matabiau.

Mais quelle idée leur est passée par la tête ? La folie des grandeurs ?

Régis Godec, conseiller municipal EELV

dans un communiqué publié en 2017

En 2017, un élu EELV s'inquiétait ainsi du projet de construction de la tour Occitanie, un gratte-ciel de 150 mètres de hauteur qui devrait voir le jour d'ici à 2023 dans le quartier. Un bâtiment pour le moins controversé

Qui veut devenir maire à la place du maire ?

C'est là que ça se complique. Ils sont pour l'instant sept, mais pourraient se limiter à six. Face à Jean-Luc Moudenc, son meilleur ennemi : Pierre Cohen, maire (PS) de Toulouse entre 2008 et 2014. Aujourd'hui membre du mouvement Génération.s, l'homme a décidé de se représenter après avoir été identifié par un sondage Ifop comme la personnalité toulousaine la mieux placée pour incarner le rassemblement de la gauche… qui est éparpillée façon puzzle. En effet, en plus de sa liste Pour la cohésion, il y a Nadia Pellefigue, vice-présidente de la région Occitanie soutenue par les traditionnels PS, PRG, PCF et par le collectif citoyen UNE (Une nouvelle énergie), ainsi que la liste Archipel citoyen, menée par l'écologiste Antoine Maurice, qui bénéficie du soutien de EELV, La France insoumise, Nouvelle Donne, Place publique et le Parti pirate. Pierre Cohen est toutefois, aux dernières nouvelles, ouvert à une alliance avec Archipel citoyen. De quoi, en comptant la liste du maire sortant, passer de huit à sept listes au total (et prendre moins d'aspirine). 

Le centre et la droite ne font pas mieux : le clan Moudenc est divisé par la trahison de son adjoint au Logement, Franck Biasotto, qui conduira une liste soutenue par le MoDem. Il y aura également une liste Debout la France menée par Florian Lebrun et une autre Rassemblement national conduite par Quentin Lamotte. De quoi satisfaire un large spectre d'électeurs. Et même… les amis des animaux ! Car oui, il y aura également une liste du Parti animaliste, menée par Quentin Charoy.

En bref, qui propose quoi ?

Du vert, du vert, et encore du vert. Les candidats l'ont bien compris : Toulouse se rêve écolo. Le vote vert a emporté 21,28% des voix aux élections européennes de 2019. Les promesses pour la planète sont donc attendues au tournant : Jean-Luc Moudec promet de planter 100 000 arbres et de créer des fermes urbaines, Nadia Pellefigue annonce un "bouclier végétal" visant à réduire de 50% les émissions de gaz à effet de serre sur Toulouse et sa métropole d'ici 2030, quand Archipel citoyen envisage de doubler le budget vélo de la métropole.

Nous assistons là à une course des listes à la Prévert sur l'écologie.

Antoine Maurice, tête de liste d'Archipel citoyen

au journal "La Tribune"

Toutes les listes se sont saisies du sujet, ainsi que de la question des transports qui en découle. C'est un oui général pour améliorer la circulation, grande problématique de la ville, mais comment ? Les avis divergent : Antoine Maurice souhaite réaliser un réseau express vélo, le candidat RN Quentin Lamotte propose de prolonger les tracés des deux lignes de métro actuelles et Pierre Cohen envisage, lui, de reporter la mise en place de la troisième ligne de métro, qu'il ne considère pas comme "prioritaire".

La bataille pour le Capitole s'est également parée de "participation citoyenne". Dans une ville très mobilisée sur le plan social, l'argument de la concertation citoyenne est un véritable avantage. Le maire sortant l'a compris : face aux collectifs Archipel citoyen et Une nouvelle énergie qui promeuvent une prise de décision ouverte et collective, le candidat a annoncé vouloir multiplier par huit le budget participatif de la mairie.

Qui a ses chances d'être élu ?

La situation semble bien brumeuse à Toulouse. Si la ville a une tendance historique à élire des maires de droite, il n'y a rien de systématique : en 2008, le socialiste Pierre Cohen avait ainsi créé la surprise. Par ailleurs, le département et la région sont actuellement présidés par deux figures socialistes : Georges Méric et Carole Delga. Pour le premier tour de l'élection présidentielle de 2017, les Toulousains avaient aussi préféré le candidat de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, qui avait obtenu 29,17% des voix, devant Emmanuel Macron (27,26%) et François Fillon, candidat LR (17,67%). 

Il est clair que Jean-Luc Moudenc et Pierre Cohen bénéficient tous les deux d'un atout important : ce sont des figures familières des Toulousains. Pour autant, la démographie changeante de la ville pourrait jouer en faveur de la liste Archipel citoyen. Quelque 3 000 personnes ont voté sur la plateforme créée par le mouvement pour désigner ses candidats aux municipales. Le jeune collectif écologiste, créé en 2017, pourrait créer la surprise et, pourquoi pas, récupérer les clés du Capitole.

Pour la petite histoire…

On vous laisse en évoquant la polémique du sapin de Noël géant de cette année. Composé de 385 petits sapins, l'arbre municipal a bien fait parler de lui : des Toulousains et des opposants à Jean-Luc Moudenc n'ont pas manqué de souligner son aspect peu écolo. La mairie s'est défendue en expliquant préférer couper plusieurs jeunes sapins cultivés plutôt qu'un vieux sapin de 80 ans. Comme quoi, personne n'a envie de faire de cadeaux durant cette campagne.

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