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Législatives 2022 : "On a l'impression que cette campagne n'a tourné qu'autour de Jean-Luc Mélenchon", estime un politologue

Le député La France insoumise "a réussi son pari qui était de structurer ces élections législatives", juge sur franceinfo Rémi Lefebvre, à trois jours du premier tour.

Article rédigé par franceinfo
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Jean-Luc Melenchon prononce un discours lors d'un meeting de la Nupes à l'Olympe-de-Gouge à Paris, le 1er juin 2022. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

"On a l'impression que cette campagne n'a tourné qu'autour de Jean-Luc Mélenchon et de la gauche", estime jeudi 9 juin sur Rémi Lefebvre, politologue, professeur à l'université de Lille 2 et chercheur au Centre d'études et de recherches administratives, politiques et sociales (CERAPS). À trois jours du premier tour des élections législatives, il observe le changement de stratégie d'Emmanuel Macron qui "semble plus présent pour mobiliser son électorat" car "des sondages montrent une progression de la coalition de gauche". Selon Rémi Lefebvre, avec la "stratégie de Jean-Luc Mélenchon de présidentialiser ces législatives, il risque d'y avoir une mobilisation un peu plus forte de l'électorat de gauche."

>> Législatives 2022 : comment le camp d'Emmanuel Macron a changé de ton face à Jean-Luc Mélenchon depuis l'entre-deux-tours de la présidentielle

franceinfo : Emmanuel Macron est très présent en cette fin de campagne des législatives. Est-ce le signe d'une certaine inquiétude ?

Rémi Lefebvre : Oui, c'est le signe d'une certaine fébrilité sans doute. La stratégie d'Emmanuel Macron était assez claire jusque-là. Elle consistait à anesthésier le débat, à ne donner prise à aucune controverse. Il n'y a pas eu d'annonces gouvernementales, à la différence de ce qu'il avait fait en 2017, une communication des ministres étouffée, la composition tardive de ce gouvernement d'ailleurs. Donc, il y avait l'idée de ne donner prise ni à la critique, ni à la controverse. Cette stratégie ne semble pas très bonne au vu des sondages qui montrent une progression de la coalition de gauche. Donc, quelques jours avant le premier tour, Emmanuel Macron semble plus présent pour mobiliser son électorat.

Il y a beaucoup de points d'interrogation avant le vote ce dimanche. C'est assez difficile de lire ce scrutin aujourd'hui, notamment parce qu'il y a des doutes à la fois sur la participation et sur les réserves de voix de chaque parti pour le second tour.

Il y a plein d'incertitudes. Mais la principale, c'est le niveau de participation. Les élections législatives sont dominées par un enjeu que les politistes appellent l'abstentionnisme différentiel, c'est-à-dire que les électorats ont une capacité à se mobiliser plus ou moins forte. En général, les électeurs du camp qui a perdu, en l'occurrence la gauche et l'extrême droite, ont tendance à se démobiliser, à ne pas aller voter. Donc, il y a une surmobilisation du camp qui a gagné l'élection présidentielle. C'est ce qui a permis depuis 2002 (depuis l'instauration du quinquennat) à tous les présidents de la République de bénéficier d'une majorité forte. Ça c'est le scénario classique.

"Là, avec la stratégie assez habile de Jean-Luc Mélenchon de politiser et de présidentialiser ces élections législatives, il risque d'y avoir une mobilisation un peu plus forte de l'électorat de gauche."

Rémi Lefebvre, politologue

à franceinfo

Même si l'électorat jeune et populaire de Jean-Luc Mélenchon peut aussi ne pas aller voter. Donc, le risque c'est qu'une partie de l'électorat macroniste se dise "ce n'est pas la peine d'aller voter". D'où la volonté de dramatiser cette élection, de diaboliser le camp de la gauche pour inciter l'électorat macroniste à aller voter dimanche.

Jean-Luc Mélenchon apparaît comme une sorte de force centrifuge de la campagne : ses rivaux l'attaquent lui, le chef de l'État, en tête.

Effectivement, c'est assez frappant. Jean-Luc Mélenchon a réussi son pari qui était de structurer ces élections législatives. Il est au cœur de ces élections législatives, lui et la coalition de gauche qu'il a réussi à fédérer. On ne parle pratiquement que de lui pendant campagne. Emmanuel Macron ne développe pas de programme, les candidats de La République en marche ne développent pas vraiment de programmatique. La droite, très présente nationalement, est repliée dans ses bastions locaux et joue la carte du local. Et l'extrême droite a été assez peu présente. Et comme aujourd'hui, Emmanuel Macron diabolise cette coalition pour mobiliser son électorat, on a l'impression que cette campagne n'a tourné qu'autour de Jean-Luc Mélenchon et de la gauche.

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