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"Hors de question que je passe Noël toute seule à Paris" : vous nous avez raconté vos plans B pour vous déplacer pendant les fêtes avec la grève

Dans les transports, certains syndicats ont l'intention de poursuivre la grève contre la réforme des retraites pendant les fêtes de fin d'année.

Article rédigé par franceinfo
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La gare Montparnasse au premier jour de la grève contre la réforme des retraites, le 5 décembre 2019. (HUGO PASSARELLO LUNA / HANS LUCAS / AFP)

Y aura-t-il des trains à Noël ? Au neuvième jour de la grève contre la réforme des retraites, plusieurs syndicats – CGT-Cheminots en tête – ont annoncé qu'ils comptaient poursuivre leur mobilisation pendant les fêtes de fin d'année, "sauf si le gouvernement revient à la raison" en retirant son projet. Face à cette éventualité, l'exécutif a exhorté les syndicats, vendredi 13 décembre, à avoir un "esprit de responsabilité". 

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Comment les usagers vont-ils organiser leurs déplacements en cette fin d'année ? Franceinfo a lancé un appel à témoignages à ce sujet.

"J'ai déjà commencé à regarder les alternatives"

Nicolas, 36 ans, a réservé ses trajets pour Noël dès l'ouverture de la vente des billets. Pour cet administrateur réseaux qui travaille à Stuttgart (Allemagne) depuis deux ans, le mois de décembre est l'un des rares moments de l'année où il peut voir sa famille. "J'ai déjà réservé mon train Stuttgart-Paris, puis Paris-Caen. Je dois changer de gare à Paris en métro. En tout, cela fait six heures de porte à porte, pour 115 euros aller-retour, explique ce Normand. Mais avec la grève de la SNCF et de la RATP, j'ai déjà commencé à regarder les alternatives pour rentrer en France." La solution la plus simple serait de louer une voiture pour dix jours, mais pour un coût bien supérieur : 360 euros. "A cela s'ajoutent l'essence, l'assurance en cas de mauvais temps… Il faudrait que je parte en covoiturage pour faire baisser le prix. C'est une dépense imprévue que je devrai prendre dans mes économies", détaille-t-il.

Le côté positif si je loue une voiture, c'est que je pourrai rapporter des produits frais de chez moi : crème fraîche, beurre salé et quelques bouteilles de vin.

Nicolas, administrateur réseaux en Allemagne

à franceinfo

Pour le moment, Nicolas attend de connaître les prévisions de trafic avant d'annuler ses billets. "Je ne blâme pas la SNCF, je soutiens totalement le mouvement. En plus, comme je travaille en Allemagne, c'est le grand flou artistique cette réforme pour ma situation."

De la fatigue et du stress

Agnès, 53 ans, habite à Paris et doit fêter Noël avec sa mère dans la capitale. "Elle doit venir de Béziers en train, le billet a été réservé depuis longtemps, explique-t-elle. On a anticipé début novembre, quand la grève a été annoncée, en prenant un billet d'avion depuis Montpellier." Coût du billet : 130 euros. Par précaution, Agnès a aussi réservé un covoiturage depuis Narbonne, cette fois pour 60 euros. "Le problème, c'est que le covoiturage pour quelqu'un de son âge, c'est plus lourd, plus fatigant, plus stressant."

Le souci majeur, c'est l'inquiétude. Pour une personne un peu âgée, le fait de ne pas savoir quel moyen de transport va être disponible, comment s'organiser, à quel moment elle devra partir...

Agnès, cadre territoriale à Paris

à franceinfo

Même si le train circule, Agnès perdra de l'argent. "L'avion, on ne peut pas l'annuler, et le covoiturage, pour une raison morale, je ne vais pas l'annuler car ça pénalise le conducteur. Ça me coûtera 200 euros de plus de toute façon." Malgré tout, Agnès dit "comprendre les inquiétudes des grévistes", mais déplore la forme que prend le mouvement. "Il faut rester le plus longtemps possible autour de la table des négociations, plutôt que de bloquer la situation de beaucoup de gens."

Un changement de budget

Etudiante en lettres modernes à Rennes, Mathilda a aussi dû revoir son organisation pour être sûre de passer les fêtes en famille. Elle devait la rejoindre à Charleville-Mézières (Ardennes) en train pour 34 euros. "J'ai finalement pris un bus pour Reims à 45 euros et la liaison jusqu'à Charleville devra se faire par un proche, raconte-t-elle. Je ne comprends pas pourquoi ça tombe encore au moment des fêtes de fin d'année. L'an dernier, les 'gilets jaunes' m'avaient déjà contrainte à annuler mes billets et à faire un aller-retour seule en covoiturage."

S'il n'y avait pas le bus, je serais restée seule pendant les fêtes de fin d'année.

Mathilda, étudiante à Rennes

à franceinfo

Ce changement a des conséquences sur son budget, notamment s'il n'y a toujours pas de train pour rentrer à Rennes en janvier. "Je vais devoir travailler davantage à côté de mes études pendant quelques semaines, alors que j'ai justement pris mes billets en avance pour éviter ce genre de problème."

"Je refuse de prendre l'avion"

Certains ont aussi réfléchi à des plans B, mais excluent l'avion quoi qu'il arrive. "Je dois rentrer à Toulouse en train le 21 décembre. Je dois prendre un premier train pour Francfort [Allemagne], puis un autre pour Paris. Et enfin, un dernier pour Toulouse, dans la même journée", raconte Louis, étudiant à Halle (Allemagne).

Comme je refuse de prendre l'avion par conviction écologique, si l'un de mes trains français est annulé, soit je tâcherai de trouver un autre train plus tard, soit j'opterai pour le car.

Louis, étudiant en Allemagne

à franceinfo

Maxime, étudiant en journalisme à Lille et originaire d'Aix-en-Provence, a les mêmes pratiques d'habitude. Il ne prend plus de vols intérieurs depuis trois ans et privilégie le train. "Là, c'est une petite entorse car je n'ai pas le choix, le covoiturage est trop long, explique-t-il. Ma mère m'a payé le billet d'avion pour Marseille, pour 274 euros. Avec un euro de plus, la compagnie compense l'empreinte carbone", souligne-t-il.

Néanmoins, l'étudiant est "fondamentalement" contre la réforme annoncée. "On ne sait pas ce que veut dire ce système de points et j'ai particulièrement peur de ce que je pourrai avoir à la retraite, si j'arrive à la retraite un jour ! explique-t-il. Surtout que la plupart des journalistes aujourd'hui sont pigistes [rémunérés à la tâche], donc on ne sait pas ce que ça donnera en termes de retraite." 

"Nous priver des fêtes de Noël, ce serait le pire"

Sur "le principe", Jennifer, 41 ans, comprend l'opposition à la réforme des retraites, mais ne soutient pas la grève, notamment en fin d'année. "C'est la ligne rouge des usagers à ne pas franchir. Nous priver des fêtes de Noël, ce serait le pire", explique cette responsable de formation dans le Val-de-Marne. Son billet pour Perpignan est pris depuis plusieurs semaines, mais elle ne sait pas si son train va être maintenu. "Pour être franche, il est hors de question que je passe Noël toute seule à Paris. Quoi qu'il arrive, je dois trouver un moyen pour descendre", s'agace-t-elle.

Elle a déjà cherché un covoiturage, mais aucun conducteur n'accepte son animal de compagnie pour le moment. "Je compte sur les annulations de train pour qu'il y ait plus de covoiturages !" espère-t-elle. Sinon, la solution sera l'avion.

Pour payer le billet d'avion à 250 euros, je vais être obligée de prendre de l'argent que j'avais mis de côté. Je n'ai déjà plus rien sur mon compte courant !

Jennifer, formatrice dans le Val-de-Marne

à franceinfo

"C'est impossible de savoir exactement ce qu'il va se passer", déplore de son côté Sophie, professeure de yoga de 49 ans. Toute sa famille doit venir de Biarritz et de Toulouse fêter Noël dans la capitale. "J'ai réservé les billets de train, le logement supplémentaire sur Airbnb et les billets de théâtre pour un budget total de 1 500 euros, explique la Parisienne. Mais pour être remboursée sur Airbnb, il faut que les billets de train soient réellement annulés, et le théâtre n'est pas remboursable." Si sa famille ne peut pas se déplacer, c'est elle qui descendra dans le Sud, sans doute en avion. "Actuellement, les billets pour Toulouse coûtent aux alentours de 500 euros ! Le malheur des uns fait le bonheur des autres…" ironise-t-elle.

J'ai un gros sentiment de dégoût, d'injustice, et j'ai l'impression de subir un rapport de force absolument délétère. J'ai même songé à monter dans un train (à condition d'en trouver un) sans régler le billet.

Sophie, professeure de yoga à Paris

à franceinfo

Pas d'inquiétude toutefois du côté des détenteurs de voiture. "On n'a pas beaucoup de moyens de transport car on n'habite pas dans une grande ville, donc on utilisera la voiture, explique Joëlle, originaire d'Estevelles (Pas-de-Calais). On a commandé à l'avance les cadeaux sur internet pour ne pas avoir de problème." D'autres observent la situation avec plus de pragmatisme. "J'ai décidé de rester chez moi, le covoiturage est trop compliqué pour faire le trajet entre Toulon et Nantes, explique Isabelle, retraitée. J'ai donc prévu de passer tranquillement les fêtes de fin d'année chez moi, toute seule avec mes chiens. Ce sera balade à la plage si le temps le permet." 

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