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"Gilets jaunes" : "Il faut des transformations institutionnelles à la hauteur de la crise que nous vivons"

Yves Sintomer, professeur en sciences politiques, invité samedi de franceinfo, suggère par exemple l'organisation de référendums d'initiative populaire.

Article rédigé par franceinfo
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Des "gilets jaunes" arrivent place de l'Etoile à Paris, samedi matin 15 décembre 2018 (LUCAS BARIOULET / AFP)

"Il faut prendre au sérieux la fracture politique", a déclaré Yves Sintomer, professeur en sciences politiques à l'université Paris-8, samedi 15 décembre à franceinfo. Alors que débute une cinquième mobilisation des "gilets jaunes", il s'agit de "penser à une nouvelle vague d'innovations démocratiques comme il y en a eu par le passé", dit-il.

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Introduire une dose de proportionnelle ne suffit pas, selon cet enseignant. Yves Sintomer suggère par exemple l'organisation de référendums d'initiative populaire.

franceinfo : Pourquoi estimez-vous que le mouvement des "gilets jaunes" est le reflet d'une fracture politique profonde, pas seulement d'une fracture sociale ?

Yves Sintomer : On a mis l'accent, à juste titre, sur la fracture sociale contre laquelle les "gilets jaunes" se sont mobilisés, mais je crois qu'il faut prendre au sérieux la fracture politique sur laquelle le président Emmanuel Macron n'a rien annoncé. Elle constitue à l'évidence l'une des causes de la mobilisation et de la rage qui a parcouru le mouvement. On voit bien que la société a énormément évolué, les réseaux sociaux en sont à la fois une dimension fondamentale et un facteur d'évolution tout à fait notable. Et on voit bien que face à cela, le système politique a fait du surplace. Et la représentation politique qui passe uniquement par des élections et des politiques en compétition pour placer leurs candidats n'est plus aujourd'hui adéquate pour véritablement représenter le pays. Bien sûr, il faut des élus de terrain qui soient au contact avec la population, mais il faut aussi des transformations institutionnelles à la hauteur de la crise que nous vivons.

Faut-il, d'après vous, changer de République ?

Ce qui me semble clair, c'est que la Ve République a épuisé ses potentialités. Il est clair que ce système fondé sur un président ayant extrêmement peu de contre-pouvoirs institutionnels ne convient plus à une société du XXIe siècle. Ce qui est sûr aussi, c'est qu'au-delà du système français, on voit bien que tous les régimes représentatifs occidentaux sont confrontés à une crise croissante. Les vieux partis politiques s'effondrent ou perdent largement leur assise. La défiance politique monte dans tous les pays, les sondages le montrent. Le mouvement est général. Il faut donc penser à une nouvelle vague d'innovations démocratiques comme il y en a eu par le passé. La démocratie, ça ne s'arrête pas. Si ça s'arrête, ça meurt.

Une dose de proportionnelle aux législatives irait-elle dans le bon sens ?

Il est sûr qu'il faudrait une dose de proportionnelle significative, mais ça ne ferait que modifier à la marge le système politique. En Italie, ils ont la proportionnelle et pour autant, ils sont eux aussi confrontés à une crise du système politique majeure. Ce qui est intéressant, c'est que dans le mouvement des "gilets jaunes", une série de revendications politiques ont émergé, comme la mise en place d'assemblées citoyennes tirées au sort pour défendre les intérêts des citoyens, ainsi que l'organisation de référendums d'initiative populaire (…) Faire comme nos voisins suisses et avoir la possibilité très régulièrement de se prononcer sur des questions qui peuvent être majeures ou locales serait une innovation considérable.

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