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De Brest aux Etats-Unis, quatre idées pour repousser la voiture hors de la ville

Lyon inaugure jeudi un tunnel entièrement dédié aux "transports doux". Ces dernières années, les projets se multiplient pour trouver des alternatives à la voiture. 

Article rédigé par Julie Rasplus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Des ouvriers travaillent sur le chantier du tunnel de la Croix-Rousse dédié aux "transports doux", le 27 août 2013, à Lyon.  (MAXPPP)

On lâche difficilement son volant et pourtant. Embouteillages monstres, pollution, bruit... Les inconvénients liés à la voiture sont nombreux. Elle reste pourtant un moyen de transport privilégié, que ce soit en ville ou en zones périurbaines ou rurales, comme l'indique un rapport du Centre d'analyse stratégique (PDF), publié en 2012.

Peut-on en finir avec le tout-automobile ? C'est la question sur laquelle planchent plusieurs villes françaises, à commencer par Paris qui travaille à la piétonnisation des voies sur berge. Plus au sud, Lyon inaugure, jeudi 5 décembre, un tunnel entièrement dédié aux bus, vélos et piétons sous la colline de la Croix-Rousse. Ce tube, large de 10 mètres de large et long d'1,7 km, double celui emprunté quotidiennement par 47 000 véhicules et entend donner un espace aux "transports doux".

Qu'en est-il ailleurs ? D'autres alternatives à la voiture sont-elles possibles ? Tour d'horizon de plusieurs initiatives mises en place pour la contrer. 

La plus généreuse : des vélos en cadeau

Comment inciter les habitants à lâcher le volant ? La ville d'Arcachon a trouvé la solution et elle n'a rien de contraignante. Depuis début 2013, la municipalité distribue gratuitement des vélos à chaque foyer qui en fait la demande, raconte le magazine Terra Eco. Concrètement, les habitants des 6 000 résidences principales que comptent la ville, peuvent être équipés d’un "bicloune" d’une valeur de 137 euros. Pour posséder le Graal, rien de plus simple : la personne doit présenter un certificat médical, un justificatif de taxe d’habitation et signer une charte de bonne conduite.

"Cette initiative permet d'éviter la pollution, les embouteillages et garantit la santé pour tous", se félicite le maire UMP de la ville, Yves Foulon, dans Le Figaro. Le tout pour une facture peu élevée, estime la mairie, d'autant que l'entretien reste à la charge des habitants. Pour 2 000 demandes, l'initiative reviendrait moins cher que la mise en place de locations payantes de vélos en libre-service, sur le modèle du Vélib parisien ou du V-Cub bordelais. Mais dans l'hypothèse où l'ensemble des foyers arcachonnais en feraient la demande, la note monterait alors à 822 000 euros.

La plus vertigineuse : des "œufs" en ville

Et si on lâchait le stress de la voiture pour le paisible voyage à bord d’un téléphérique ? De plus en plus de villes parient sur ces installations pour remplacer le bus, le tram ou la voiture. C'est le cas de Brest. La ville bretonne accueillera son premier transport par câble d’ici 2015. Le téléphérique urbain doit franchir la rivière Penfeld et relier les deux rives de la ville. Un choix dicté par le porte-monnaie, rapporte Le Monde (article payant). Un pont aurait en effet coûté entre 30 et 60 millions d’euros, alors qu'il n'en faut que 15 pour installer les 460 mètres de câbles permettant de transporter 2 000 personnes par heure.  

Brest n'est pas la seule à vouloir voir flotter des "œufs" dans son ciel. Toulouse, Grenoble, Orléans ou Paris souhaitent elles-aussi s’inspirer de San Francisco, Rio de Janeiro ou Medellin (Colombie), toutes équipées de télécabines.

La ville rose est la prochaine sur la liste. Un téléphérique devrait relier, dès 2017, un centre de recherche sur le cancer, une université et un hôpital, jusque-là séparés par la Garonne. Le tout en dix minutes, contre 32 actuellement, et la poésie du voyage en plus : "On pense que ce moyen permettra à nos nombreux habitants des cités de voyager dans une troisième dimension", estime sur France Info Christian Bouvier, vice-président de Poma, une société spécialisée dans le câble.

Ce nouveau mode de transport, moins polluant et plus silencieux, séduit aussi par sa relative facilité d'usage. "L'infrastructure nécessaire [à l'installation] est plus légère. Quelques pylônes, les deux stations d'extrémité. Une fois les autorisations obtenues, en douze mois de travaux on peut rendre une ligne opérationnelle", ajoute Christian Bouvier. 

La plus touristique : des navettes en mer 

A Istanbul, Hambourg ou Venise, elles relient les rives en des points stratégiques et évitent aux habitants les rues bondées du centre-ville. Les navettes maritimes se font pourtant discrètes en France. A Paris, le projet de bateaux-bus voguant sur la Seine a fait naufrage en février. Mais à Marseille, la route de la mer séduit. Depuis 2012, des navettes relient, tous les quarts d'heure, le Vieux-Port au port de la Pointe Rouge, à sept kilomètres au sud du centre-ville, rapporte le site Mobilicités

Malgré les 40 minutes de trajet, l’initiative a rencontré un vif succès auprès des habitants et des touristes, ravis d'éviter les embouteillages perpétuels de la cité comme le montre ce reportage de La Chaîne Marseille. A tel point que la ville a ouvert une seconde ligne, en mars, cette fois pour desservir L'Estaque, situé au nord de la ville, précise France 3 Provence-Alpes.

Bordeaux semble s'être inspirée de la cité phocéenne. Et innove : depuis mai, des catamarans hybrides, électriques ou diesel, traversent la Garonne. Ces bateaux nouvelle génération, venant compléter le réseau de bus et de tramway, relient Lormont à Claveau ou la place Stalingrad à celles des Quinconces, en quatre minutes contre vingt en tramway, et pour un prix similaire.

Deux navettes Batcub traversent la Garonne depuis le printemps, à Bordeaux, pour relier les deux rives.  (MAXPPP)

Le pari est audacieux, d’autant que la ville a déjà essuyé un échec lors d'une mise en service en 2008. Difficile de changer les habitudes, note ainsi Sud Ouest : pour le moment, les navettes attirent plus les curieux, et amateurs de balade qu'une clientèle d'actifs. 

La plus radicale : la voiture interdite

Et si on s'inspirait de Mackinac, ville américaine située sur le lac Huron, dans l'Etat du Michigan ? Depuis 1898, cette petite île de 10 km² bannit la présence de tout véhicule motorisé sur son territoire, hormis les ambulances et les motoneiges en hiver. Même l'autoroute M-185 qui l'entoure est inaccessible aux "monstres motorisés" comme les baptisaient certains habitants de l'époque. Pour accéder à Mackinac, les visiteurs doivent donc emprunter l'un des deux ferries qui desservent l'île, explique le site de La Libre Belgique .

A la place de la voiture, ses quelque 500 habitants privilégient la marche, le vélo, le roller, le skate, la carriole ou le dos de cheval, énumère le site Treehugger (en anglais). Personne ne semble s'en plaindre et cela devrait perdurer. "L'air est plus sain et il y a beaucoup moins de blessés. Les résidents sont en meilleure santé grâce à l'exercice", analyse un autre article (en anglais) consacré à cette ville. "Tout y est plus égalitaire car tout le monde se déplace de la même façon. Et les habitants économisent beaucoup d'argent."  

La ville américaine de Mackinac interdit les voitures depuis 1898.  (CORNELIA SCHAIBLE / GETTY IMAGES)

Pas besoin d'aller aussi loin pour vivre sans voiture. En France, l'île de Bréhat (Côtes d'Armor) interdit ce véhicule, notamment pour les non-résidents, indique Carfree. Sans aller aussi loin, d'autres cités françaises réfléchissent à limiter la voiture, notamment en faisant payer les automobilistes à l'entrée des grandes villes.

Ces péages urbains, expérimentés à Londres, Oslo, Vancouver ou Singapour pour des résultats plus ou moins convaincants, ont de nombreux détracteurs en France, analyse Le Nouvel Economiste. L'idée fait donc du surplace. Anne Hidalgo, candidate à la mairie de Paris, a récemment relancé le débat en se montrant favorable à une mise en place aux abords de la capitale. Objectif : limiter l'accès aux véhicules jugés les plus polluants.   

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