Qu'est-ce que l'allocation sociale unique que Michel Barnier appelle de ses vœux ?
Faut-il fusionner les prestations sociales ? L'idée, qui revient régulièrement dans le débat public, a été formulée par le Premier ministre, jeudi 3 octobre, dans "L'Evénement" sur France 2. Michel Barnier a annoncé son intention de mettre en place une "allocation sociale unique". Le chef du gouvernement, qui entend ainsi "débureaucratiser" le versement des allocations, prévient cependant que ce "chantier va prendre un peu de temps".
Cette allocation "fusionnera plusieurs prestations sociales et garantira que les personnes au travail gagnent systématiquement plus que les autres", a ajouté le chef du gouvernement dans La Tribune dimanche. Il ne précise toutefois pas quelles prestations il entend regrouper.
Le retour d'une ancienne proposition
En 2021, alors qu'il briguait l'investiture du parti Les Républicains pour l'élection présidentielle l'année suivante, Michel Barnier portait déjà cette mesure afin d'"encourager le travail et le mérite, au détriment de l'assistanat". L'objectif était alors de "limiter les revenus de l'assistance, notamment avec un plafond entre le RSA [revenu de solidarité active] et les APL [aides au logement]", expliquait alors à Capital le rapporteur de son projet, le député Olivier Marleix. A l'époque, Michel Barnier promettait cependant au Point de "sanctuariser" les aides vieillesse et handicap.
Avant lui, lors de l'élection présidentielle de 2017, Emmanuel Macron avait défendu une idée voisine : "un versement social unique". L'allocation sociale unique évoque aussi le "revenu universel d'activité" qui avait été porté par l'ancien Premier ministre Edouard Philippe en 2018, rappelle La Dépêche. Ce projet, dont les travaux ont été stoppés par la crise sanitaire, envisageait de rassembler le RSA, la prime d'activité, l'allocation de solidarité spécifique, les APL ou encore l'allocation aux adultes handicapés (AAH), listait le gouvernement.
Du côté du gouvernement actuel, on ignore pour l'instant la forme exacte que prendrait cette allocation sociale unique, qui ne verrait le jour que "dans les prochaines années", a prévenu Michel Barnier. La mesure ne devrait donc pas figurer dans le projet de budget du gouvernement qui sera présenté jeudi en Conseil des ministres.
Sept milliards d'euros d'économies espérées par la droite
En revanche, elle pourrait être portée par les membres du camp politique du Premier ministre lors de l'examen des textes budgétaires au Parlement. En pleins débats sur le dérapage du déficit public, les députés de la Droite républicaine ont présenté le 2 octobre une série de mesures afin de réaliser 50 milliards d'euros d'économies. Dans ce plan, consulté par franceinfo, le groupe emmené par Laurent Wauquiez préconise notamment une "allocation sociale unique plafonnée" à "70% du smic", "à l'exception de certaines prestations dont la spécificité est justifiée, telle que l'allocation adulte handicapé". Selon eux, cette mesure permettrait de réaliser des économies "de l'ordre de 7 milliards d'euros" l'année prochaine.
De son côté, l'Ifrap, groupe de réflexion libéral qui défend l'instauration d'une allocation sociale unique, estime qu'une fusion des prestations, avec "un plafond de cumul fixé à 100% du smic, dans un premier temps, puis 90% dans un second temps", déboucherait à terme sur 5 milliards d'euros d'économies "sur les prestations et en réduction de frais de gestion".
"Simplifier, c'est compliqué"
Concernant l'efficacité d'une telle mesure, Julien Damon, professeur associé à Sciences Po et auteur d'un rapport rendu en 2018 à Edouard Philippe sur le sujet, estime auprès du Figaro qu'une allocation sociale unique aurait l'avantage d'apporter de "la simplicité" et de "la clarté". "Mais simplifier, c'est compliqué", prévient-il. Cette mesure nécessiterait entre autres d'harmoniser les périodes prises en compte pour l'éligibilité aux prestations.
Par ailleurs, en 2018, un rapport de France Stratégie, organisme rattaché à Matignon, révélé par Le Monde, estimait qu'une allocation sociale unique pourrait faire davantage de "perdants" que de "gagnants". Le rapport anticipait une baisse des ressources pour 3,55 millions de ménages et une hausse pour 3,3 millions d'autres foyers, relate le quotidien.
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