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Reportage Repas à 1 euro pour les étudiants boursiers : "Au moins 30 minutes d'attente à chaque fois" pour aller au restaurant universitaire

Depuis la rentrée, les étudiants boursiers, ainsi que les précaires qui en font la demande, ne payent qu'un euro pour manger au restaurant universitaire. Certains restos U ont du mal à absorber la demande. franceinfo l'a constaté à Rouen. 

Article rédigé par franceinfo - Thomas Giraudeau
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Le Restaurant universitaire du Panorama de Mont-Saint-Aignan (Seine-Maritime) délivre environ 1 100 repas tous les midis depuis la rentrée de septembre 2022, 15% de plus qu'avant la mise en place du repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et précaires. (THOMAS GIRAUDEAU / RADIO FRANCE)

Dans le hall du restaurant universitaire (RU) du Panorama, sur le campus de Mont-Saint-Aignan, avec vue en surplomb de la ville de Rouen, un piano a été installé pour attendre en musique. Un moyen de détendre l’atmosphère dans la longue file qui mène au self, à l'étage. "Peu importe les horaires, on a 20 ou 30 minutes au moins d'attente à chaque fois. C’est systématique", raconte Baptiste, étudiant. 

Ce midi, c'est plutôt la fourchette basse, 20 minutes. Mais régulièrement, selon les emplois du temps des différentes filières et promotions du campus, Baptiste, en deuxième année de fac d'histoire, patiente jusque 45 minutes pour prendre un plateau.

Une hausse de 20% depuis septembre dans les restos U

Ils sont de plus en plus nombreux à en bénéficier. Les étudiants boursiers, ainsi que les précaires qui en font la demande, ne payent qu'un euro pour manger au restaurant universitaire. Depuis la mise en place de cette mesure, les restos U connaissent une hausse de 20% depuis septembre par rapport à l'an dernier, soit 1,5 million de repas supplémentaires. 

"Généralement, on se retrouve avec 15 à 20 minutes pour manger, une fois arrivé à la table. C'est un peu limite ! Du coup, souvent, on ne peut pas finir. Et donc on gaspille. On n'a pas le choix."

Baptiste, étudiant

à franceinfo

Baptiste est contraint par son budget. Boursier, il a droit à un repas complet au restaurant universitaire pour 1 euro. Le tarif est imbattable, alors l'étudiant de 19 ans prend son mal en patience, et arrive parfois en retard au cours suivant. Pour Camille et Rachel, c'est hors de question. Le RU, c'est donc seulement certains jours pour ces deux étudiantes en troisième année de licence Sciences de l’éducation.

Fréquentation en hausse de 15%    

"Quand on n'a qu'une heure pour manger, on ne vient pas ici", souligne Camille. "On n'a pas le temps. C'est impossible !, ajoute Rachel. Là, on a une heure et demie de pause donc on vient". Quand elles n'ont qu'une heure entre deux cours, elles apportent leur repas et le mangent en amphi ou bien elles vont au snack. Mais cela coûte plus cher : entre 5 et 7 euros dans les fast-foods privés installés sur le campus de Mont-Saint-Aignan.

Pour éviter la file d'attente au restaurant universitaire, Axel et ses camarades, en Sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps), font parler leurs jambes : "On se dépêche de partir cinq minutes avant la fin du cours. Cela fait quatre ans que j'étudie sur le campus et avant, je ne faisais jamais la queue dehors." 

"Depuis que je suis là, je n'ai jamais vu un resto universitaire qui a des capacités suffisantes pour accueillir tous les étudiants aux mêmes horaires."

Alex, étudiant

à franceinfo

Environ 1 100 étudiants mangent au RU chaque midi depuis la rentrée. 15% de plus qu'en 2019, avant la crise sanitaire et l'instauration du repas à 1 euro pour les plus précaires. Un repas sur deux servi au RU est payé 1 euro. Les étudiants qui n'y ont pas droit payent, eux, 3,30 euros, tarif gelé depuis trois ans.

Le responsable du restaurant universitaire, Marc Echevin, assure que la hausse de la fréquentation est "absorbée. Les équipes peuvent servir jusqu'à 1 200 repas par jour sans grande difficulté." (THOMAS GIRAUDEAU / RADIO FRANCE)

Demande d'agrandissement   

Marc Echevin, le directeur du Resto U, reconnaît que l'attente peut être longue, mais il assure que la situation est sous contrôle. "Aujourd’hui, on absorbe beaucoup plus facilement parce que les étudiants ont pris l'habitude, souligne-t-il. Ils se sont rendu compte qu'à certains horaires, c'est plus fluide."

"Je pense qu'on est dans la limite haute de l'exercice. On peut monter jusqu'à 1 200, 1 250 repas maximum par midi. Mais au quotidien, ça va, les équipes sont rôdées."

Marc Echevin, directeur du resto U

à franceinfo

Mais la machine est plutôt grippée, selon Justine Gremont, la présidente de la Fédération des étudiants de Rouen. L'université a vu, sur ses trois campus, son nombre d'étudiants augmenter de 5% depuis 2019, et de 30% en dix ans. "On demande à ce que le restaurant universitaire soit agrandi, et rénové". Elle demande également une "réflexion sur les emplois du temps", pour que" tout le monde n'ait pas sa pause déjeuner au même moment".

Même chose du côté des trois cafétérias en plus du RU : elles sont aussi prises d’assaut. "Dès 13h, il n'y a plus rien", assure Justine Gremont. "Les cafétérias sont effectivement des palliatifs au RU, quand il y a trop de monde et que les étudiants n’ont pas le temps d'y manger", reconnaît Marc Echevin, et un sandwich plus une boisson ne constituent pas un repas aussi équilibré qu’au restaurant universitaire."

Justine Gremont, présidente de la Fédération des étudiants de Rouen, milite pour un agrandissement du resto U du Panorama et un élargissement de l'offre de restauration sur le campus. (THOMAS GIRAUDEAU / RADIO FRANCE)

Produits plus chers qu'en grande surface   

Quand il n'y a plus beaucoup de choix aux cafétérias et trop d’attente au resto U, les étudiants peuvent aussi acheter des sandwichs dans une épicerie du Crous. Ceux qui sont réalisés sur le campus sont compris dans les formules sociales, à 3,30 euros pour tous les étudiants et 1 euro pour les boursiers ou en situation de précarité. "Mais les sandwichs triangle, d'une marque connue, ainsi que les snacks et les sodas sont plus chers qu'au supermarché", dénonce Mattéo Blanpain, étudiant en histoire et membre du syndicat L'Alternative.

franceinfo a effectivement constaté des tarifs élevés dans cette épicerie. Contacté, le Crous Normandie reconnaît une erreur, et affirme progressivement retirer les sandwichs trop chers à la vente. Les supermarchés pratiquent des prix plus faibles que l'épicerie du CROUS car ils achètent ces produits moins cher via leurs centrales d’achat, nous explique-t-on.

En attendant de lancer un nouvel appel d’offres, et trouver un fournisseur moins cher, la solution trouvée par le CROUS est de confectionner davantage de sandwichs sur le campus. Il s'en vend 6 200 tous les jours en ce moment. Aucun projet d’agrandissement du Resto U n'est pour l'instant prévu.

Mattéo Blanpain, du syndicat étudiant L'Alternative, a remarqué que des sandwichs vendus dans une épicerie du CROUS sont plus chers qu'en supermarché. (THOMAS GIRAUDEAU / RADIO FRANCE)
Les resto U surchargés : le reportage de Thomas Giraudeau

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