Emmanuel Macron au 13H de TF1 : "C'est clairement pour remettre du lien avec une partie des retraités et des gens en province"
Emmanuel Macron sera l'invité du 13H de TF1 jeudi, et "ce n'est pas un hasard", a estimé sur franceinfo Arnaud Mercier, spécialiste de la communication politique. Selon lui, le président veut toucher le maximum de téléspectateurs.
Emmanuel Macron sera l'invité du journal de 13 heures de Jean-Pierre Pernaut sur TF1 jeudi 12 avril, a annoncé la chaîne samedi 7 avril. "Ce n'est pas un hasard" si le chef de l'État a choisi ce média, a estimé sur franceinfo Arnaud Mercier, professeur à l’Institut français de presse de l’université Paris 2 et spécialiste de communication politique. "Il le fait parce que ce journal télévisé est très regardé", en particulier par "beaucoup de retraités", explique-t-il, en notant une "difficulté à vouloir cibler une certaine population, dans un climat de questions sociales", en pleine grève à la SNCF.
franceinfo : Le 13H de Jean-Pierre Pernaut est suivi par 5 millions de téléspectateurs. Ce taux d'audience peut-il expliquer ce choix ?
Arnaud Mercier : C'est certain, même ! Pendant le début de son quinquennat, Emmanuel Macron semblait avoir un peu snobé les médias traditionnels, télévisions, radios. Puis à partir de l'automne, il s'est rendu compte qu'il avait besoin de temps en temps de donner des explications à la population qui trouvait que son silence sur les médias traditionnels était un peu pesant. Et maintenant on voit bien qu'il a décidé de choisir des médias qui font de l'audience. Le journal télévisé de 20H de TF1 et France 2, et maintenant le 13H, ce qui est quand même assez inhabituel dans l'histoire de la Ve République. Il le fait parce que ce journal télévisé est très regardé, et en plus il vise des populations bien particulières : beaucoup de retraités qui peuvent regarder le journal télévisé à 13H. Il a vraiment choisi exprès ce média, ce n'est pas un hasard.
Cherche-t-il à corriger son image en se montrant plus proche de certains Français ?
Oui. Il a maintenant deux déficits, si ce n'est trois. Il y a la question sociale, qu'on voit tous les jours avec les grèves. Il a beaucoup bénéficié du vote des retraités, des personnes plus âgées que la moyenne des Français. Le fait qu'il ait mis en place cette CSG augmentée pour les personnes retraitées sans que la compensation promise, la baisse de la taxe d'habitation, n'intervienne aussitôt, cela a commencé à créer une petite fracture de confiance. Et puis il y a aussi les régions. Les premières mesures de restrictions budgétaires ont été des mesures très importantes demandant des efforts aux collectivités territoriales, ce qui fait que son opposition, notamment l'opposition de droite, très bien implantée sur le plan local, joue de cet argument pour enfoncer un coin entre une partie des Français et Emmanuel Macron. Que ce soient les retraités ou les gens qui habitent en province, il a des choses à se faire pardonner, à expliquer. Donc le JT de Jean-Pierre Pernaut est tout à fait bienvenu, il cible parfaitement la population qu'il vise.
Jeudi prochain, n'est-ce pas un peu tard ?
Je trouve qu'il y a une ambiguïté. Le choix de Jean-Pierre Pernaut, c'est clairement pour remettre du lien avec une partie des retraités et des gens qui habitent en province qui lui font des reproches. Finalement, ce choix ne répond pas du tout à la volonté de cibler prioritairement la question sociale, les cheminots. Ce qui apparaît, c'est qu'il y a une difficulté à vouloir cibler une certaine population, dans un climat de question sociale. On l'attend dessus. On peut raccrocher les branches, parce qu'il y a les petites lignes, dites non rentables, dans les provinces. Je pense que c'est par là qu'il abordera la question sociale et de la SNCF. On peut s'étonner du calendrier. S'il ne veut pas parler prioritairement de la question de la SNCF, alors ce n'était peut-être pas le bon moment pour aller dans ce JT.
Il avait pourtant dit à plusieurs reprises qu'il ne voulait pas de ce type d'entretien ?
Il est arrivé bardé de certitudes sur le fait qu'il fallait mettre à distance les médias, les journalistes. Il est tombé un peu de sa superbe. Il s'est rendu compte que cela commençait à s'apparenter à un déficit de communication avec les Français. Donc, il a retrouvé le chemin des plateaux. Quand il y a une telle agitation sociale, dans le système français, on attend en effet que le président de la République descende dans l'arène et ne se contente pas de dire que c'est "l'affaire du gouvernement" ou "du Premier ministre". C'est au président de donner de le cap. C'est à lui de venir assumer ou expliquer une partie de ses choix qui justifient que le gouvernement accepte le rapport de force avec les grévistes.
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