Foire d'empoigne mardi à l'e-G8 autour du droit d'auteur et de la propriété intellectuelle
La palme du débat animé est décernée sans hésitation au débat sur la “propriété intellectuelle et l"économie de la culture à l"âge digital" (modéré par Bruno Patino, directeur de France 5 et directeur général chargé du numérique à France télévisions).
Du côté des tenants du droit d"auteur et des ardents défenseurs d"Hadopi :le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, Antoine Gallimard, à la tête de la maison d"édition éponyme, le patron d"Universal Music Pascal Nègre, celui de Bertelsmann Hartmut Ostrowski et de la Twentieth Century Fox Jim Gianopoulos. Tous contre un : John Barlow, l"ancien parolier de Grateful Dead, désormais vice-président de l"Electronic Frontier Foundation qui a essayé, en vain, de convaincre que commencer à contrôler Internet, c"était ouvrir la voie sur un contrôle total d"internet.
Frédéric Mitterrand a ouvert le bal, répétant une nouvelle fois son argument désormais rôdé sur Hadopi. Il s"est dit très “frappé” de voir qu"il y a encore en France une “opposition” à cette loi et cette Haute Autorité, et “des gens qui méconnaissent son aspect pédagogique” bien plus que “répressif”.
Même écho du côté d"Antoine Gallimard, qui “s"est félicité de la loi sur le prix unique du livre numérique” et a “espéré que nos amis européens le comprendront”.
Autant dire que John Barlow, même très applaudi, n"a pas convaincu ses interlocuteurs quand il a proclamé : “si vous contrôlez certains aspects d"Internet, vous contrôlez tout”. Et quand il a tenté de convaincre que la liberté était plus importante à léguer à ses enfants que le droit de propriété intellectuelle.
Jim Gianopoulos lui a rétorqué que le discours devait être libre mais que les films coûtaient de l"argent et qu"ils permettaient de créer des emplois.
Frédéric Mitterrand a saisi la balle au bond pour signaler “à notre honorable correspondant” qu"il “avait vécu du droit d"auteur” et qu"il l"avait “vécu comme une liberté”. Il a jouté qu"il ne “partageait pas cette “vision apocalyptique, celle de la dictature partie par la porte et revenue par la fenêtre d"Internet pour tout contrôler”.
Enchaînement vibrant de Pascal Nègre qui a fait un monologue lisant son intervention tel un discours sans interagir avec les autres intervenants. Extrait de son interjection “les industries créatives représentent 3.000 milliards de dollars de valeur et sont une importante source de contenu pour le haut débit. Elles sont coûteuses et risquées, on récupère la mise sur un artiste sur 7 ou 8. Un tiers de nos revenus dans la musique sont digitaux via itunes, Spotify, YouTube…”, soulignant que 15% des Suédois sont abonnés à Spotify.
Et de s"élever contre l"Espagne “premier pays pour la piraterie” et où “l"investissement est devenu difficile” (pas sûr qu"il ait entendu parler de la crise et des “indignados”…). Il a noté qu"il y a dix ans, en Espagne, sur les 50 meilleures ventes, dix étaient des nouveaux talents alors que l"année dernière il n"y en avait aucun. “Nous avons besoin de mesures pour que d"autres pays ne suivent pas l"Espagne !” Bref, Pascal Nègre a une idée précise de ce qu"il attend du G8 : “un nouvel âge de partenariat entre les Etats, l"industrie technologique et l"industrie artistique”.
John Barlow, encore, a tenté de souligner que le paiement sans la propriété intellectuelle, c"est jouable. De souligner qu"il n"y a jamais eu autant de créateurs, grâce à Internet. Paroles applaudies par la salle, pas par le ministre de la Culture : “Pasolini n"aurait pas pu faire de film s"il n"avait pas touché une rétribution pour son travail. Pensons aux créateurs qui depuis le début de la création humaine ont besoin d"être rétribué au moment même où elle se fait”. Mais pas un mot sur le spectacle vivant, notamment les concerts.
Fin de la discussion et début de la séance de questions, avec un joli happening de Jeremie Zimmermann (de La Quadrature du Net, qui entend défendre la liberté de l"Internet). Il a défendu les “pirates” et autres utilisateurs de BitTorrent, qui sont aussi les plus grands consommateurs de produits culturels. “Lorsqu"on aime, on est toujours prêt à soutenir la création”.
A deux sièges de distance, Patrick Zelnik, ex-patron de Virgin et actuel patron de Naïve, lui a répondu être d"accord sur un point : “les productions de qualité trouvent leur marché”. Mais il a estimé aussi qu"entre régulation et liberté, “il y a quelque chose qui s"appelle le libéralisme tempéré”.
Et de décocher une petite flèche à l"organisateur, Publicis : “les PME n"ont pas leur place ici (au forum) car elles ne peuvent sponsoriser un tel événement, mais elles représentent 80% des nouveautés. Il faudra un transfert de richesses entre les géants de l"Internet et les producteurs de contenus”.
Voir aussi :
>> le site eG8 de france télévisions
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