Loi Macron : motion sans passion à l'Assemblée
Jeudi après-midi, l'Assemblée nationale a rejeté la motion de censure visant la loi Macron. Un résultat sans surprise. Un enjeu qui n'a pas particulièrement mobilisé les députés et le gouvernement.
"On continue... Bonne soirée !" Le Premier ministre Manuel Valls quitte l'hémicycle d'un pas décidé, aussitôt la motion de censure visant la loi Macron rejetée, jeudi 19 février, et n'adresse que ces quatre mots aux journalistes qui fondent sur lui.
Le gouvernement n'était pas spécialement inquiet quant à l'adoption de la motion de censure. Elle ne pouvait pas passer pour des raisons arithmétiques : 289 voix, correspondant à la majorité absolue, étaient nécessaires pour la faire passer. Or les voix cumulées de l'UMP, de l'UDI, du FN et du Front de gauche sont insuffisantes.
Une opposition résignée et divisée
"Nous savons très bien que nous n'avons pas la capacité de renverser le gouvernement", concède le député UMP Patrick Ollier dans les couloirs de l'Assemblée, avant les débats. Mais cette motion était "l'occasion pour l'opposition de dire ce qu'elle pense de la politique globale du gouvernement", poursuit celui qui a été ministre chargé des Relations avec le Parlement sous Nicolas Sarkozy.
Comme pour le vote de la loi Macron, l'opposition est d'ailleurs aussi divisée que la majorité, ou presque. Pendant les débats, le député UDI Jean-Christophe Fromantin fait ainsi savoir qu'il ne prendra pas part au vote. "Le 49.3 n'a pas de sens, la motion de censure n'a pas de sens", estime le maire de Neuillly, qui se dit "extrêmement déçu après ces trois semaines de travail." Et d'ajouter : "J'étais à l'aise dans ce travail collaboratif." "Cette combinaison '49-3/ motion de censure' nous éloigne des Français qui attendent des actes politiques concrets plutôt que des postures politiciennes qui entament chaque jour la confiance vis à vis de la classe politique", explique-t-il sur son blog dans un billet signé avec trois autres députés centristes.
Des bancs clairsemés, un hémicycle dissipé
A 16 heures, alors que les débats démarrent, les députés du groupe socialiste sont visiblement sereins. Les bancs sont clairsemés - dans une motion de censure, seules les voix "pour" étant décomptées, leur présence est loin d'être indispensable. "Ils sont où les socialistes ?", lance à plusieurs reprises un député UMP.
Pour contrer une motion de censure, les rangs de la gauche ne sont quand même pas très fournis pic.twitter.com/YCIddeiu4Q
— FX Bourmaud (@fxbourmaud) February 19, 2015
Pendant les prises de parole de Christian Jacob, patron du groupe UMP à l'Assemblée, de l'UDI Philippe Vigier, de Roger-Gérard Schwartzenberg, président du groupe radical républicain démocrate et progressiste, de l'écologiste François de Rugy, les députés sont dissipés. Sur les bancs UMP, ça chahute, ça papote. A deux, parfois trois. Sur les bancs de la gauche, l'attention n'est pas pas non plus au rendez-vous : on consulte sa tablette, son téléphone, on feuillette le journal.
Le gouvernement, lui, suit à peine les discours. Emmanuel Macron et Manuel Valls discutent. Pis, le Premier ministre ignore ostensiblement le discours de Christian Jacob. Le chef du gouvernement se penche sur ses dossiers, les annote, tourne les pages, stylo ou surligneur à la main. Une attitude qu'il conserve lorsque l'UDI est à la tribune.
A l'issue des débats, le député PS de Seine-Saint-Denis, Razzy Hammadi, est interrogé sur les sièges vides à gauche. "Pour un jeudi, on était relativement mobilisé", remarque-t-il, soulignant que de nombreux élus ont regagné leur circonscription parfois lointaine.
Vers 18 heures, alors que les débats prennent fin, Eduardo Rihan Cypel, député PS de Seine-et-Marne, remarque que les bancs de l'UMP ne font pas non plus le plein et tweete cette photo.
L'opposition #UMP est loin d'être au complet dans l'hémicycle pour voter leur propre #MotionDeCensure... #DirectAN pic.twitter.com/wW15GmDJ1b
— Eduardo RIHAN CYPEL (@Rihan_Cypel) February 19, 2015
Des frondeurs adoucis
Alors que l'opposition fustige "une majorité incertaine", que Gilbert Collard, député du Rassemblement Bleu Marine, évoque une "fracture politique" à gauche, les frondeurs du PS lancent un appel au calme. "J'invite le gouvernement à discuter avec nous, déclare Pouria Amirshahi dans les couloirs de l'Assemblée, pendant les débats. Il est encore temps de réussir", insiste-t-il. Et de dédramatiser, évoquant une simple "dispute démocratique".
Ce n'est pas la fin du gouvernement
Même ton du côté du socialiste Jean-Marc Germain, député des Hauts-de-Seine, auteur du livre "Tout avait si bien commencé, journal d'un 'frondeur'". "Je lance un appel aujourd'hui : que le gouvernement soit à notre écoute, comme il l'a fait à ses débuts", déclare-t-il à l'issue du vote. Il fait alors référence à Lionel Jospin, affirmant que lorsqu'il était Premier ministre, "il discutait jusqu'au bout".
Pas sûr pour autant qu'ils aient entendu les avertissements lancés par Bruno Le Roux, chef du groupe PS, qui entend poser "un principe élémentaire" : que les députés PS ne votent pas contre le gouvernement ou la majorité. Il estime que des députés socialistes ont voté contre le gouvernement et que "c'est une fois de trop".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.