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L'Italien Mario Draghi succèdera mardi au Français Jean-Claude Trichet, en pleine tempête, à la présidence de la BCE.

La réussite de son passage à la présidence de la Banque centrale européenne dépendra notamment de l'Italie, pays auquel la Banque centrale pourrait être amenée à venir en aide si le gouvernement Berlusconi échoue à mettre en oeuvre ses réformes structurelles.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Mario Draghi prendra les rênes de la BCE mardi. (ERIC PIERMONT / AFP)

La réussite de son passage à la présidence de la Banque centrale européenne dépendra notamment de l'Italie, pays auquel la Banque centrale pourrait être amenée à venir en aide si le gouvernement Berlusconi échoue à mettre en oeuvre ses réformes structurelles.

Mario Draghi est un banquier central reconnu sur la scène internationale. Il arrive à Francfort dans une période primordiale pour la zone euro. Parfois surnommé "Super Mario", l'Italien de 64 ans devrait s'inscrire dans la lignée de son prédécesseur Jean-Claude Trichet.

Il affiche en effet un attachement sans faille à la stabilité des prix et martèle que la BCE ne pourra faire office ad vitam aeternam de pompier de la zone euro, la responsabilité de s'attaquer aux causes de la crise revenant aux Etats.

Grand commis de l'Etat, économiste et banquier reconnu, il avait été choisi fin 2005 pour redorer le blason de la Banque d'Italie ruiné par son prédécesseur Antonio Fazio, impliqué dans un scandale bancaire. Il a par ailleurs toujours fait preuve de grande fermeté à l'égard de son pays, considéré comme un maillon faible de la zone euro, allant même jusqu'à cosigner début août avec Jean-Claude Trichet une lettre pour exiger du gouvernement un effort d'austérité plus marqué et des réformes structurelles.

Principaux défis

Les rendements des obligations italiennes ont atteint en fin de semaine dernière leur plus haut niveau depuis la création de l'euro, un signe de tension et de défiance à l'égard du gouvernement de Silvio Berlusconi malgré ses promesses réitérées de réformes.

Les propos de Draghi sur les rachats d'obligations ont semé la confusion sur sa position quant au rôle de la BCE dans la gestion de la crise avant même qu'il en prenne la présidence. Et l'épisode sonne comme un rappel de l'importance extrême de la communication dans son nouveau rôle. Ses talents en la matière seront mis à l'épreuve dès jeudi, lors de la conférence de presse mensuelle qui suit la réunion du Conseil des gouverneurs sur les taux d'intérêt.

Les marchés financiers, qui avaient pris l'habitude de décoder le vocabulaire et les silences de Jean-Claude Trichet depuis huit ans seront à l'affût de la moindre nuance en la matière. L'autre "test" auquel sera soumis Mario Draghi portera bien évidemment sur son attitude en matière de taux d'intérêt.

Certains voient en lui une "colombe"

Face à l'aversion pour l'inflation des membres allemands de la BCE, il pourrait avoir du mal à entamer son mandat par une baisse de taux visant à soutenir la croissance, même s'il a souligné la semaine dernière qu'elle risquait fortement de ralentir. L'OCDE a abaissé lundi sa prévision de croissance pour la zone euro en 2012, à 0,3% seulement. L'inflation, elle, est restée inchangée en octobre à 3,0% en rythme annuel, un niveau supérieur d'un point à l'objectif de la banque centrale.

S'il poussait jeudi pour une baisse des taux d'intérêt dès sa première réunion dans le siège de président, Mario Draghi prendrait le risque de donner raison à tous ceux qui, en Allemagne, voient en lui une "colombe" et donc un risque de résurgence durable de l'inflation.

A l'inverse, laisser les taux inchangés alors qu'ils sont nettement supérieurs à ceux en vigueur aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et au Japon notamment, pourrait contribuer à affaiblir encore la croissance déjà anémique des 17. Dernier sujet sensible pour le nouvel homme fort de l'euro : l'avenir de son compatriote Lorenzo Bini Smaghi, qui est à l'origine de tensions diplomatiques entre Paris et Rome.

Le "cas Smaghi"

En avril, Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi avaient conclu un accord selon lequel les autorités française apportaient leur soutien à la candidature Draghi pour la présidence en échange de l'assurance que la France récupérerait rapidement le siège au directoire de la BCE actuellement occupé par Lorenzo Bini Smaghi.

Mais ce dernier a depuis clairement laissé entendre que toute pression visant à l'évincer avant la fin de son mandat, en 2013, équivaudrait à remettre en cause l'indépendance de la BCE. Et il a reçu le soutien de cette dernière. Silvio Berlusconi l'a néanmoins appelé à quitter ses fonctions jeudi après le sommet européen.

"Je suis certain que Bini Smaghi va réaliser qu'il ne peut pas se permettre de devenir le casus belli de la détérioration des relations entre la France et nous, et qu'il démissionnera avant la fin de l'année, comme prévu", a dit le chef du gouvernement italien. "Sarkozy a commencé à avoir l'air ennuyé (...) A un moment donné, j'ai dit à Sarkozy : 'Mais que veux-tu que je fasse ? Que je le tue ?'"

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